Chapitre 1

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Je m’appelle Bianca et j’ai trompé mon mari. Je sais ce que certains vont se dire : « comme beaucoup… », « encore une femme insatisfaite », « encore une salope » et j’en passe. Laissez-moi au moins le temps de raconter mon histoire avant de m’insulter… Et le temps de me justifier bien entendu. Je tiens à préciser que je ne cautionne absolument pas le fait de tromper quelqu’un, et que je trouve que rien ne le justifie dans les faits… Mais la réalité est toute autre.

Dimanche, je suis déprimée, triste, lasse. En bref, je vais sûrement avoir mes règles prochainement. Mais au-delà de ça, ma vie me tend. Je suis mariée depuis un an, avec mon mari depuis 15 ans. Notre relation a connu des hauts et des bas, et je l’ai toujours portée à bout de bras. J’ai toujours fait en sorte que notre tête sorte de l’eau, pendant que lui continuait à nous mettre des bâtons dans les roues avec la bonne humeur la plus désarmante du monde. Mon mari, c’est un homme merveilleux. Il est gentil, il est câlin, il est drôle, il est attachant, intelligent, investi… Mais pas avec moi. Avec moi, il est de mauvaise humeur, il agit comme un adolescent qui vit chez sa mère, il ne fait attention qu’à peu de choses, et dès qu’il fait enfin quelque chose pour moi, je dois le couvrir d’or. Vous allez me dire « oui, comme tous les hommes ». Je ne me lancerai pas dans ce débat, mais en a-t-on pas marre que justement beaucoup d’hommes ressemble à ça et que nous les femmes on devrait s’en contenter ?

Revenant à notre dimanche. Moi, je me sens seule, nulle. Je passe un concours dans deux semaines et je suis dans l’incapacité complète de réviser. Je fais comme toute bonne personne qui n’a absolument pas confiance en elle : je me flagelle « t’y arriveras jamais, t’es qu’une merde, il te restait un jour entier pour réviser et tu n’as rien fait, si tu l’as pas tu sauras pourquoi ». Or, vous tous qui avez déjà passer des concours, vous pensez vraiment qu’un jour de révision sur 8 mois c’est ce qui fait la différence ? Non, on est bien d’accord.

Je suis donc dans cet état d’esprit très guilleret, et je vais dans la chambre, m’affaler sur le lit, pleine de découragement. Entre le deuxième protagoniste, mon homme. Mon homme qui joue à un jeu sur son ordinateur, approximativement à 1 mètre du lit. Je m’affale, il me dit « oh, qu’est-ce que tu viens faire là mon amour ? ». Je ne réponds pas, ne sachant pas quoi répondre. Je n’ai pas besoin de mot, j’ai besoin d’une présence, qu’on s’occupe de moi. Et comme toute bonne femme qui se respecte, je ne le verbalise pas, et j’attends que ça descende du Saint Esprit dans le cerveau de mon mari. Vous savez très bien où je veux en venir. Je suis restée allongée là pendant 30 minutes, sans qu’il ne me rejoigne. Je suis restée allongée là, à pleurer pendant 5 minutes en silence, sans qu’il ne le remarque. Et puis je suis partie. Il m’a dit « t’as fini de te reposer ? » avec la voix tendre, et mon cœur s’est brisé. Ce con n’avait pas la moindre idée d’avoir mal agit, il préfère penser que je suis venue me reposer, plutôt que chercher l’attention qu’il n’a pas voulu me donner, le jeu étant une meilleure alternative.

Ne vous méprenez pas, je ne prends pas cet exemple pour justifier ce que j’ai fait. Parce que si vous n’avez pas encore compris, je suis amoureuse de mon crétin de mari, et je le plains d’être avec moi. Parce que moi voyez-vous, je suis une femme parfaite. Alors personne n’est parfait, je sais, mais moi, je mets la barre très haut. J’ai sans cesse de petites attentions pour lui, je m’occupe des recettes pour la semaine, des courses (il en fait quelques-unes, qui suffisent à nous ruiner financièrement mais rendons à césar ce qui lui appartient), de la cuisine, du rangement, du nettoyage de la maison, des chiens (lui aussi mais moins appliqué, l’histoire des chiens est une grande histoire), du linge, lavage, étendage, repassage, et j’ai la charge mentale fois mille. Quoi ?! Encore une femme qui se plains de charge mentale ?! Oui. Et si vous n’êtes pas content, à quoi vous vous attendiez en achetant mon livre ? A un livre de cul ? Pas de cul sans charge mental, c’est le principe.

