Chap 52 : Juste un souffle (Victor)

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Mon ciel s’assombrit, une pluie de larmes s'abat sur mes joues, mon air se raréfie. Combien de temps vient réellement de s'écouler ? Une seconde , une éternité ? Mon dragon est allongé sur cette plage de sable fin, il ne bouge plus, le chagrin m’envahit. Est-ce la fin de notre histoire ? Je ne veux pas croire ce que mes yeux discerne derrière le rideau de mon désespoir tissé par cette scène épouvantable.


Samy venait à ma rencontre, sa voix chaude m’appelait au travers de la brume qui s'élevait de l'océan. Je pouvais sentir son souffle se perdre dans mon cou. J’aurai pu effleurer de ma paume de main le velours de sa barbe naissante. Ses lèvres étaient à portée de mon baiser. Mon bisou papillon, je le conservais pour cet instant de retrouvailles. Mes cils auraient chatouillé le bout de son nez, déclenchant un fou rire incontrôlable.


Tout était parfait dans ma tête, chaque détail de nos retrouvailles un délice sans faille. Ses cheveux en bataille, son regard de canaille, ses bras autour de ma taille, un éventail de sensations pour attiser le feu de paille qui brûle dans mes entrailles. Pourquoi a-t-il fallu que ces canailles le prennent en tenaille ? Dans ma tête, c'est la pagaille. Un démon a tiraillé mon âme. Cette bataille n'est pas la nôtre.


Agenouillé auprès de mon bien aimé, je reprends mes esprits. Avant de partir nous avons suivi la formation aux gestes de premiers secours. Je ne m'attendais pas à les mettre en pratique aussi vite. Samy avait insisté pour que je l’accompagne à la Croix Rouge. Il avait su se montrer persuasif avec un sourire auquel il m'était impossible de résister. Cette journée fut mémorable, ma maladresse était source de franche rigolade. Mon stress s'atténua au fil des mises en pratique sous le regard bienveillant de mon prince charmant.


Samy semble si fragile sur ce banc de grains de sable. Mes doigts pressent la plaie ouverte à la clavicule pour stopper le saignement. Morgan et mes compagnons font fuir les pirates belliqueux bien moins nombreux. Il nous faut nous presser de le transporter à l’abri dans le phare avant le retour des ennemis. Le second d’Anne Bony rebrousse chemin confiant Jules à notre garde. Depuis que nous avons retrouvé Samy, il ne lâche plus sa main.

  • Victor, tu penses que c’est grave ? renifle Jules.
  • Avec des soins, de la patience et de l’amour, il devrait s’en remettre.
  • Alors pourquoi il n'ouvre pas les yeux ?

Que répondre alors que moi-même la même question tourne en boucle dans la tête. Il a perdu une bonne quantité de sang, son corps a dû se mettre en pause pour récupérer. Je vérifie avec attention son cuir chevelu, et ne découvre ni bosse, ni plaie. Mes doigts cherchent son pouls. Les pulsations sont régulières. Les traits de son visage sont détendus. Après l’avoir positionné sur un brancard de fortune et fait un bandage avec le pan de ma chemise, nous nous dirigeons vers le phare où nous attend le gardien. La porte franchie, il ferme les battants, cale un morceau de bois pour condamner l'accès.

  • Nous ne pourrons jamais accéder à l'étage des chambres, constaté-je au vu de l'étroitesse des escaliers.
  • Nous pourrions mettre des cordes autour de lui et le tirer, propose Morgan.
    S’il venait à glisser, ce serait pire, il se briserait en miettes, lancé-je.
  • Pourtant si nous voulons le soigner et nous assurer que les brigands ne tentent pas de rentrer nous n’avons pas le choix, nous interpelle le maître des lieux.
  • Victor, tu penses que le porter sur ton dos pourrait aggraver sa blessure ? m'interroge Jules.

À quel moment, ont-ils pu imaginer que j'étais médecin ? Si je pose un diagnostic, est-ce que pour autant il serait viable ? À leur tête, je réalise qu'ils sont pendus à mes lèvres. Après tout, a-t-on un meilleur choix ? Je me souviendrais toujours de notre première rencontre, un choc au croisement entre deux escaliers. Nous avons foncé tête baissée vers un point quand nous sommes entrés en collision. Coup de foudre assuré. Deux planètes en orbite venaient de fusionner. Pour mon cher et tendre, je soulèverai des montagnes, si la montagne n’est autre que lui alors je me sentirais pousser des ailes.


Mon paquet d'amour sur mon dos, je commence l'ascension. Le premier palier franchi, je reprends mon souffle, m'assure que sa respiration est toujours légère et continue. Jamais plus je n’observerai un phare de la même manière. D'après Morgan, il y a à peine une heure Samy descendait les marches en courant, un papillon sur l'épaule.

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