Le Soir des revenants

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  Une fois que pompiers, médecins, patient et ambulance furent loins, tout le monde s'installa tranquillement dans le salon. Mazarine ouvrit un livre qui appartenait à sa meilleure amie, pendant que celle-ci écrivait un message pour ses parents. Paul alla se servir une nouvelle tasse de jus de tomate, et Hubert reprit sa position préférée, assit sur une chaise avec les pieds sur la table. Charles, quant à lui, se laissa lourdement tomber sur le canapé.

Là, il gémit :

  - J'en peux plus... Faire un goûter chez une vieille dame, c'est plus fatiguant qu'une journée entière passée à donner des cours de grec et de latin...

  - Même avec Me Mordaume ? demanda malicieusement la danseuse, en relevant la tête de son téléphone.

  Le professeur ne jugea même pas utile de répondre. Il se leva pour contempler le collier de Brunhild. Celui-ci était posé sur la table. Son petit frère demanda :

  - Elles ont dit quoi, déjà, les souris ? Qu'il fallait bassiner cette horreur une nuit de pleine lune ? C'est tout ? C'est vraiment pas beaucoup.

  - Oui, convint Mazarine. Mais, à mon avis, nos ennuis ne sont pas terminés : Hild va sûrement faire tout ce qu'elle peut pour récupérer son collier.

  - Génial ! s'écria Paul en battant des mains, comme un petit enfant. L'aventure continue !

  Le professeur de langues et cultures de l'Antiquité lui décocha un regard noir. Il grommela, grincheux :

  - Tu es sérieux, Paul, ou tu te moques de moi ? Je ne qualifierais pas de "génial" le fait que notre voisine, qui est complètement allumée, veuille récupérer le collier. Surtout qu'en plus, il est chez nous. Mais je suis d'accord avec Mazarine, on devrait prendre des précautions, autour de ce que les rats et non pas les souris - n'est-ce pas, Hubert ? appellent un collier.

  - Tu crois qu'elle peut faire quoi, cette vieille bique ? demanda Hubert, guère impressionné.

  - Mais plein de chose, il faut pas prendre cela à la légère ! hurla son grand-frère. C'est important, pour elle, ce n'est pas seulement ses pouvoirs qui seront en jeu, mais sa vie ! Quand je pense que la pleine lune, c'est... Attendez, en fait, c'est quand la pleine lune ?

  - C'est ce soir, répondit Mazarine en consultant son téléphone. J'y pense, on est aussi le 31 octobre ! Il va y avoir de l'ambiance, cette nuit, si Mlle Wotan décide de venir nous rendre visite !

  - J'ai une idée ! s'écria Virginie. Et si on faisait la fête, cette nuit ?

  - Mais, Virginie... s'ébahit Charles. Tu rêves ? Ou tu es sûre de ce que tu fais ? La priorité, là, c'est de surveiller le collier et de lui faire le traitement approprié, pas de faire la fête ! D'ailleurs, on devrait instaurer des tours de garde, et...

  - Mais, Charles ! argumenta Hubert. On peut quand même surveiller un malheureux collier, et en profiter pour faire la fête, non ? Parce que, comme ça, si on passe une nuit blanche, on ne risque pas d'être surpris ! Non ? Tu en penses quoi ?

  - Ben, que... Heu...

  - Super ! s'exclama Paul.

- Attendez ! les supplia Charles. Vous voulez faire quoi, en fait, pour votre Halloween ?

- Ne t'inquiètes pas. Je comptais simplement proposer de regarder des films, ou des trucs du genre, tu vois...

- Ah, d'accord, se rassura Charles. Bon, bah je pense que ça devrait aller... Mais il faut préparer à manger. Et aussi, je serais plus rassuré si on fermait la maison de partout...

- A vos ordres, capitaine ! s'écria Virginie, débordante d'enthousiasme.

L'enseignant de latin et de grec maugréa qu'il aimerait bien qu'on lui obéisse un peu plus souvent. Puis ils s'activèrent tous, et s'empressèrent de faire comme il avait dit. Lui et son frère se mirent aux fourneaux, pendant que les trois autres calfeutraient la villa autant que possible.

