12-2 Au clair de lune

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  Sur le chemin de retour, Henry annonça qu’ils attendraient le lendemain pour tenter d’activer le second prisme. La pierre n’avait pas réagi à la lune, il fallait sans doute le soleil, même si l’exposer à la lumière du jour ne suffisait pas. Tous se rappelaient que le prisme avait brillé légèrement lorsqu'ils l’avaient sorti de la boîte, la première fois, mais rien n’était apparu, si ce n’est l’énorme monstre qui avait failli gober Henry. Joe supposait qu’il fallait activer la pierre et que le temple du tumulus renfermait la solution.

  Sur le pont du bateau, Henry gratifia ses compagnons d’un petit speech de fin de soirée, en les remerciant tous pour cette journée pleine d’émotions.

« Aujourd’hui, vous pouvez tous remercier Xena. Elle a risqué sa vie pour conserver le prisme qui nous a offert ces larmes de lune et ces merveilleux cadeaux. Demain, si tout va bien, nous activerons le second prisme et nous verrons quelle surprise il nous réserve. »

  Après s’être tous félicités pour cette journée épique, les amis se saluèrent et disparurent un à un. « Xena, ne pars pas tout de suite s’il te plait, dit Henry tout bas. Je voudrais encore te parler ». Lorsqu’ils furent seuls sur le bateau, il lui tendit le prisme de lune. « Tiens, il est à toi ». Au contact de la lumière de la lune, le cristal se mit à briller et le faisceau guide se projeta vers l’île. Dans l’obscurité, Sonia percevait parfaitement la ligne de lumière qui pointait, elle le savait, en direction de la caverne d’où ils revenaient, là-bas dans les contreforts est du volcan. « Tu l’as mérité plus que quiconque, poursuivit-il. Je garderai le prisme de soleil pour moi. Parce que celui-là je l’ai bien mérité aussi ! ». Il rit tout seul. Il devait repenser à ce qu'il avait vu dans la gueule béante du monstre. « Je ne pense pas qu’il serve encore, mais ce sera un bon souvenir, je crois. »

Sonia contempla la pierre précieuse. « C’est gentil » dit-elle avant la prendre. Henry claqua alors dans ses doigts. « Que dirais-tu de trinquer tous les deux à cette journée grandiose ? » Il se tourna vers la table où une bouteille de champagne et deux flûtes étaient apparus à l’instant.

« Pourquoi pas, dit Sonia en riant, je n’ai jamais bu de champagne virtuel.

— Tu vas voir, c’est un millésime. Jamais tu n’as bu un champagne aussi délicat.

— Ah ! Je suis curieuse de comparer ! »

  Sur ce, il déboucha la bouteille. Le bouchon sauta à deux mètres de haut avant de retomber sur le pont dans un bruit sec. Il versa le mousseux dans les deux verres, en laissant déborder la mousse. Il sert comme mon père… pensa-t-elle. Sauf qu’Henry lui le faisait probablement exprès. Il en tendit une à Xena et prit l’autre « Bon, dit-il, évidemment, il faut s’imaginer un peu… » Et l’avatar lui refit ce beau sourire que seul lui savait faire.

Ils trinquèrent et burent le breuvage. Instantanément, le message « +275 Points de bonheur » s’afficha au-dessus d’elle et « +105 Points de bonheur » auréola Henry.

« Délicieux ! dit Sonia en riant.

— Ah, je suis content qu’il te plaise ! C’est un excellent cru, un millésime 250. Un des plus chers.

— Un millésime 250 ? C’est pour ça les…

— Oui, le millésime donne le nombre moyen de points de bonheur que tu gagnes en le buvant ! Après, le résultat dépend de tout un tas de paramètres, comme tu l’auras compris… »

  Sonia éclata de rire. Décidément ils ne savaient pas quoi inventer dans ce monde pour pousser à la consommation. « Et maintenant, dit-il d’un ton enjoué, la tradition veut qu’on lance les verres à la mer » La flûte d’Henry vola dans le ciel et retomba dans les flots. « A ton tour » dit-il. Sonia jeta un coup d’œil à son verre en cristal et eut une petite pincée au cœur pour l’innocent récipient. Elle se demanda s’il allait rester dans le fond de la mer pour toujours ou s’il serait effacé du jeu. Elle le lança au loin et observa la courbe qu’il dessina dans l’air avant de heurter la surface de l’eau et disparaitre.

  Durant les minutes qui suivirent, ils discutèrent d’Autremonde, plaisantèrent sur leurs mésaventures, imaginèrent les pires scénarios qui pourraient encore leur arriver le lendemain. Sonia ne vit pas le temps passer. Henry était un homme à la fois mystérieux - comme tous les habitants d’Autremonde - et terriblement accessible. La bataille contre le dinosaure géant lui avait ravivé ses souvenirs de jeunesse, l’époque où il baroudait dans tous les univers virtuels. Aujourd’hui, il se contentait de sortir avec son groupe de troubadours réalistes. Sans rentrer dans les détails, il laissa sous-entendre qu’il avait fait un long break entre ces deux périodes. « Il faut croire qu’on finit toujours par revenir à ses premières amours » dit-il d’un ton rêveur.

  Il demanda à Sonia ses impressions d’Autremonde et elle lui avoua son étonnement. D’abord perdue et déphasée, elle s’était émerveillée devant la beauté des lieux traversés et s’était prise de sympathie pour ce groupe de gai lurons avec qui elle avait partagé les derniers jours. Elle n’aurait jamais imaginé qu’un monde virtuel puisse se substituer à la réalité. Il fallait le vivre pour le réaliser. Le silence s’installa doucement et Sonia écouta les clapotis des vagues contre la coque du navire.

« J’oubliais, dit Henry. Après avoir lancé les verres dans la mer, il reste encore une autre tradition qu’on doit suivre… ». Il se racla légèrement la gorge.

« C’est celle du premier baiser »

Elle le regarda. Il avait l’air sérieux.

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