Chapitre 21

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Ludovic Leclerc se redressa péniblement, ses jambes flageolantes sous le poids d'une terreur qu'il n'avait jamais ressentie auparavant. Le regard vide, il scruta l'endroit où Charlie venait de disparaître, mais il n’y avait plus rien, juste le vide, comme si l’entité n’avait jamais existé. Pourtant, l’air autour de lui semblait épais, lourd de menace. Il était piégé. Il le savait. Charlie avait joué son dernier coup, et maintenant, tout s'effondrait.

Le détective se retourna d’un coup, le souffle court, et se mit à courir. Son instinct de survie prenait le dessus, mais il savait, au fond de lui, que cela ne servait à rien. Chaque pas résonnait dans le dédale de ruelles sombres qui entouraient la fête foraine. La foule, autrefois si bruyante et oppressante, avait disparu comme par magie, remplacée par un silence morbide qui semblait s'étirer à l'infini. Ludovic tenta de se frayer un chemin à travers cette ruelle sinueuse, cherchant désespérément une sortie, mais chaque détour ne faisait que l’enfermer davantage.

Les murs semblaient se rapprocher, se resserrer autour de lui, étouffants. L’espace devenait de plus en plus restreint, la lumière de la fête s’évanouissant derrière lui. Il tenta de se concentrer, de se rappeler les plans qu’il avait étudiés, les sorties qu’il avait repérées, mais son esprit était flou, embrouillé par la panique. Tout se brouillait, comme si la réalité elle-même se dérobait sous ses pieds. Était-il encore dans la fête foraine, ou quelque part entre les ombres où Charlie l’avait attiré ?

Son cœur battait à tout rompre alors qu'il accéléra le pas, les yeux écarquillés, cherchant une issue. Mais chaque ruelle menait à une impasse. Le sol sous ses pieds semblait glissant, comme si l'espace se distordait, se tordait autour de lui. L'air était devenu lourd, difficile à respirer, chargé de cette même énergie obscure qu'il avait ressentie chaque fois qu'il s'approchait de Charlie.

Il entendit un murmure, quelque part dans le néant. Un souffle à peine audible, mais qui glaça son sang. Il se retourna d’un coup, mais il n’y avait rien. Juste cette ruelle déserte, qui s’étirait à perte de vue. Il voulut crier, appeler à l’aide, mais aucun son ne sortit de sa gorge. C’était comme si sa voix, tout comme sa présence, s’effaçait, se diluait dans l’atmosphère.

Puis il sentit quelque chose derrière lui. Une présence. Il ne se retourna pas, paralysé par la certitude que Charlie était là, dans l’ombre, attendant le moment où Ludovic se retournerait pour l’engloutir entièrement. L’air autour de lui vibrait, un frisson glacial parcourut son échine.

Il tenta de fuir à nouveau, mais ses jambes semblaient si lourdes. Chaque pas devenait de plus en plus difficile, comme si le sol lui-même cherchait à le retenir. Il sentit son esprit vaciller, la réalité se dissoudre autour de lui. Chaque pas l’enfonçait davantage dans l’inconnu. L’espace semblait se déformer, chaque coin de ruelle devenant une boucle interminable. Il avait la sensation terrifiante de courir sur place, piégé dans un labyrinthe sans fin.

Puis, soudainement, il s'arrêta. Le sol sous ses pieds semblait s'effondrer, se dérober, et l’obscurité l'engloutit complètement.

Le lendemain, alors que l'aube teintait le ciel de gris, la police arriva à la fête foraine, répondant à un appel inquiétant. Plusieurs témoins avaient rapporté avoir vu un homme courir frénétiquement à travers les ruelles autour du parc, avant de disparaître sans laisser de trace. Des policiers fouillèrent le périmètre, cherchant une explication, mais tout ce qu’ils trouvèrent furent les effets personnels de Ludovic Leclerc : sa veste, son téléphone, et un carnet usé, éparpillés sur le sol près d'une impasse, comme abandonnés en hâte.

Il n’y avait aucune trace de lutte, aucune indication de ce qui avait pu lui arriver. Le lieu semblait étrangement calme, comme figé dans le temps. Les objets de Ludovic gisaient là, seuls vestiges de son passage. Mais Ludovic lui-même… avait disparu. Tout comme les victimes précédentes.

La confusion régnait parmi les enquêteurs. Comment un homme avait-il pu disparaître sans laisser le moindre indice ? Les recherches s’intensifièrent, les officiers interrogeant des témoins, fouillant les moindres recoins du parc et des ruelles environnantes. Mais personne n’avait rien vu. Personne ne se souvenait de lui précisément. Il était juste… parti.

Le chef d’équipe examina les objets abandonnés avec attention. Le carnet de Ludovic était ouvert à une page, où des notes griffonnées à la hâte décrivaient sa traque de Charlie. Les mots étaient désordonnés, frénétiques, mais un nom revenait encore et encore : Charlie. Ce nom, si souvent évoqué dans les rapports de Ludovic, semblait maintenant une clé, mais personne ne savait ce qu'il signifiait vraiment. L’équipe d’enquêteurs resta perplexe. Qui était Charlie ? Pourquoi Ludovic semblait-il obsédé par lui ?

Mais tout comme pour les autres victimes, aucune réponse claire ne surgit. La police, qui avait suivi Ludovic tout au long de son enquête, savait qu’il se consumait peu à peu dans cette traque, mais jamais ils n’auraient pensé que cela le conduirait à disparaître ainsi, comme s’il n’avait jamais existé.

Les jours passèrent, et Ludovic devint peu à peu une autre note dans les archives des disparitions inexpliquées. Les collègues qui l'avaient côtoyé évoquèrent son nom avec tristesse, mais à mesure que le temps passait, ses souvenirs se floutaient, tout comme ceux des témoins des meurtres qu’il enquêtait. Ludovic devint une énigme, un mystère irrésolu. Son nom, tout comme celui de Charlie, était désormais entouré de confusion.

Le dossier du détective disparu s’ajouta à la pile des affaires non résolues. Mais au fond des consciences de ceux qui l’avaient connu, une peur persistait : et si Charlie, cette entité insaisissable qu’il avait poursuivie, n’avait jamais été une simple illusion ? Et si Ludovic, comme les autres victimes, avait été englouti par cette force obscure, absorbé par l'ombre même qu'il tentait d'éclaircir ?

Car dans le silence qui suivit la disparition de Ludovic Leclerc, il restait une vérité troublante : à chaque fois que quelqu’un s’approchait trop de Charlie, il disparaissait. Tout comme Ludovic.

Et bientôt, personne ne se rappellerait vraiment qui était Ludovic Leclerc.

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