Chapitre 30 : Steeve

3 minutes de lecture

Je sors de la douche et scrute mon portable. Aucune nouvelle de Yohan, je lui ai pourtant laissé plusieurs messages sur son répondeur. Je suis terriblement inquiet. J’enroule une serviette autour de ma taille lorsqu’on frappe à la porte. Je me précipite en espérant que ce soit Yohan, mais ce n’est que Tane, le grand et magnifique Tane. Il fronce les sourcils et esquisse un sourire coquin.

— Toi, t’es pressé qu’on se réconcilie sur l’oreiller, lance-t-il de sa voix grave si suave.

Je soupire et l’invite à entrer.

— Désolé, j’ai pas du tout la tête à ça…

Je me retourne et m’apprête à aller m’habiller, mais il m’attrape le bras et m’embrasse passionnément. Mon sang bout à nouveau dans mes veines, je ne peux résister à l’effet qu’il a sur moi. Je me fais violence et le repousse doucement.

— Sérieusement, Tane, j’ai besoin de parler.

Ses yeux me scrutent avec un mélange d’inquiétude et de compassion. Il me sourit.

— D’accord, beau gosse. Va t’habiller, je t’attends dans le salon, dit-il en passant une main sur ma joue.

Sa gentillesse me réchauffe instantanément. J’enfile une tenue confortable et attrape une bouteille de vin rouge et deux verres. Tane la débouche et nous sert.

— Alors ? Dis-moi ce qui ne va pas.

J’avale une gorgée et mon cœur se serre à l’idée de le faire souffrir avec mes histoires, mais je ressens un besoin irrépressible de tout lui avouer.

— Tu te souviens de ce p’tit jeune qu’on a vu au bar avant que je m’enfuie sous la pluie ?

— Ouais, Yohan, c’est ça ?

— Oui… en fait, si j’ai réagi comme ça l’autre soir, c’est parce que…

Je soupire, mon souffle s’accélère, j’ai chaud.

— Parce qu’il me rappelait mon ex… mon premier amour… une ressemblance extrêmement troublante…

Il pose son verre sur la table basse et sa main sur ma cuisse. Il esquisse un sourire compatissant, comme s’il connaissait déjà toute l’histoire. Lorsque son autre main glisse sur ma joue, son contact m’apaise.

— Éric était mon meilleur ami, la seule personne à me connaitre comme j’étais vraiment, à me voir sans me juger pour mon nom de famille ou la réputation de mon père. Mais il voulait vivre la vie à cent à l’heure, toujours dans l’excès. Il consommait souvent de l’alcool et de la drogue et ça me faisait beaucoup de mal, mais je fermais les yeux et souffrais en silence… aveuglé par l’amour…

Tane passe délicatement une main sur mon épaule et m’attire contre lui. Je me retourne et me blottis contre son torse tandis que ses bras m’enlacent. Je suis en sécurité.

— Un soir, on est sortis faire la fête chez un pote à lui. Il a bu jusqu’à plus tenir debout… j’me suis emporté… je l’ai envoyé se faire foutre et j’suis parti… mais il est resté…

Je soupire et réprime un hoquet de sanglot, Tane resserre son étreinte et pose sa tête sur mon épaule.

— Le lendemain, ses parents m’ont appelé en pleurant… la police l’avait retrouvé avec le cou brisé, son scooter encastré dans un mur à la sortie du village…

— Steeve, ce n’est pas de ta faute…

— Je sais, je ne m’en veux plus.

Sa bouche glisse dans mon cou et il y dépose un baiser. Je lève le bras et passe ma main sur sa nuque pour le retenir. Sa douceur et la chaleur de ses caresses me font un bien fou, il est si attentionné.

— Grâce à Yohan, j’ai compris tout ça. Éric était une âme avide de liberté, il se serait consumé dans le carcan de notre société trop fermé, comme un oiseau en cage. Ce n’était qu’une question de temps.

Je sens mes épaules se délester d’un nouveau poids, une sensation de légèreté m’envahit. Malgré ma tristesse, je me sens bien, libéré.

— Mais… j’ai couché avec Yohan, ce matin…

Tane soupire, ses mains se crispent sur les miennes.

— Je l’ai fait parce que… je voyais Éric en lui… et maintenant… il me déteste…

Tane soupire, je peux sentir son malaise, mais il fait son possible pour le contenir.

— Est-ce que… tu l’aimes ?

— Oui… il y a quelque chose chez lui que je n’ai pas envie de perdre. Je ne saurais l’expliquer, mais il m’a sauvé, guéri… et j’ai envie de l’avoir auprès de moi.

Tane prend une grande inspiration, je sens la déception dans son souffle.

— Mais je ne l’aime pas de la même manière que je t’aime, toi !

Il se recule et plonge un regard interrogateur dans le mien.

— Oui, Tane. Je t’aime !

Ses yeux se figent dans les miens tandis qu’ils se remplissent de larmes. Sa bouche s’entrouvre, nos mains tremblent. Je suis si heureux d’avoir enfin pu lui avouer mes sentiments.

— Moi aussi, je t’aime, Steeve…

Annotations

Vous aimez lire Raphaël HARY ?

Commentez et annotez ses textes en vous inscrivant à l'Atelier des auteurs !
Sur l'Atelier des auteurs, un auteur n'est jamais seul : vous pouvez suivre ses avancées, soutenir ses efforts et l'aider à progresser.

Inscription

En rejoignant l'Atelier des auteurs, vous acceptez nos Conditions Générales d'Utilisation.

Déjà membre de l'Atelier des auteurs ? Connexion

Inscrivez-vous pour profiter pleinement de l'Atelier des auteurs !
0