Une heure plus tard, ils étaient tous assits devant une part de tourte fumante, et en train de débattre. Paul réclama soudain le silence. Il clama :

- J'aimerais qu'on récapitule. Il faut faire le point. On a prit le collier de Brunhild Wotan. On l'a mis à tremper pour la nuit. S'il passe une nuit de pleine lune dans de l'eau, hasta la vista, Hild !

  - Ouais, répondit son meilleur ami. Et on a de bonnes raisons de croire que, cette nuit, la vieille folle va tout faire pour récupérer son collier.

  - J'me disais, aussi, ronchonna l'helléniste, que c'était trop beau pour être vrai, qu'on passe une nuit tranquille. Depuis que tu as rencontré cette vieille dame, Zaza, y'a tout qui part en cacahuète. La prochaine fois, fais gaffe quand tu rencontres une nouvelle personne ! C'est vrai, après, c'est nous qui en faisons les frais. Et on part dans plein d'aventures délirantes, qui...

- Et alors ? l'interrompit Virginie. Tu ne vas pas regretter, non plus ! Moi, j'adore tout ce qui nous arrive ! C'est tellement passionnant ! J'ai toujours rêvé de vivre des aventures, et regardez ce qui nous arrive ! Bon, je reconnais que j'aurais aimé participer plus souvent à des filatures, mais c'est mieux que rien.

- Sinon, pour se défendre, demanda Mazarine, inquiète. Vous croyez qu'il faudra qu'on reste tout le temps, au moins avec une autre personne ? Qu'on ait tout le temps une arme à portée de main ?

- Boarf, fit négligemment sa meilleure amie. On a déjà tout fermé. Ce sera amplement suffisant !

  - Sauf la lucarne du grenier, rectifia son grand-frère. Mais en même temps, elle ferme mal, elle a un problème.

  Charles sauta sur ses pieds :

  - Vous pouviez pas le dire avant ? J'ai comme l'impression qu'on va avoir des problèmes de ce côté là...

- T'en fais pas, Charles, le calma Virginie en faisant un geste apaisant de la main. Je te jure qu'on ne risque absolument rien par là. C'est impossible de grimper là, ou même de descendre par la lucarne jusqu'au sol. Même avec une corde, une échelle, ou tout ce que tu veux.

- Qu'est-ce que t'en sais ? demanda le professeur de langues mortes, en haussant les épaules.

- Eh bien, on a déjà essayé !

Hubert la regarda d'un air incrédule, avant d'éclater de rire. Il demanda :

- Mais pourquoi vous avez déjà essayé de faire des acrobaties sur votre maison, non d'une pipe ! Ne me dites pas que vous avez eu la bonne idée d'escalader votre toit !

- Eh bien, si ! s'exclama la danseuse. Une fois, Paul et papa ont voulu vérifier la toiture. Ils ont donc pris leur drone. Le truc, c'est qu'il y a eu une panne au milieu du toit. Le drone est tombé dessus, et pour le récupérer, ils ont essayé de grimper sur le toit en passant par la lucarne.

- Et alors ? demanda Mazarine, intriguée.

- J'ai vraiment cru qu'on allait devoir appeler les pompiers pour décoincer Paul et papa. Ils n'arrivaient plus à partir de leur coin.

Paul fusilla sa petite soeur du regard, car il aurait aimé passer ce moment sous silence. Mais Hubert riait à en perdre haleine :

- Dites-donc, c'est pas malin, ce que vous faites !

- C'est bon, grogna son meilleur ami. Ce qu'on fait, là, c'est pas pire.

Charles soupira, cherchant un moyen de détendre l'atmosphère. Il tenta de changer de sujet, en déclarant :

- Bon, bah ça ira du côté de la lucarne, je pense...

- De toutes façons, le rassura gentiment Mazarine, on a mis une commode devant la porte. On ne risque rien par là.

- Quelle soirée, soupira le professeur particulier.

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