6-2

3 minutes de lecture

Alexandre leva les yeux vers les écrans d’information continue. Ils ne passaient plus l’explosion de Boston en boucle comme la semaine précédente. En revanche, l’actualité économique occupait les différentes chaînes, avec leurs corollaires de troubles sociaux.

Sans surprise, les différentes bourses avaient ouvert en forte baisse. Il s’agissait même, d’après les commentateurs, du krach le plus violent depuis 1929. On assistait à un nouveau lundi noir sur les marchés financiers. En cinq jours, le Dow Jones avait perdu plus de 60% de sa valorisation. C’était complètement inédit.

A l’inverse, le cours du pétrole atteignait des sommets et celui de l’or avait été multiplié par trois sur la même période. Le dollar était désormais à parité avec l’Euro.

Victimes de ces mouvements boursiers erratiques, de nombreuses sociétés avaient été obligées de se mettre sous la protection du régime des faillites. Des milliers de salariés dans le monde avaient trouvé porte close en arrivant à leur bureau ce lundi matin, beaucoup ayant été informés de leur licenciement par un simple Email impersonnel le matin même.

De nombreux salariés en revanche ne s’étaient pas présentés à leur bureau en raison du manque d’essence, par peur de se retrouver dans des émeutes ou que leur logement ne soit pillé pendant leur absence.

En France, le gouvernement avait dû réquisitionner plusieurs acteurs des transports, de l’énergie et des télécommunications pour garantir un service minimal.

Victoria reprit sa place à côté de lui. Elle le regarda avec un petit air de triomphe.

« Problème réglé. Alain a l’interdiction de traiter la crise, de faire la moindre déclaration publique ou privée sur le sujet. Et notamment, de te demander des informations ou des comptes sur celle-ci. »

Et lui prenant la main sous la table, elle ajouta en souriant « N’hésite pas à me demander directement la prochaine fois que tu auras besoin de faire un putsch. »

« Nouvelle vidéo des terroristes » annonça Victoria à Alexandre. Celui-ci sursauta en entendant la nouvelle.

« Hein ? Où ça ? »

« Sur Facebook et Twitter » lui répondit la conseillère du président.

« Tu es bien informée… » grommela Alexandre qui n’avait pas perdu toute sa mauvaise humeur.

« Oui » rétorqua Victoria qui s’amusait de voir Alexandre bougon. « J’ai un contact aux services de renseignements » ajouta-t-elle avec malice.

« Désolé d’être de mauvaise humeur ce matin. » lui répondit Alexandre avec un sourire contrit « J’ai l’impression que tout le monde s’acharne pour m’empêcher d’avancer : la RATP, les manifestants, »

« Raison de plus pour t’acheter une moto » le taquina la jeune fille.

« Je te promets d’y réfléchir » répliqua Alexandre avec un sourire.

Il trouva rapidement la vidéo mise en ligne par les djihadistes. Elle montrait la vie sur le Surcouf sous l’empire de la charia. On pouvait presque croire que toutes les personnes filmées n’agissaient pas sous la contrainte d’un commando armé. Deux otages prenaient la parole successivement pour affirmer qu’ils étaient bien traités, qu’ils ne manquaient de rien et pour demander aux gouvernements français et américains de mettre en œuvre les revendications des djihadistes.

« Des otages qui prennent la défense de leurs ravisseurs, cela ressemble au syndrome de Stockholm » fit remarquer Victoria.

Alexandre était impressionné par le professionnalisme du montage de la vidéo.

En revanche, plusieurs indices semblaient indiquer que les images étaient déjà anciennes. On pouvait ainsi apercevoir l’un des deux Tchétchènes, aisément reconnaissables à leur pilosité rousse et dont Alexandre savait qu’ils étaient décédés depuis le samedi. De même, sur un des plans était visible le matelot Jaypee qui avait été exécuté le vendredi.

La vidéo ne montrait aucune violence, comme si elle avait pour but de véhiculer l’idée que les djihadistes n’avaient aucune intention malveillante à l’égard de l’équipage. C’était un bel outil de propagande.

Mais cette impression était dissipée par les dernières secondes de la vidéo au cours desquelles Abou Saïf réitérait sa menace de faire exploser le navire si ses exigences n’étaient pas satisfaites.

Après avoir visionné la vidéo, Alexandre était indécis. Fallait-il qu’EUROGNL réagisse officiellement ? D’un côté, il ne voulait pas donner du crédit aux déclarations des terroristes et encore moins leur faire de la publicité. De l’autre, EUROGNL ne pouvait pas non plus ignorer une vidéo qui mettait en scène le Surcouf et son équipage.

Il proposa à Christophe de publier sur le site Internet d’EUROGNL un court communiqué pour dénoncer les actions des terroristes et renouveler la confiance de la compagnie dans les actions mises en œuvre par les autorités dans le but de mettre fin à cette situation inacceptable. En revanche, le texte ne serait pas « poussé » dans les médias ou sur les réseaux sociaux. Christophe accepta cette proposition qui lui paraissait équilibrée.

Annotations

Versions

Ce chapitre compte 1 versions.

Vous aimez lire Kerdrean ?

Commentez et annotez ses textes en vous inscrivant à l'Atelier des auteurs !
Sur l'Atelier des auteurs, un auteur n'est jamais seul : vous pouvez suivre ses avancées, soutenir ses efforts et l'aider à progresser.

Inscription

En rejoignant l'Atelier des auteurs, vous acceptez nos Conditions Générales d'Utilisation.

Déjà membre de l'Atelier des auteurs ? Connexion

Inscrivez-vous pour profiter pleinement de l'Atelier des auteurs !
0