5-4

3 minutes de lecture

Alexandre était déjà attablé depuis quelques minutes à la terrasse du restaurant lorsque Victoria fit son apparition vêtue cette fois d’un pantalon ample et d’une blouse en coton blanc et dentelle anglaise, les cheveux attachés par un bandeau. Ils avaient convenu de se retrouver pour un brunch dominical dans un café situé sur les hauteurs de Belleville. De là où ils étaient, ils dominaient le parc de Belleville et bénéficiaient d’un large panorama sur Paris. L’endroit avait été choisi par Victoria qui appréciait ce quartier populaire très différent des quartiers bourgeois où elle habitait.

La chaleur des derniers jours n’était pas retombée. La jeune fille avait pris le temps de faire un jogging matinal pour profiter des heures les plus fraîches de la journée. Elle semblait particulièrement en forme malgré son coucher tardif.

Les amis s’embrassèrent sur les deux joues. Il sembla à Alexandre que le baiser ce matin était plus appuyé que les autres jours. A moins que ce ne soit le fruit de son imagination ?

Autour d’eux, les tables étaient peuplées de jeunes couples venus profiter de la météo estivale à l’ombre des parasols.

Des familles endimanchées et bariolées passaient sur le trottoir en direction de Ménilmontant. Les enfants se poursuivaient en se chamaillant gaiement.

Après avoir reçu leurs commandes, Victoria but une gorgée de son capuccino, regarda Alexandre et le mit au courant des évènements de la nuit sur le Surcouf.

Les charges explosives avaient été désamorcées pendant la nuit par Préville. Par ailleurs plusieurs scénarios avaient été envisagés pour débloquer le détroit. Le plus abouti impliquait l’usage de quatre remorqueurs très puissants pour repousser le Surcouf en dehors du détroit. Les remorqueurs étaient prêts, attendant à Dubaï l’ordre d’intervenir. Mais l’ordre n’avait jamais été donné. Il avait été jugé trop hasardeux, même après la neutralisation des charges explosives. Si des balles perçaient un des réservoirs de GNL, il y avait un réel risque de BLEVE (boiling liquid expanding vapor explosion) : le GNL se réchauffe rapidement en raison de la rupture d’isolation et reprend brutalement son volume gazeux avec un facteur d’expansion de six cents fois. Bref, même sans charge explosive, le risque d’explosion restait trop important.

« Si je résume, les terroristes n’ont plus la possibilité de faire sauter le Surcouf avec leurs bombes. Mais il leur suffit de quelques balles de kalachnikov pour obtenir un résultat équivalent… » conclut Alexandre.

Abou Saïf ressassait au fond lui la dernière remarque de Kader.

« Comment pouvaient-ils savoir que mes deux Tchétchènes avaient été neutralisés ? Avec leurs drones et leurs satellites, il n’était pas exclu que les militaires avaient vu Ramzan s’échapper sur le life boat et la scène du corps d’Aslan jeté à la mer. Mais comment pouvaient-ils savoir qu’il s’agissait des deux tchétchènes ? Même s’ils avaient récupéré Ramzan après sa fuite, ce dernier ne pouvait pas être au courant de la mort de son frère qui avait eu lieu au moment où il détachait le lifeboat. Il était impossible qu’il ait pu avoir l’information pour la répéter à qui que ce soit. A moins que ? »

Une pensée déplaisante avait émergé dans les réflexions du terroriste.

« Et si, malgré toutes les précautions prises, quelqu’un sur le bateau parvenait à communiquer ce genre d’informations aux militaires occidentaux… ? »

Il avait noté quelques détails troublants par ailleurs : une cabine qui ne semblait pas attribuée, un rond de serviette à la cantine qui ne paraissait pas être utilisé… Une hypothèse encore plus inquiétante lui venait à l’esprit : « Et si une personne de l’équipage avait réussi à se cacher dans un recoin du bateau ? Peut-être était-ce elle qui avait utilisé le life boat ? Non ce n’était pas possible : il n’aurait pas pu avoir connaissance de la mort d’Aslan et ensuite partager l’information. »

Une autre pensée l’assaillit : « Est-ce que Ramzan s’était vraiment échappé ? Ou bien était-il tombé dans un guet-apens ? »

Il fallait en avoir le cœur net. Si un membre de l’équipage se cachait sur le bateau, au moins une personne devait être au courant : celui qui gérait l’intendance.

Annotations

Versions

Ce chapitre compte 1 versions.

Vous aimez lire Kerdrean ?

Commentez et annotez ses textes en vous inscrivant à l'Atelier des auteurs !
Sur l'Atelier des auteurs, un auteur n'est jamais seul : vous pouvez suivre ses avancées, soutenir ses efforts et l'aider à progresser.

Inscription

En rejoignant l'Atelier des auteurs, vous acceptez nos Conditions Générales d'Utilisation.

Déjà membre de l'Atelier des auteurs ? Connexion

Inscrivez-vous pour profiter pleinement de l'Atelier des auteurs !
0