#12 Ode à Line
Ode à Line
C’est la première fois qu’un de mes textes est nommé.
Je penses qu’il est mérité, ça résonance, déjà, fait rêver.
Line, tu étais ma nounou, vers mes huit - dix ans.
Je ne sais plus exactement. La notion du temps, quand on est pas vraiment présent, c’est différents.
Tu ne correspondait pas vraiment, au standard de la beauté, que la société nous imposait.
Tu étais naturelle, sans maquillage, une coupe de cheveux simple, d’un jolie châtain, ton look était sobre, jean basket.
Tu étais douce, bienveillante, à l’écoute.
Tu m’acceptais comme j’étais, je dirais même plus, tu m’appréciais comme j’étais.
Avec toi je pouvais, « être », simplement.
Pour moi, tu étais la vrai beauté, encore maintenant, quand je penses au souvenir de toi, c’est l’image que j’ai gardé.
Belle, pure, lumineuse, et tendre.
Nous avons eu d’autres nounous, aucunes n’avaient ton éclat.
Nous nous sommes revus, une fois, comme deux amies, car sans doute, tu l’as senti, toi aussi.
Il y avait un lien entre nous. Je crois, peut être, que tu es la première personne, qui m’ai vraiment vu, comprise, et accepté.
Nous sommes allées au cinema, en plein paris.
Je n’ai aucun souvenir du film.
Ce devrait être l’hiver, car quand nous sommes sortis, il faisait nuit. Je me rappelle de l’ambiance, de la lumière des lampadaires, des vitrines remplis de couleurs.
Oui, il devait faire froid, mais mon coeur était chaud.
Nous sommes allées au McDo, j’ai pris une boite de frites, dans laquelle on met des épices, on secoue, et on savoure. Je me rappelle que c’était bon. Je me rappelle de ton regard, de ton sourire. Je crois que c’est l’un de mes souvenirs, les plus lumineux de ma jeunesse.
Aujourd’hui, j’ai 36 ans, je suis en psychanalyse, et cela fait deux fois que je parles de toi, et que je fonds en larmes.
Premièrement, parce que tu es la première personne qui m’ai offert cette tendresse, il ne s’agissait même pas de gestes. Je ne crois, jamais, t’avoir fait de câlin ou de bisou. Mais il s’agissait, d’attention, d’intention, d’affection et de partage.
Tu es, et restera, l’une des lumières de ma vie. Alors, j’ai surement pleuré, de l’émotion, que ce souvenir m’évoquait.
Deuxièmement, parce que cela me fait réaliser, qu’avant de te rencontrer, je n’avais jamais ressenti cela.
Je n’avais jamais senti, tout ce que tu m’as offert, alors que tu étais une nounou que je voyais, trois, quatre heures par jour, pendant peut être un an, et ce fameux, début de soirée au cinema.
Je penses, que tu es la première personne que j’ai aimé.
Peut être, te souviens-tu de moi.
Toi, tu resteras gravé dans mon cœur.
Car grâce à toi, une minuscule lumière inconsciente, c’est réveillée en moi.
La première d’ailleurs, qui sera suivie par d’autres, et qui m’auront mené, là où j’en suis maintenant.
La lumière de la remise en question, d’un sentiment nouveau, d’un partage nouveau.
Je ne le savais pas à l’époque, mais je peux le dire maintenant, en pleine conscience : merci.
Tu es la première à m’avoir fait sentir exister.
Annotations