Chapitre 31 : Steeve
Tane pose ses mains sur mes joues et m’attire à lui pour m’embrasser. Un large sourire lui fend le visage et je ne peux que me réjouir de le voir dans cet état, il se lève et m’attire vers lui, je prends dans ses bras.
— Dis-moi que ce n’est pas un rêve !
— Non tu ne rêves pas !
Il saute sur place, se dandine comme un adolescent maladroit sur une musique trop rythmée. Il prend mes mains.
— Je suis tellement heureux que je voudrai hurler !
Il m’embrasse brusquement et se précipite vers la fenêtre.
— Je suis amoureux ! hurle-t-il à s’en détacher les poumons. Je suis l’homme le plus heureux du monde !
Il se retourne et me soulève, m’entraine avec lui dans une valse d’excitation qui me fait éclater de rire. Puis il me repose et m’embrasse encore.
— Mais attends, on fait quoi pour le pauvre Yohan.
Emporté par l’exaltation de nos sentiments réciproques enfin avoués, Yohan m’est sorti de l’esprit.
— Je ne sais pas quoi faire, il ne répond pas à mes appels…
— Tu sais dans quelle université il est, non ? On doit y aller, lui parler de vive voix.
Son intense et soudaine implication me surprend.
— Peut-être… mais s’il refuse de me parler ?
— Mon amour, je suis sûr qu’il comprendra.
Ce « mon amour » résonne dans ma tête et étire un large sourire sur mes lèvres.
— Tu as raison, mon amour.
Il sourit et m’embrasse à nouveau avant de me précipiter vers l’entrée.
—
Lorsque nous arrivons à l’université, je regarde mon portable qui indique vingt heures dix-huit et je tente une fois encore d’appeler Yohan, mais pas de réponse. Une fois devant la porte de sa chambre, je me fige, incapable de frapper.
— Qu’est-ce qu’il y a, Steeve ?
Je repense à Yohan, au regard triste et rageur qu’il m’a lancé avant de partir de chez moi quelques heures plus tôt. Cette étincelle de tristesse qui brillait dans ses yeux larmoyants.
— C’est pas une bonne idée, allons-nous-en…
Je me retourne et m’apprête à m’éloigner, mais Tane me retient fermement.
— Non, c’est hors de question !
Son ton soudain autoritaire et l’étrangeté de sa réaction m’énervent brusquement.
— En quoi est-ce que ça t’intéresse ? Tu ne le connais même pas !
Il s’avance vers moi et fige son regard dans le mien, son majeur pointé sur ma poitrine.
— Non, je ne le connais pas ! Mais s’il a une quelconque importance à tes yeux, alors il en a pour moi !
Son affirmation me bouscule, je me sens extrêmement bête d’avoir réagi ainsi.
— Alors maintenant, tu frappes à cette porte et tu lui avoues ce que tu ressens !
Je me sens soudain gonflé à bloc, motivé par ses mots. Je prends mon courage à deux mains et frappe.
La porte s’ouvre sur Mickaël, les yeux rouges et humides. Il me regarde et je remarque ses poings qui se serrent, mais avant d’avoir le temps de réagir, il me saute dessus et me plaque au sol.
— Fils de pute ! Tout est de ta faute !
Il me frappe, mais ses coups ne sont pratiquement que du brassage d’air. Tane l’attrape par les épaules et le plaque contre le mur.
— Je t’interdis de le frapper ! l’invective Tane.
— C’est de sa faute ! S’il n’avait pas profité de lui, rien ne serait arrivé.
Je me relève et me précipite sur lui.
— De quoi est-ce que tu parles, Mickaël ?
— À cause de toi, Yohan est parti !
Il éclate en sanglots, tant et si bien que Tane le prend dans ses bras. Je me sens horriblement mal.
— Je suis désolé… crois moi, je n’ai rien souhaité de tout ça…
— Alors pourquoi il a fallu que tu lui vrilles le cerveau ? Pourquoi tu me l’as volé ?
J’échange un regard d’incompréhension avec Tane qui semble aussi surpris que moi.
— Écoute, Mickaël, il faut absolument que tu te calmes et que tu m’expliques ce qui se passe.
Tane le relâche et il se laisse glisser au sol, le corps parcouru de soubresauts. Je m’agenouille devant lui et pose une main sur son épaule.
— Mickaël, où est Yohan ?
— Il a dit qu’il retournait chez lui… qu’il voulait plus jamais te revoir… me revoir…
— Merde, ça va être compliqué de savoir par quel moyen il est parti, mon amour, lance Tane.
Mickaël lève la tête, la mine surprise.
— Mais… vous êtes… en couple ?
— Oui, répond Tane en me lançant un regard.
— Mais alors… pourquoi t’as couché avec Yohan, ce matin ?
— C’est une longue histoire… je m’en veux terriblement de lui avoir fait ça… il faut qu’on le retrouve !
Mickaël m’observe un instant, son regard semble chercher la sincérité dans mes yeux. Je me relève puis lui tends la main et l’aide à se lever.
— J’te crois, mais il est peut-être déjà dans un train pour l’Alsace…
J’échange un regard avec Tane.
— Gare de l’Est !
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