9-3 Le volcan

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  Sonia marchait aux côtés de Laura. L’ombre imposante du volcan les dominait plus que jamais à travers les frondaisons des arbres. Devant eux, Clay, le ranger, les guidait en suivant un sentier que lui seul voyait. Lorsque, plus tôt, Henry lui avait demandé de les emmener visiter le cœur du volcan, l’homme s’était enthousiasmé. « Je suis heureux de voir que j’ai affaire à de vrais aventuriers ! Et sachez que dans tout l’archipel, je suis le seul à offrir cette activité à ses clients ! »

  L’aventure exclusive n’en était pas moins lente à se dessiner. Le parcours pour arriver au pied du volcan était long et sans grand attrait. Certes, la jungle était belle, regorgeait de fleurs aux couleurs et formes extravagantes, d’arbres entortillés et de plantes de toutes tailles qui baignaient dans une ambiance moite au parfum de brume saturée d'humidité, sans oublier les bourdonnements d’insectes, les bruissements de feuilles, les craquements de branches et les cris d’oiseaux, proches, lointains, qui emplissaient les oreilles ; la marche n’en était pas moins ennuyeuse au bout de dix minutes.

  Heureusement, ou malheureusement, le ranger était là pour rompre la monotonie. L’homme était une vraie pipelette, intarissable sur son île. « L’île de Palo Alto, expliqua-t-il, est coupée en deux d’est en ouest par le volcan et ses contreforts que les coulées de laves successives ont surélevés. Cette séparation a permis une évolution différente de la faune et de la flore entre le nord et le sud. En effet, les nuages bas sont bloqués en continu au nord de l’île créant un climat beaucoup plus humide et une végétation plus luxuriante. C’est la raison pour laquelle les dinosaures de Palo Alto s'y concentrent. D’ailleurs, les lézards ne sont pas endémiques de l’île. Ce sont les hommes qui les ont introduits. Le plus grand prédateur du sud de l’île est le jaguar moucheté de Palo Alto, une variété de félin qu’on ne trouve qu’ici. Une espèce très belle et farouche, difficile à rencontrer. Si cela vous intéresse, je propose un bivouac d’une nuit au cœur de la forêt pour partir sur les traces du grand félin »

Une nuit entière…, pensa-t-elle. Elle qui s’ennuyait à mort au bout d’un quart d’heure de promenade, il lui était difficile de s’imaginer pire activité. « Si vous avez la chance de visiter d’autres iles de l’archipel, vous constaterez aussi que la faune et la flore varient beaucoup d’une terre à l’autre, le volcan officie comme une sorte de catalyseur de biodiversité. Vous aurez noté que la végétation se densifie au fur et à mesure que l’on s’enfonce dans la jungle. Au nord de l’île, les arbres peuvent atteindre jusqu’à quarante mètres de hauts. Au sud, ils dépassent rarement les vingt-cinq mètres. Les plus belles plages sont au sud et à l’est tandis que l’ouest est bordé de mangroves abritant un habitat très riche. Le nord est plus découpé. On recense quarante-deux espèces d’arbres sur l’ile à ce jour et des centaines de variétés de plantes et fleurs… » Tandis que l’homme donnait des détails sur les arbres fruitiers, Sandra partagea tout haut ce que beaucoup devaient penser tout bas : « Il est soulant ce type… »

« L’île fait 526 km² et le volcan culmine à 837 mètres aujourd’hui. Sa dernière éruption remonte à un mois, ce qui est en général la fréquence moyenne de ses sautes d’humeur. Mais entre nous il s’agit davantage de l’expression d’un vieux grincheux que de vraies crises de colère ! Le dernier cataclysme d’envergure a eu lieu il y a des centaines d’années. Son nom actuel est « El Palo Alto », mais son nom d’origine retrouvé dans les ruines est « Palt’atkol ». Vous noterez la similitude dans les noms… Les habitants de l’île ont disparu depuis longtemps, mais il reste encore de nombreuses traces de leur passage, disséminées un peu partout dans la jungle. D’après les textes et gravures, le volcan était considéré comme une sorte de dieu ou de gardien des dieux. En tout cas, une entité vivante. Les peuples de Palo Alto rendaient aussi un culte à la Lune et au Soleil. » Sonia avait encore du mal avec la notion de temps et d’histoire dans Autremonde et une référence à une pseudo antiquité avait de quoi faire sourire. Maintenant, c’était le genre de considération qui devait plaire aux réalistes.

« Nous sommes arrivés » annonça leur guide. Sonia scruta les alentours. Il n’y avait que de la forêt. Ils n’avaient même pas entamé l’ascension des pentes du volcan.

« C’est ici ? s’étonna Henry.

— Oui, répondit l’homme. Juste derrière ces arbres. »

  Quelques mètres plus loin, ils découvrirent, cachée derrière les couches basses de la végétation, une sorte de fosse naturelle ; des blocs de roches épais affleurant à la surface de l’ile offraient des lèvres à un trou béant. La dépression se présentait comme un puit vertical de quelques mètres de profondeur, qui suivait ensuite une pente douce s’enfonçant dans les entrailles de la terre. La végétation s’engouffrait en partie dans l’espace, des lianes s’immisçaient de tous les côtés, mais très vite, l’obscurité bloquait la progression des végétaux.

« Bienvenue dans le labyrinthe de Palo Alto, s’exclama Clay. A partir d’ici, je vous conseille de ne pas me perdre de vue !

— Labyrinthe ? répéta quelqu’un.

— C’est comme cela que je l’ai baptisé. Il s’agit d’un immense réseau de galeries souterraines dont seule une partie a été explorée. Venez, vous ne serez pas déçus de la balade. »

L’homme agrippa une liane et descendit dans la fosse, suivi des membres du groupe. Les lampes-torches s’allumèrent et ils pénétrèrent dans le boyau de ténèbres.

« On a une idée exacte de la taille du réseau ? demanda Joe.

— Non, mais il couvre différentes strates de l’île. Et curieusement, il se concentre presque exclusivement sur cette partie-ci du volcan. Pour ce que nous en savons… »

L’expédition devait les mener jusqu’au cœur du volcan, à la cheminée magmatique. Bien sûr, Sonia et les autres recherchaient autre chose et savoir les parcours innombrables au sein de la montagne n’était pas une bonne nouvelle.

« Que se passe-t-il si un de nous se perd ? demanda Laura comme si elle avait lu dans la tête de Sonia.

— C’est simple, il faut marcher jusqu’à trouver la sortie. Le dernier à qui c’est arrivé a mis deux jours pour ressortir. Heureusement que les lampes torches durent longtemps ! »

Sonia fut atterrée. Elle n’avait pas de lampe torche ! Si pour une raison, Xena se retrouvait isolée du groupe, elle risquait d’errer dans l’obscurité !

« Ça vous est arrivé souvent de perdre des gens ? demanda-t-elle.

— Moi, je ne perds jamais personne, vous savez. Ce sont les gens qui se perdent. Je connais tous les pièges du parcours, mais il y a toujours des curieux qui veulent tenter le diable. Les gens sont toujours plus téméraires dans Autremonde. »

« Souvent à tort. »

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