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Plus ils s’approchaient de la Défense et plus Alexandre sentait que quelque chose d’anormal était en train de se dérouler près de la tour EUROGNL. Ils avaient été dépassés dans le tunnel par de multiples fourgonnettes de CRS et de gendarmes mobiles toutes sirènes hurlantes, ainsi que des ambulances et des camions de pompiers.

En sortant du tunnel, ils virent un sinistre panache de fumée noire s’élever au-dessus de la tour EUROGNL. Arrivés à 100 mètres de la tour, Alexandre et Victoria ne purent aller plus loin : la route était barrée par la police.

Laissant là leur moto, les deux jeunes gens poursuivirent leur trajet à pied.

L’atmosphère se chargeait d’odeurs de brûlé et de clameurs difficiles à identifier. Des groupes d’individus le visage masqué par des cagoules ou des kéfiés noir et blanc couraient de manière erratique. Débouchant en vue du parvis de la tour, Alexandre et Victoria se figèrent, éberlués par ce qu’ils voyaient. Des dizaines de personnes vêtues de noir, armées certaines de battes de baseball jetaient toutes sortes d’objets en direction des gendarmes mobiles chargés de protéger l’entrée de la tour EUROGNL. Certains brandissaient des feux de Bengale pendant que d’autres agitaient des fumigènes. Plusieurs vitres sur les façades des immeubles autour d’eux avaient été brisées, probablement sous l’effet de jets de pavés, si bien que le sol était jonché de morceaux de verre.

Alexandre reconnut le mode opératoire des antifas et des black blocks. Le sol et les murs autour de la place avaient été tagués d’inscriptions anticapitalistes dirigées contre l’entreprise d’Alexandre. « Pétrole = profit, planète = poubelle » ; « Capitalisme fossile, cancer de la planète » ; « Chambres à gaz hier, bateaux de gaz aujourd’hui » ; « EUROGNL = parasites » ; etc. Les inscriptions dénotaient pour la plupart un humour douteux, parfois teinté d’un antisémitisme à peine voilé.

Les journalistes, un peu moins nombreux qu’auparavant, filmaient la scène.

Le kiosque à journaux en face de la tour était en feu, ce qui expliquait la fumée visible à plusieurs kilomètres à la ronde. En plus de la fumée, l’air était chargé de gaz lacrymogène et le bruit des grenades assourdissantes brutalisait leurs tympans.

Les yeux d’Alexandre et de Victoria étaient irrités et se remplissaient de larmes incontrôlables.

Ils furent soudain entourés par plusieurs personnes dont l’une désignait Alexandre en gesticulant : « il travaille pour EUROGNL, je l’ai vu à la télé avec sa tête de clown ».

Alexandre sentit soudain qu’on le poussait brutalement de côté. Il allait protester quand il comprit que Victoria, en le poussant, lui avait permis d’esquiver le coup de poing de l’un des assaillants. Retrouvant ses réflexes de kick boxing, il se mit en en garde pour protéger son visage et imprima un violent coup de coude au visage de l’antifa qui avait essayé de le frapper. Celui-ci hurla de douleur en se tenant la mâchoire déboitée.

Au même instant, Victoria donna un coup de pied dans l’entrejambe de l’antifa qui avait désigné Alexandre.

Ce dernier se trouvait désormais aux prises avec un troisième personnage dont il n’arriva pas à éviter un coup sur son visage qui lui arracha un cri de douleur. Répliquant à cette attaque, Alexandre décocha un formidable coup dans le ventre de son adversaire que la douleur obligea à se plier en deux.

Les deux compagnons s’étaient mis en position de défense, prêts à parer les prochains coups quand ils furent sauvés par une charge des policiers. Sous leur protection, ils purent se mettre à l’abri dans le hall d’accueil d’EUROGNL.

Alexandre présentait un œil au beurre noir et Victoria s’était blessée à la main, probablement en raison d’un morceau de verre.

Encore essoufflés par leurs efforts et les sens démultipliés par l’adrénaline, les deux jeunes gens se dévisagèrent. Victoria effleura de ses doigts le visage tuméfié d’Alexandre.

« Je ne pensais pas que c’était si dangereux de travailler à la Défense, Alex » murmura-t-elle.

« Je ne savais pas que les conseillers de l’Elysée étaient formés à donner des coups de pieds dans les couilles » répondit-il sur le même ton. Il avait noté avec plaisir l’utilisation spontanée du diminutif de son prénom par Victoria .

« En réalité, ça ne fait pas partie du cursus. » rétorqua Victoria très sérieusement. Et elle ajouta avec un sourire « C’est en quelque sorte ma botte secrète. »

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