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« Un vent de panique souffle sur la France et sur le monde entier. » C’est sur cette phrase inquiétante que le présentateur ouvrit le journal télévisé.
« Les tensions géopolitiques causées par les évènements à Boston et dans le Golfe persique n’en finissent pas de peser sur la vie de nos compatriotes. La hausse des cours du pétrole se répercute déjà dans les stations-services où l’essence et le gasoil se sont renchéris de plus de quarante centimes en trois jours côtoyant désormais le seuil des deux euros par litre. »
A l’écran apparaissaient de longues files de véhicules attendant leur tour pour faire le plein.
« Cette hausse des prix ne décourage pourtant pas les consommateurs qui se précipitent chez les détaillants de carburants par peur de la pénurie. Malheureusement, ces comportements peu civiques ont précisément pour conséquence de provoquer cette pénurie à la pompe alors même que les stocks dans notre pays afficheraient, aux dires du gouvernement, un niveau encore confortable. Néanmoins, afin de garantir un minimum d’essence pour chaque client, la plupart des stations-services ont instauré un système de rationnement. Inutile donc d’espérer acheter plus de 30 litres de carburant dans votre station-service sauf à refaire la queue pendant des heures. »
« Cette situation a occasionné de nombreuses tensions entre automobilistes. A La Seyne-sur-Mer dans le Var, une dispute a dégénéré entre deux clients : on déplore une personne décédée et une autre dans un état grave. »
La voix du journaliste enchaînait « Par ailleurs, ces évènements ont également des répercussions politiques préoccupantes. En ce moment même, des manifestations se déroulent dans la plupart des villes de France, certaines à l’appel des partis d’extrême droite pour dénoncer le danger que représente l’islam radical en France, d’autres à l’invitation de partis d’extrême gauche afin de dénoncer l’islamophobie. »
« A La Défense, le siège de la société EUROGNL a été le théâtre de scènes d’émeutes hier soir… »
Alexandre et Victoria reconnaissaient à l’écran les images violentes dont ils avaient été les témoins la veille. Commentée par le journaliste, la scène devenait encore plus terrifiante. Ils pouvaient voir le kiosque à journaux noyés par les flammes, les nuages de gaz lacrymogène et les fumigènes des hooligans, les charges des CRS et, à un moment, leurs propres personnes exfiltrées par la police jusqu’à l’intérieur du siège de l’entreprise.
« Je ne savais pas qu’on jouait dans un film hollywoodien » nota Alexandre en adressant un clin d’œil à, Victoria.
« J’en frémis rétrospectivement » rétorqua la jeune fille.
Victoria avait quitté Alexandre peu après la fin du journal télévisé pour regagner l’Elysée.
Dans la cellule de crise, le rythme de travail avait ralenti pour Alexandre. La situation dans le Golfe Persique était presque devenue un épiphénomène dans un monde en ébullition. A moins d’un nouveau soubresaut affectant directement l’image d’EUROGNL, sa présence en cellule de crise n’était pas indispensable. Il avait donc décidé de quitter son poste jusqu’au lendemain.
Il s’apprêtait à franchir le seuil de la tour quand une notification apparut sur l’écran de son téléphone. Il sentit son cœur battre plus rapidement en voyant le nom de Victoria s’afficher.
« Est-ce que ça te dit de venir à l’Elysée ? »
Alexandre n’hésita pas une seconde. « Je suis là dans 30 minutes ».

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