Donc, je disais, je suis une femme parfaite. Je m’occupe de mon mari que ce soit sur le plan émotionnel, sur le plan sexuel, sur le plan affectif, sur le plan de travail, bref, je m’occupe de mon mari. Et j’essaie constamment de m’améliorer, car mon anxiété me donne cette sensation de n’être jamais à la hauteur. Seulement voilà, un beau jour je me suis réveillée, et je me suis rendue compte que j’étais largement à la hauteur. Que j’étais même bien plus qu’à la hauteur. Et que moi qui essayait de combler mon mari de tout ce qu’il pouvait rêver, lui ne me comblait que de peu de choses. J’ai pris conscience, d’un coup d’un seul, que je m’ennuyais et que je n’étais pas satisfaite. Mais je suis amoureuse, alors que faire ?

Communiquer me direz-vous. Et vous avez raison ! Je vois souvent ce genre de commentaire sous les postes Instagram sur la tromperie « je ne comprendrais jamais comment on peut faire du mal à une personne comme ça… Quand on est pas bien, on en parle ou alors on se quitte, mais la tromperie ? Jamais ! » Si seulement c’était si simple. Et je pense que dans la tête de beaucoup de gens c’est aussi simple. Je les envie, sauf que moi, bien qu’ayant toujours adoré la simplicité, je n’ai jamais fait de choses simples. Rien que mon parcours universitaire : Médecine, psycho, maths, droit, français appliqué, concours. Pour une femme qui avait 12 de moyenne au lycée, c’est quelque chose !

J’ai donc communiqué, beaucoup, beaucoup, beaucoup… Et non, je n’ai pas eu un mur en face de moi, j’ai eu un… Un mari. Qui était là, près à faire des efforts sans trop me prendre au sérieux. Qui faisait des efforts pendant 4, 5 voir 6 jours. Puis tout recommençait. Donc je recommençais à encaisser, jusqu’à une nouvelle séance de communication. Après, je me suis dit que c’était encore moi le problème, car je laissais la situation s’installer avant de communiquer. C’est ce que vous vous disiez aussi ? Bah oui, toujours plus simple d’accuser les femmes qui essayent de sauver leur couple que le benêt qui vit sa best life sans prendre soin de son partenaire. Et toc, dans votre tête ! J’ai fait comme je fais toujours : je me suis remise en question, et j’ai communiqué plus tôt. A chaque petit détail insignifiant de la vie, je lui disais « tu vois là, tu aurais pu faire comme ça et ça m’aurait vraiment fait plaisir. Ce sont des petites choses qui font que le quotidien est plus facile et agréable pour moi. » et la réponse, celle qu’on adore « Roh ça va, c’est pas la fin du monde non plus ».

Mon mari, c’est le champion pour prendre les choses à la légère. Il fait ça sans aucun manque de respect, attention, je vous vois, vous, les diabolisateurs. Je ne mentais pas quand je vous disais que mon mari est plein de qualités et malgré tout, il continue de me faire rire aux éclats. Et le fait de prendre les choses à la légère, c’est incroyablement utile quand vous êtes très pénible et qu’il s’en fiche, en 2 minutes il a oublié et il passe à autre chose. J’ai besoin d’un homme comme ça, car si je sens qu’on m’en veut, je serais capable de me foutre en l’air. A peine dans l’exagération.

J’ai essayé de communiquer. Mais rien n’y a fait. Et au bout d’un moment, je n’avais même plus envie qu’il s’améliore car c’était trop tard. Ca faisait des mois que j’emmerdais mes amies par message sur le fait que mon mari ne fait pas les choses bien pour que d’un coup il fasse les choses bien ? Non non, ça ne se passera pas comme ça. Et de toute façon, il ne s’est pas amélioré. Tout simplement parce qu’il ne sait pas comment faire. Il ne sait pas et il n’y pense pas. Il pense que me faire cuir (trop en plus mais restons pas trop chiante pour une fois) des pains au chocolat le matin annule tout ce qu’il ne fait pas. L’attention est choupinette, on est d’accord mais est-ce que ça suffit ? Non, c’est un bon commencement. Et bien pour lui, c’est tout. Tout. Que voulez-vous que je fasse moi au milieu de tout ça ? Après l’avoir éduqué pour être un copain à peu près qualitatif pendant 13 ans, il faudrait encore que je l’éduque pour devenir un bon mari ? Non mais ça suffit au bout d’un moment, j’ai envie de faire d’autres choses de ma vie.

