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Abou Saïf avait réuni ses hommes pour un ultime conseil de guerre. La situation devait se dénouer d’une manière ou d’une autre. Il sentait que la fatigue et la tension de son équipe atteignaient les limites supportables.
Des disputes éclataient entre ses hommes pour un rien.
C’était également vrai pour l’équipage. Plus le temps passait et plus s’éloignait l’espoir d’un dénouement heureux. Certains membres d’équipage n’arrivaient plus à faire leur travail quotidien.
Il avait demandé à chacun de ses hommes de troquer leur treillis pour la tenue bleue à bandes réfléchissantes de l’équipage, et de porter un casque de protection.
« Cette fois c’est la bonne : c’est pour cette nuit. 2 heures du matin. » Sébastien faisait face à ses hommes. Il affichait un visage serein et son ton posé manifestait une grande confiance en lui. A chaque fois que le compte à rebours d’une mission s’enclenchait, il sentait la tension monter au fond de lui. Il s’agissait d’un mélange d’excitation, de sens du devoir et de peur. Malgré cela, il s’efforçait de garder ses traits les plus impassibles afin de ne rien laisser transparaître de son agitation intérieure. La clé d’une mission réussie résidait largement dans la confiance des hommes en leurs chefs. Et il savait que son attitude était primordiale pour atteindre ce premier objectif.
Ses hommes le regardaient en silence, attendant la suite du briefing.
« Pas de changement par rapport à notre exercice de Djibouti. »
Sébastien rappela chacune des étapes de l’intervention et les équipes qui en étaient responsables. Il revint sur les particularités de l’environnement et sur les consignes à respecter.
Les longues heures de répétition et de mise en condition sur le LNG Jacques Cartier n’avaient pas été vaines : il savait que ses hommes avaient intégré le plan du bateau et les phases de l’opération dans les moindres détails.
« Des questions ?» demanda-t-il.
A Paris, l’orage tant attendu avait enfin crevé les lourds nuages en fin de soirée. Les éclairs illuminaient le ciel de la capitale, immédiatement suivis du fracas assourdissant du tonnerre. Des vents violents balayaient les arbres pendant que des pluies tropicales inondaient les chaussées et les stations de métro.
Toute la violence accumulée des derniers jours se libérait d’un coup sur la ville lumière. La chaleur étouffante avait disparu : l’air devenait à nouveau respirable.
Alexandre et Victoria quittaient le commissariat de la Défense. Victoria s’était laissée conduire dans ce bureau de police situé à quelques centaines de mètres de la tour EUROGNL. Il avait l’avantage d’être ouvert 24h sur 24 et les formalités avaient été très rapides.
En sortant de l’édifice devant la pluie battante, Victoria s’était blottie contre Alexandre en murmurant « Merci de m’avoir accompagnée. » Puis elle ajouta « J’ai de la chance de t’avoir rencontré. » Le jeune homme contemplait cette fille qui avait fait irruption dans sa vie au milieu d’une crise majeure. Il dit sur un ton pince-sans-rire : « Fais-moi penser à remercier les terroristes de t’avoir mise sur mon chemin. »
La jeune fille éclata de rire. Puis, imperceptiblement, leurs corps se rapprochèrent dans une étreinte pleine de douceurs et de promesses. « Ce n’était donc pas un rêve » songea Alexandre qui eut voulu que ce baiser ne se termine jamais.
« La nuit va être longue » dit Alexandre. Il savait que l’intervention était programmée dans la nuit et Victoria lui avait proposé de se glisser avec elle à l’Elysée pour suivre les opérations avec les conseillers du président.
« Pas besoin de rejoindre l’Elysée avant minuit. » dit Victoria en se tournant vers Alexandre. « Trouvons-nous un endroit pour manger un morceau avant si ça te va. »
Alexandre acquiesça.

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