Chapitre 27
Lila ajusta la sangle de son sac à main tandis qu’Eva consultait une dernière fois la liste des logements disponibles sur son téléphone. Assises dans la cuisine étroite mais lumineuse de l’appartement d’Emily, elles partageaient un silence chargé d’inquiétude.
« Alors ? » demanda Lila en brisant le silence.
Eva soupira. « J’ai repéré deux appartements qui pourraient faire l’affaire. C’est pas grandiose, mais on doit faire vite. »
Lila hocha la tête, le regard à la fois déterminé et inquiet. « La demande d’adoption a été acceptée, mais sans logement, ça va sauter. »
Leurs mains se frôlèrent brièvement sur la table, un geste d’encouragement mutuel.
Plus tard, dans la voiture d’Eva, la route défilait sous la pluie fine du matin. Elles discutaient à voix basse.
« Il faut qu’on ait un logement avant la prochaine visite de la protection de l’enfance. Sinon, c’est foutu. »
« Je sais, » répondit Lila, le regard fixé sur la route. « Je vais faire ce qu’il faut. »
Elles roulèrent jusqu’au premier appartement, situé dans un vieux quartier résidentiel. L’immeuble avait des briques rouges, un charme suranné, mais à l’intérieur, l’espace semblait étriqué.
Le salon et la cuisine donnaient sur le nord, baignés d’une lumière froide et constante. Lila frissonna en s’approchant de la fenêtre.
« Ça va être sombre, ça… » murmura-t-elle.
La chambre, exposée au sud, avait un balcon minuscule, à peine assez large pour une petite plante en pot. La salle de bain était vétuste, avec des carreaux craquelés et une vieille baignoire jaune. Le parquet grinçait sous leurs pas.
« Je crois qu’on peut passer, » souffla Eva, déçue. « Trop petit, trop sombre. »
Le deuxième appartement, en revanche, leur apparut comme une bouffée d’air frais. Situé au troisième étage d’un immeuble moderne, il était inondé de lumière. Le salon, vaste et ouvert, s’ouvrait sur un balcon en longueur, avec vue sur un jardin communal.
La cuisine, équipée d’appareils neufs, avait un plan de travail en quartz blanc et un espace pour une petite table. La chambre principale était claire, avec une grande fenêtre donnant sur les arbres, et la salle de bain moderne possédait une douche à l’italienne.
« C’est bien mieux, » admit Lila en souriant faiblement. « Mais… c’est une grosse décision. »
Elles prirent le temps de faire le tour, touchant les murs, imaginant leur vie entre ces murs.
Sur le chemin du retour, le silence s’installa, lourd de pensées.
« Tu crois qu’on doit se dépêcher ? » demanda Eva, les mains crispées sur le volant.
« Oui. Une semaine, pas plus, sinon on risque de perdre cette chance. »
Elles se souvinrent qu’elles étaient accueillies depuis la veille chez Emily, leur amie fidèle, dans son appartement chaleureux et rassurant. Ce refuge temporaire leur offrait un peu de répit.
Plus tard dans la soirée, après un repas simple partagé avec Emily, Lila prit son téléphone et appela Elina.
« Salut, » lança Lila, la voix douce. « Comment ça va chez vous ? »
Elina répondit, un soupir dans la voix. « Un peu mieux. Luka m’a forcée à rester alitée toute la journée. C’est dur, mais ça aide. »
La conversation s’allongea, passant des banalités aux confidences.
Lila finit par lui avouer : « On a fait les visites des appartements. On a trouvé un qui pourrait convenir… et je voulais te dire aussi qu’on a reçu la réponse pour l’adoption. »
Un silence surpris traversa la ligne. Puis Elina s’exclama, pleine d’enthousiasme : « C’est génial ! Félicitations à vous deux ! Ne réfléchissez pas trop longtemps, prenez le deuxième appartement. Il est parfait. »
Lila sourit, rassurée par la conviction d’Elina. « Oui, tu as raison. Je vais en parler à Eva tout de suite. »
Eva, décidée, rappela l’agent immobilier pour confirmer une nouvelle visite et obtenir les documents nécessaires.
Deux jours plus tard, elles se retrouvèrent chez Emily pour un dîner simple mais chaleureux.
Autour de la table, elles parlaient de Jeanne, de sa situation actuelle en hôpital psychiatrique.
Eva déclara, le ton à la fois soulagé et déterminé : « Tant qu’elle est là-bas, on n’a plus rien à craindre. »
Lila acquiesça, levant son verre.
« À un avenir plus calme. »
Les trois femmes trinquèrent, scellant cet instant de paix fragile, prêtes à affronter ensemble ce qui venait.
Le repas terminé, la pièce baignait désormais dans une lumière douce et chaleureuse. La vaisselle attendait son tour dans l’évier, mais Eva et Lila restaient là, installées sur le canapé, proches, comme si elles voulaient graver ce moment dans le temps.
Eva serra doucement la main de Lila entre les siennes, son regard posé sur elle avec une tendresse infinie. « Tu sais, ça fait déjà un long moment qu’on a déposé cette demande pour un bébé, un petit de moins d’un an et demi... » Sa voix était basse, presque un murmure, comme si parler de ce rêve fragile le rendait plus réel.
Lila sourit, un sourire mêlé d’espoir et de nervosité. « Oui… parfois j’ai peur que ça prenne trop de temps, mais j’essaie de ne pas y penser trop fort. » Elle laissa son regard glisser vers celui d’Eva, dans lequel elle lisait tout son amour et sa confiance.
Eva approcha sa main libre pour caresser doucement la joue de Lila, faisant courir ses doigts sur sa peau douce. « Tu seras une mère parfaite, Lila. Tu as tout ce qu’il faut… de la patience, de la douceur, et cette force tranquille qui apaise tout autour de toi. »
Lila sentit son cœur se serrer d’émotion. Sans réfléchir, elle pencha la tête vers Eva et posa un baiser tendre sur sa joue, ses lèvres effleurant délicatement la peau chaude. Le contact fut doux, mais chargé d’une promesse silencieuse.
Leurs yeux se croisèrent alors, un long échange silencieux où le monde extérieur s’effaçait peu à peu. Dans ce regard, il y avait tout : la confiance, le désir, la peur mêlée à l’excitation. Leurs corps s’attirèrent naturellement, un frisson parcourant leur peau.
Eva enlaça Lila avec délicatesse, leurs mains explorant doucement, leurs souffles s’accordant dans une harmonie discrète mais puissante. Ce fut un moment suspendu, où l’espoir d’un futur à trois se dessinait entre elles, fragile mais lumineux.
Leurs cœurs battaient à l’unisson, portés par la promesse d’un avenir où elles pourraient enfin accueillir ce petit être tant attendu. Dans cette étreinte, elles trouvèrent une force nouvelle, prête à affronter ensemble les incertitudes qui les attendaient.
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