Mais je vais vous raconter comment tout a commencé. Parce que non, ce dimanche de déprime n’était que le milieu de l’histoire.

J’ai arrêté ma contraception 1 mois après le mariage. « Trop mignon, pour faire le bébé ? » absolument pas, parce que j’en pouvais plus des hormones, de me sentir grosse, moche et grosse. Sachant que je fais 1m 69 et 64 kilos, on est loin du gros quand même. Et là, ma vie a pris une tournure que je ne pensais pas prendre : ma libido, elle qui était en voie de disparition depuis approximativement 6 ans, avait décidé de revenir, plus impressionnante que jamais. Je suis passée du « bon chéri, on fait l’amour ce soir ? Ca fait 6 jours et si on le fait pas ce soir, tu vas me prendre la tête donc hop, on y va » à « mais chéri, je sais qu’on l’a déjà fait deux fois aujourd’hui, mais hier on a fait 4 donc tu vois, on est dans le bon cota, on s’y remet ? » Vous voyez le genre.

Lui, il était d’abord ravi puis un peu affolé. Je l’épuisais avec mes envies incessantes et surtout, je le couvrais de messages et de vidéos Instagram pour lui montrer des actions incroyablement sensuelles, élaborées de toute pièce. Il a été vite dépassé pour la bonne et simple raison que : il s’en fou. Voilà, vous commencez à cerner le personnage, je lui ai dit que j’aimais les hommes viriles, qui vous poussent contre un mur, vous saisissent les mains puis le menton pour vous forcer à vous regarder, qui vous embrassent avec une superbe passion, et qui glissent la main du menton lentement le long de votre corps pour atteindre votre humidité très très humide… Et lui il a retenu « elle aime quand je lui prends la gorge ». Donc il le fait, hein, de temps en temps, en pensant que ça suffit. Et le problème est là, il ne cherche jamais à être parfait, à s’améliorer, à être mieux, il chercher un « ça passe ».

Donc je suis là, à gérer tous les mois mon ovulation qui me met dans un état de chaleur que je n’ai jamais connu. Et là, pour la première fois de ma vie entière, pour la première fois en 13 ans, je réfléchis à l’idée de tromper mon mari. Non pas en me disant « tiens, faudrait que je fasse ça » mais en m’imaginant et me créant des scénarios en tête. Vous me direz « qui n’a jamais fait ça » et bien moi. Moi mes scénarios pour que je sois avec un autre homme commençaient toujours par le fait que mon mari me quitte pour une autre et que du coup je me libérais en couchant avec un autre homme. Jamais je n’avais pensé à le tromper, car jamais de la vie je n’aurai pu le faire souffrir. Je ne peux toujours pas le faire souffrir, je vous vois arriver là, calmez-vous.

Et entre temps, je commence un nouveau travail. Arrêtez de spoiler la suite, moi aussi je sais comment ça va finir, je l’ai vécu. J’ai des collègues, dont un en particulier. Un qui me met particulièrement mal à l’aise. « Oooouuuuh » non ! Pas du tout attirée par lui, ou du moins je ne m’en rends pas compte. Je me dis juste qu’il est pas mal, certes, mais qu’il a un regard impossible à soutenir pour moi. Il a une confiance en lui débordante, comme mon mari au final. Il est grand, plutôt bien foutu pour le peu que je vois. Il est drôle mais pas autant que mon mari. Il me cherche, on joue, on se taquine, enfin plus lui que moi, car moi je suis dans l’incapacité de réagir face à lui. Je me retrouve comme une petite fille timide qui ne sait plus quoi faire. Je me sens rougir dès qu’il me regarde alors que je ne rougis jamais, je me sens inutile, silencieuse, pas intéressante. Parce que j’ai envie de l’intéresser, j’ai envie de lui parler, de passer du temps avec lui. Pourquoi ? Très sincèrement, aucune idée. Aujourd’hui je peux dire avec le recul qu’il dégageait un truc. Un truc virile.

