Chapitre 2

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Le début de mes recherches sur Célia Terrier prend donc place devant une école primaire privée catholique. L’école Sainte Trinité. Ce n'est pas franchement un établissement de renom, huppé et élitiste. Parce qu’on le sait, la majorité des parents qui s’acharnent à placer leurs enfants dans des écoles chrétiennes ne le sont pas eux-mêmes. Ils se plient en quatre pour y scolariser leurs gosses, quitte à devoir se serrer la ceinture parce que ce sont les seules alternatives à l’horreur que serait l’école publique…

Mais bon aujourd’hui, ma bonne étoile ne brille pas parce que ce n’est pas une école primaire qui se dresse devant moi mais une petite chapelle. Dans mes souvenirs, celle-ci se situait derrière l’école. Suffit maintenant d’entrer pour inspecter les lieux. Un immense jardin s'élève devant le bâtiment. C’est un coin assez sympa. Un minuscule havre de paix contrastant fortement avec le bruit des voitures et des moteurs qui grondent sur la chaussée en face. Je suppose que l’école a été rasée pour ne laisser place qu’à la chapelle. En soupirant, je pénètre dans le lieu sacré, espérant tomber sur quelqu’un qui puisse m’éclairer sur l’histoire de ce qui fût mon ancienne école. Quel con ! J’aurais pu au moins vérifier si l’école est toujours ouverte. A vrai dire, cette idée ne m’a jamais traversé l’esprit. Comme toujours, je fonce tête baissée dans le tas.

En franchissant le petit jardin, je croise plusieurs types lambdas au sortir du bâtiment.

Lorsque j'atteins enfin la porte, je jette un coup d’œil timide à l’intérieur où des fidèles sont religieusement assis, en position de prière. C’est une chapelle simple, tout ce qu’il y a de plus normal, au mur blanc immaculé. Et pourtant, à sa vue, mon cœur se serre et s’alourdit, faisant raidir mes sens. Je connais ce lieu par cœur, rien n’a changé. Violement projeté vingt-cinq ans plus tôt, je réalise que je ne suis pas prêt à un tel coup de vieux.

Mes yeux balaient la pièce, à la recherche d’un quelconque regard ou d’une tête familière qui pourrait me guider. Mais rien.

Conscient que je ne trouverai sans doute rien ici, je me redirige vers le perron. J’aurais pu aller chercher l'aumônier qui s’occupe de la chapelle mais la boule d’angoisse et d’appréhension qui se crée dans le fond de mes tripes me rend presque muet, et me crie surtout de quitter illico cet endroit.

En général, cette sensation m’envahit lorsque j’arrive au bout d’une enquête louche et sordide, et que tous les nœuds se dénouent pour proposer une vérité bien pire que ce que je peux imaginer…

Mais là, je suis simplement dans mon ancienne école primaire, enfin ce qu’il en reste. Alors pourquoi une telle détresse émotionnelle se niche-t-elle au creux de mon cœur ?

A fleur de peau, je rejoins précipitamment la voiture dans laquelle je m'engouffre. Les doigts encore trop tremblants, je ne me risque pas à allumer le contact. Ok, respire, Romain. Respire.

D’un mouvement peu rassuré, mes yeux se tournent jusqu’à l'entrée de la chapelle. De l’extérieur, c’est un petit lieu tranquille. Alors pourquoi me provoque-t-il de telles sueurs froides ?

Je récupère mon téléphone. Il faut au moins que je prévienne Victoria que les recherches s'avèrent plus fructueuses que prévu. Avant de venir, je l’ai éteint en quittant la voiture. Alors qu’il s’allume, je le pose sur le siège, quitte le véhicule pour fumer tranquillement, en essayant de retrouver mon calme. Heureusement, les bouffées de nicotine qui se propagent dans mes poumons m’apportent une étrange fraicheur et sérénité, perdues tantôt.

Minute. Pourquoi je fume, moi ? Oui, j’ai un briquet et un paquet de clope dans la poche, mais depuis quand cette habitude s’est-elle installée dans mon quotidien ? Impossible de m’en rappeler…

Adossé à la voiture, derrière la chapelle, peu serein encore, je continue de la fixer, immobile. Je réalise tardivement que je toise une vieille femme à l’arrêt de bus, qui finit par s’indigner de mon regard insistant. Elle s'agite sur le banc avec nervosité et je l’entends brièvement geindre, mais en fait, cela m’amuse plus qu’autre chose. Une fois la cigarette finie, me promettant de ne plus jamais fumer et après avoir récupéré mon portable, j’y entre les codes, et en cliquant sur la messagerie, une notification m’avertit d’un message de Victoria. Etrange. D’habitude, elle recourt au mail pour communiquer avec moi. Peut-être que ce n'est pas en rapport avec le travail ? J’appuie dessus et tombe davantage des nues à la lecture de son message…

Victoria : « Tu aurais dû me dire que Célia Terrier était de ta famille ! »

Complétement abasourdi, je ne parviens pas à réfléchir à une réponse intelligente, quand un nouveau message apparaît :

« Petit malin haha ! »

J'essaye d'activer mon cerveau, me calmer, remettre les mots en ordre pour la démentir et surtout réclamer des explications, jusqu'à ce qu'elle reprenne :

« Ah mais c’est pour ça que tu étais si confiant ! »

« Romain, t’es un sacré numéro, toi ! C’est comme ça que tu comptes m’impressionner ? :D »

« Il m’en faut plus tu le sais ! »

« Alors dis-moi, c’est ta cousine à qui tu as fait croire que tu as vu le père Noël de tes yeux ?? »

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