chapitre 27 :

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Au réveil, des dizaines de messages d’Octavia décoraient mon écran. Des vocaux, assez longs pour en faire des podcasts.

- Meuf, ton Charles, il est wow. Non, franchement, je l’aime bien. Il est gentil, drôle, et il est pas trop moche. Je veux dire, avec tes goûts… spéciaux, je m’attendais à pire.

Pire ? La beauté même se serait inclinée devant lui.

- Puis il a un côté romantique, poursuivit-elle, et j’ai l’impression que c’est un mec bien. En même temps, il a plutôt intérêt, sinon il aura affaire à moi. Surtout que vu nos tailles respectives, il risque fortement de se prendre un coup de boule dans les bijoux de famille. En tout cas, je suis ravie que vous vous soyez trouvés tous les deux. Je t’ai rarement vu aussi heureuse, ça fait chaud au cœur. Profite bien, et au fait, n’oublie pas que c’est moi qui t’aime le plus fort. Les copines avant les copains. Bisous, à demain.

Je trouvais cela amusant qu’elle me dise « à demain » comme si nous n’allions pas nous reparler de la journée, alors qu’elle savait pertinemment que j’allais l’appeler dans la minute suivante. Nous passâmes des heures au téléphone, entrecoupées par des petits messages de Charles qui m’envoyait des photos de chat.

Le lendemain, en arrivant devant le lycée, Octavia n’y était pas. Elle commençait à dix heures, bitch. Je devrais donc attendre deux heures de perme, seule, sans elle. La simple allusion à la solitude me fit frémir, me rendant hésitante à franchir le portail. Je pourrais aussi bien rester dehors, dans la ville, ou marcher jusqu’à sa maison perdue sur les hauteurs. Je pourrais acheter un croissant et me poser dans un café. Je pourrais tout faire sauf aller m’asseoir dans une salle remplie de gens insupportables, et fixer la course des minutes sur le cadran de l’horloge. Toutes ces autres perspectives me parurent mille fois plus intéressantes, mais furent balayées d’un coup de vent lorsque je sentis quelqu’un m’agripper le bras.

- Salut, Octavia m’a dit que vous commenciez plus tard, ça te dit d’aller prendre un petit déjeuner avec moi ?

Deux questions : depuis quand Charles parlait à Octavia, et qu’est-ce qu’il foutait à la porte de mon lycée ?

- Ça te branche ou pas ? insista-t-il.

- Oui, oui bien sûr.

Tout me branchait plus que deux heures de perme.

Il me prit par la main et m’entraina « chez Audette », un petit café au coin de la rue. Il commanda un café, grand adulte qu’il était, et moi un chocolat chaud.

- Le père et sa fille, ironisais-je lorsque nous reçûmes nos boissons.

- Je préfère toujours ça au milkshake banane framboise.

- Arrête, on ne critique pas le milkshake banane framboise.

- Je ne le critique pas, je constate seulement sa défaillance gustative.

- Et moi je constate ton absence de capacité à apprécier les bonnes choses.

Il sourit.

- Tu n’as pas tort, c’est sûrement pour cela que je suis avec toi.

Aïe.

Je lui aurais bien envoyé le reste de mon chocolat à la figure, mais j’étais déjà en retard pour un cours idiot qu’on appelait initiation à la philosophie. Je rejoignis Octavia dans une petite salle qui rassemblait des élèves de toutes les premières du lycée. Pas le meilleur mélange, soit dit en passant.

Le professeur s’appelait monsieur Dumatin, un nom amusant comme il s’en faisait beaucoup dans cet établissement. Il était gentil, trop gentil, et manquait cruellement de charisme. Un point sur lequel Octavia et lui se comprenaient, et qui lui portait souvent préjudice. Ce jour-là en particulier. Alors que des avions volaient dans la salle, il parlait toujours de son calme olympien, faisant mine de ne rien remarquer. Puis l’un d’entre eux heurta la craie qu’il tenait dans la main. Sans plus d’agitation, il se retourna, puis déclara le plus sérieusement du monde :

- Vous, tous, allez au diable.

Et il poursuivit son cours jusqu’à la sonnerie.

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