Et la merde commence ? Ouais, vous avez tout juste. Je commence à fantasmer qu’il me coince dans un couloir et m’embrasse. Qu’on mette en place un pari pour se taquiner qui finira en scène X. Je suis gênée de penser ça, car cet homme est marié, 3 ans plus jeune que moi. Il vient d’un monde complètement différent, n’a pas la même religion que moi, pas la même façon de manger (la bouffe est incroyablement importante pour moi, vous le comprendrez vite), pas la même attitude. Il marche en pissant sur le monde, il s’en fou de tout, n’en fait qu’à sa tête. Vous voulez savoir le plus drôle ? C’était pareil pour mon mari quand je l’ai rencontré. Alors il ne pissait pas sur le monde, mais il n’en fait qu’à sa tête. Comme quoi, dès que j’ai un peu de fragilité, je me porte toujours vers le même type de personne hein, le type qui va pas du tout bien me traiter, et que je vais kiffer quand même. Ca me fatigue.

Bref, les vacances de Noël passent, et je me force à arrêter de penser à lui. Je deviens folle, pourquoi est-ce qu’il hante mon esprit ? On a rit 3 fois ensemble, lui il doit être chez lui à tout oublier du travail et de moi. Et la rentrée vient. Le jeu reprend, les taquineries aussi… Et puis je remarque des petites choses. Il joue plus avec moi qu’avec les autres collègues. Il me provoque plus moi que les autres. Il m’a déjà envoyé un message un soir pour m’emmerder. Alors, je saute le pas, sans trop savoir ce que je fais. Un après-midi que je finis plus tôt pendant que lui il bosse, je lui envoie une photo de mon compte Netflix. Pour faire style je regarde une série, vous avez compris ? Alors que je suis en train de réviser mon concours. Déjà la femme s’invente une vie, ça commence bien. Il me répond direct en rigolant et en me disant que j’ai l’air bien là. Je lui réponds que j’ai connu pire ouais. Il me demande ce que je regarde, j’invente, trop peur de passer pour la gamine que je suis avec Gossip Girl et les Frères Scott. Et là, il me dit « ah ouais, et t’invite pas ? » Alors je vous épargne les fautes d’orthographe car visiblement malgré mes hautes études, je n’arriverai jamais à parler avec des hommes qui ne sont pas capables d’écrire correctement le français.

Et je lui réponds que si, je pourrais l’inviter à regarder des films. Et il me dit de façon très subtile « mais ça va gêner ton mec non ? » Comment demander si la femme est en couple. Je lui répond « oui, c’est vrai que ce serait bizarre qu’il soit là pendant qu’on regarde un film ». Vous allez vite le comprendre, l’humour est ma porte de sortie, et je l’utilise aussi avec lui. En bref, on parle toute l’après-midi et la conversation dérape à une allure hallucinante. Le mec, une fois qu’il a compris que je pouvais être ok pour faire des trucs avec lui, il y est pas allé de mains mortes. Dick pick à gogo, et détail de ce qu’il avait envie de me faire. Interrogatoire aussi sur tout ce qui me plaisait chez lui, puis lui chez moi. Et là je me rends compte que je ne suis pas folle, je n’ai pas imaginé les choses depuis le début. Lui aussi il a ressentie cette connexion sexuelle qui s’est mis entre nous. Mais le plus grave là-dedans, c’est que je savais très bien où nous mènerait cette conversation et que je n’ai rien fait pour l’arrêter. Je suis une fille intelligente et pas très naïve. Et j’ai foncé en plein dans l’adultère, comme si c’était une évidence.

Pour la première fois en plusieurs années, je me suis sentie revivre, je me suis sentie heureuse, épanouie, vivante. C’était incroyable comme sensation. Je plaisais à un homme. Et il me plaisait aussi certes, mais je plaisais à un homme. Cet homme m’avait regardé, m’avait décortiqué, avait fait attention à moi. Pendant ce temps-là, j’avais eu 3 compliments en 2 mois de mon mari, dont un qui devait être « sympa la tenue, c’est nouveau ? » alors que j’avais pas acheté de vêtements depuis 3 ans à cause d’un manque d’argent pendant que lui il sortait 3 fois par semaine au bar. Là, lui, il m’avait remarqué. Il avait vu mes fesses, mes jambes, les avait aimé, il m’avait dit et fait ressentir à quel point j’étais sexy. Oui parce que je fais parti de ces femmes sexy. Je ne suis pas incroyablement belle, ni hyper bien foutue de mon point vue car je n’ai pas de poitrine, mais j’ai du charme et je suis sexy. Et je l’avais oublié, j’avais oublié que je pouvais être attirante, jolie et sexy. J’avais oublié ce qui faisait de moi cette personne pleine de peps que j’étais avant. J’avais oublié ce que c’était de prendre soin de moi et de voir des personnes autour de moi le remarquer. Et ça m’a sorti d’une phase de léthargie complet. Je me suis sentie véritablement en vie.

Sauf qu’après, il a fallu assumer cette après-midi et soirée à s’envoyer des messages comme ça. J’allais le revoir le lendemain, le lendemain c’était vendredi, et on avait déjà prévu de se retrouver au boulot. Et là, mon cerveau s’est mis en ébullition, mon corps s’est rempli d’adrénaline : j’avais hâte. Et je ne comprenais pas ce qui m’arrivait. Moi qui ait passé ma vie entière à culpabiliser pour rien, car c’était la méthode d’éducation de ma mère, moi qui culpabilisait lorsque j’allais promener mes chiens 15 minutes au lieu de 30 minutes alors que j’avais de la fièvre, lorsque je ne pouvais pas aller boire un verre avec mes copines car j’étais absente, cette fille-là ne culpabilisait pas DU TOUT. C’était incompréhensible et encore aujourd’hui, je ne comprends pas. C’était une nouvelle porte qui s’était ouverte et c’était ma vie. En fait, j’avais l’impression d’avoir entrouvert un jardin secret, mon jardin secret et tout ce qui se passerait dedans resterait à moi et sans conséquence. J’avais complètement l’intention que mon mari ne sache jamais et que cette histoire reste purement sexuelle. Donc pourquoi culpabiliser ? Il n’en souffrirai jamais, et moi je passais du bon temps. Tout le monde était gagnant.

Je passe donc une nuit à dormir approximativement 2 heures et j’arrive au travail le lendemain, apprêtée comme tous les jours (je l’espère du moins), et pas fatiguée le moins du monde car mon adrénaline coule à flot. Et là je le vois arriver, mon cœur bondit, et je l’ignore. Je fais comme si de rien n’était. Les collègues ne doivent pas savoir. Il s’assoit vers moi, et je pose ma tête contre le mur et ferme les yeux. J’entends un bruit, et regarde mon téléphone. Il me dit « il faut dormir la nuit normalement ». Je croise son regard, il me sourit et retourne sur son portable. Je lui réponds « j’ai rien dormi cette nuit, on se demande à cause de qui ». Il me répond en rigolant que lui non plus, il a pas beaucoup dormi. Et on continue à se parler. Il me trouve très belle aujourd’hui, et très attirante avec mon short. Je me sens poussée des ailes comme une gamine de 15 ans face à sa première amourette. Et on se rejoint plus tard dans les toilettes. Et là, il m’embrasse. Je suis mal à l’aise, incapable de savoir ce que je dois faire, ce que je dois pas faire. Je n’ai eu qu’un seul homme dans ma vie, mon mari et on s’est mis ensemble à 15 ans, on était la première fois l’un de l’autre. Il m’embrasse à pleine bouche, je sens sa langue entrer facilement en moi et je me laisse faire. Puis je prends mon courage à deux mains, et je le touche. Il attendait que ça après tout, que je le touche. Il baisse son pantalon, ça va vite. Dans mon imaginaire, j’imaginais tout un jeu de séduction, jusqu’à céder à l’interdit car on ne peut pas résister l’un à l’autre. Mais non, la réalité fut tout autre. Comme je le comprendrais plus tard, il en était pas à sa première fois de tromper sa femme.

On essaye de mettre le préservatif, ça ne rentre pas. Là je me dis que cette histoire de taille de sexe est bien réelle, tous les hommes n’ont pas le même pénis. Et je comprends du coup que je suis un peu naïve. Lui sourit, il est très fier d’en avoir une plus grosse que mon mari. Je comprends vite aussi que son pénis est la chose la plus importante de sa vie, et dont il est le plus fier. Il sait que je ne prends pas de contraception, et ce n’est pas dans nos plans que je tombe enceinte de lui. Au-delà de ça, les maladies sexuellement transmissibles sont bien présentes dans ma tête, mais je crois encore qu’il n’a que sa femme en partenaire, donc je suis débile et le laisse me pénétrer sans rien.

La sensation est incroyable. Effectivement, la taille du pénis ça joue parfois. Je suis contre le mur, dos à lui, et il me prend les fesses à pleine main pour que son organe aille bien au fond du mien. C’est intense, c’est bon. Je me retiens à grande peine de ne pas faire du bruit. Puis il s’arrête. Sans préservatif, c’est trop dangereux. Et on se sépare comme ça, sortant des toilettes séparément et retournant à nos occupations séparément. Personne ne se doute de rien. Et il me renvoie un message pour me demander ce que j’en ai pensé. Il me demande si c’était mieux qu’avec mon mec. Je sens son égo très gonflé mais comme j’ai été élevée à ne pas blesser les gens, je réponds que ça pourrait être mieux si on a vraiment un endroit plus agréable que des toilettes pour le faire. Comme si le faire avec un mec lambda pouvait être mieux qu’avec la personne qu’on aime… Mais là encore, j’étais naïve. Et là, c’était parti. C’était la première fois que je trompais mon mec, et je m’en fichais.

Voilà, ça y est, vous avez le droit de me juger. Si, si, je vous autorise. Moi-même je me juge, et sûrement plus sévèrement que vous, donc lâchez-vous. Mais je sais aussi que certains d’entre vous me comprennent. Et puis vous inquiétez pas, le karma est bien présent, car je suis tombée sur le mec le plus chien possible et le plus connard possible avec les femmes. En l’espace de quelques heures, 1 mois après cet épisode, alors que nous n’avions pas encore couché ensemble réellement, j’ai appris qu’il trompait sa femme régulièrement, avec on ne sait combien d’autres femmes (je l’ai appris de l’une de ses ex avec qui j’étais en contact pour un éventuel plan à trois, oui, rien ne va dans cette histoire), dont avec son ex, et qu’il allait avoir un enfant. Sa femme était enceinte, et lui, il couchait avec tout ce qui bougeait. Je suis devenue parano, je me suis dit qu’il avait dû le faire avec la moitié des collègues de travail. Au final j’ai su qu’il l’avait fait qu’avec une seule qui était là avant moi, que soi-disant il n’aimait pas parce que son ethnie n’était pas ce qui l’attirait, et il m’avouera avoir couché avec elle deux fois. Pour un gars pas attiré par elle, il a quand même bien pris le temps de coucher avec elle non ? J’ai également appris que j’étais son bouche trou, puisque la première fois qu’on a couché ensemble, il est venu chez moi. Alors oui, vous avez le droit de monter sur vos grands chevaux, je l’ai invité dans la maison dans laquelle je vis et je dors avec mon mari. J’ai changé les draps, j’ai tout fait pour que mon mari ne se doute de rien, j’ai tout fait pour que rien de tout cela ne soit un manque de respect envers lui. Comme si me faire prendre par un autre homme chez lui n’en était pas un, mais je me rassure en me disant que tant qu’il le sait pas, il n’y a pas de problème. Vous connaissez le déni ? C’est mon deuxième prénom.

Il vient donc chez moi, on couche ensemble, c’est très stressant, mais très bon. Il repart aussitôt et plus de nouvelles. Ah oui, parce que c’est lui qui choisit quand on parle, sinon moi je peux me prendre des vents de 24, 48h, et comme je suis très insécure comme personne, ça me stress. Donc je préfère être disponible quand il me parle et ne pas risquer de lui parler. La relation pas du tout toxique vous me direz. Et pendant ce temps-là, il parle autant qu’il veut aux autres. Et notamment ce soir-là, j’apprends qu’il devait aller voir son ex qui n’était pas disponible, c’est pour ça qu’il est venu chez moi. Vous savez, le genre de révélation qui vous fait perdre 50 points d’égo. Et pareil, dernière fois qu’on a couché ensemble, le lendemain il a couché avec l’ancienne collègue qui ne « lui plait pas ». J’aime le fait qu’il se sente en sécurité pour m’en parler à moi, car à mon avis il en parle à personne d’autre (son ex par exemple ne sait même pas qu’il est mariée, la pauvre). Mais mon égo va bientôt être en négatif avec ses conneries. Dès qu’il couche avec moi et qu’il me dit qu’il trouve ça bon, je prends 100 points et après j’apprends un truc et j’en perds 50 puis un autre, 20 etc. C’est pas super rentable pour le moment.

Je me suis donc pris le karma en plein dans la tête, et je pense que ça ne va pas s’arrêter. Dans un moment de faiblesse sur moi et ma personnalité, je suis encore retombée sur un homme qui n’en a pas vraiment quelque chose à faire de moi, mais qui me veut disponible quand lui est disponible. Il veut aussi que je ne couche avec aucun autre homme, à part mon mari bien sûr, pendant que lui couche avec toutes les femmes qu’il rencontre. Non, je ne suis pas jalouse, je suis vexée. Qu’il couche avec qui il veut, je ne suis pas sa femme, ce n’est pas mon problème. Mais moi, ce dont j’avais besoin, c’était de me sentir vivante, de me sentir exister. Et au final, je n’existe pour mon mari juste parce que j’ai toujours été là et que je suis bien utile, et pour l’autre, dès que les autres sont pas disponibles et qu’il a besoin de coucher. Il m’a fait de grands discours, en me disant qu’il aimerait coucher avec moi pour la vie, que j’étais dans son top 3 des meilleurs coups. Et après silence radio pendant une semaine, donc on sait tous ce que ça veut dire : baratinerie.

J’en suis donc arrivé au même point, d’où ma dépression de ce dimanche. Demain je vais le revoir, après une semaine sans nouvelle, et je vais retomber dans le jeu de séduction s’il me parle, ou l’ignorer s’il ne me parle pas. Et mon mari est sorti ce soir, après m’avoir copieusement ignoré toute la journée au profit de son jeu, et m’avoir fait culpabiliser à chaque fois qu’il me voyait dans le canapé « ah, tu révises pas ? » Est-ce que vous me comprenez mieux ? Est-ce que je cherche à me justifier ? Oui tout à fait. J’ai besoin de savoir que je ne suis pas une mauvaise personne, mais juste quelqu’un de tellement perdu, et qui a tellement envie d’exister, que je fais n’importe quoi. Je fais une crise existentielle quoi.

Parce que je vais vous dire, moi, ce que je veux. Déjà, il faut savoir que j’ai été élevée dans un cocon familial tout doux, et où les hommes ont un rôle incroyable. Mon père est l’homme le plus gentil et aimant de la planète. Il fait tout à la maison, non pas que ce devrait être étonnant au XXIème siècle. Il fait tout pour plaire à ma mère qui est toujours en train de râler. Et là, hop, remise en question : et si j’étais exactement comme ma mère ? Que mon mari est en fait incroyable, attentionné, mais je refuse de le voir, butée et chiante comme je suis ? J’ai déjà demandé à mon entourage, et visiblement non, je ne me méprend pas sur tout. Bref, mon père est attentionné, maladroit certes, mais il fait sans cesse des efforts. Et il a élevé quatre enfants, moi et mes trois frères, deux grands, un petit. Et mes frères, c’est quelque chose, ils sont incroyables. Ce sont mes meilleurs amis. Ils sont drôles, nous avons une complicité que j’aurai pu rêver, ils sont intelligents, ils sont attentifs à tout, aux moindres petites choses et ils prennent soin de moi. J’ai donc grandit dans une famille avec 3 hommes qui prenaient soin de moi, mon père et mes grands-frères et moi qui prenait soin de mon petit frère. J’ai été protégée, choyée, chouchoutée. Et hop, je me mets en couple et je trouve qui ? Un homme qui ne me protège pas, qui m’a même fait faire mes premières crises d’angoisse au début de notre relation, qui ne me chouchoute pas, qui ne prend pas soin de moi. Et au début, c’était pas grave, car j’étais ravagée.

J’étais ravagée par le manque de confiance en moi, par cette constante remise en question, constante culpabilité, ce sentiment de n’être jamais assez, de n’être pas à la hauteur. Et puis j’ai grandi, j’ai fait un travail sur moi, et je suis arrivée à la conclusion que j’étais une personne formidable, qui a ses défauts mais comme tout le monde, qui essaye sans cesse de s’améliorer, qui prend soin des gens qu’elle aime, qui est attentionnée, qui est passionnée, qui est robuste, et forte (ce qui conduit certainement mon mari à penser que j’ai pas besoin qu’on prenne soin de moi), qui est pleine d’humour, qui est intelligente et qui a un sens de l’empathie plus développé que chez la plupart des gens. Je lis donc bien souvent dans la tête de mes interlocuteurs, et je peux vous comprendre très vite, savoir si on va s’entendre, ou si au contraire vous êtes un danger pour moi. Sauf avec les hommes qui me plaisent visiblement. Je suis tout cela, et plus encore. Est-ce que je mérite donc de ne pas me sentir vivante dans mon couple ? De ne pas me sentir unique ? De n’avoir personne qui s’occupe de moi ? Je voudrais dire que non, je ne mérite pas ça. Enfin je ne méritais pas ça, mais maintenant avec mes bêtises, peut-être que si ? Je suis donc complètement perdue, incapable de me sortir de la situation dans laquelle je me suis mise. Je n’ai pas envie d’arrêter mes bêtises, car même si mon égo prend un coup à chaque révélation, je me sens quand même plus vivante que sans. Et j’ai l’impression que si j’arrête, je retournerai dans cette routine où je me sens morte, où j’avance parce que c’est la vie, il faut avancer, mais que rien n’est palpitant, incroyable, unique.

La solution que je pourrais trouver, c’est quitter mon mari, parce qu’on part toujours dans l’extrême dans ces moments. Mais vraiment, quitter quelqu’un qu’on aime, avec qui on s’est imaginé pendant 15 ans de construire sa vie ? Et pourquoi le quitter, pour se faire malmener par d’autres hommes après, suite à la fragilité émotionnelle dans laquelle la rupture va nous mettre ? Ou pour enchainer des années de célibat, ne peut être jamais avoir d’enfants, de maisons ? Alors je suis d’accord, on ne reste pas avec quelqu’un juste pour avoir des enfants et une maison, mais au-delà de ça, je l’aime. Déjà, avec mon mari, on mange. Et ça, bordel ce que c’est important. On mange bien, on se régale. Comment je ferai sans lui ? Et avec mon mari, on rit, mais on rit ! On a les mêmes références de films, de dessins animés. Et puis il me soutient, à sa façon, mais jamais il ne prendra un de mes projets pour un truc nul. Au contraire, il va être même plus enthousiaste que moi, ce qui peut être agaçant. Il m’enlève mon stade de rêve pour passer au concret. Mais, ça, c’est pas grave.

La deuxième solution, c’est que je continue à faire un travail sur moi. Peut-être qu’en fait, je ne devrai pas attendre que quelqu’un s’occupe de moi. Peut-être que je devrai me contenter de m’occuper de moi seule. J’y arrive bien plus qu’avant maintenant. Peut-être que je devrai me contenter de cette relation, et du manque de liberté qu’elle implique, en m’adaptant toujours à lui et lui jamais à moi (tiens, exactement que dans mon adultère, hyper drôle ça non ? NON ?) Peut-être que le nœud du problème c’est moi et pas lui. Que lui il vit simplement, sans se poser de question et qu’il a raison. Que moi je suis le parasite qui va lui briser le cœur car je veux plus, un plus que je n’aurai peut-être jamais car le problème reste et restera moi. Je suis peut-être une éternelle insatisfaite. Et ça se voit dans ma vie, j’ai jamais tenue longtemps dans la même voie, j’adore changer, la nouveauté, apprendre. Et si dans le couple j’étais pareil ? Et si à force de ne pas me contenter de ce que j’ai, je perdrai tout ? Mais en même temps, prendre soin de soi c’est s’écouter et si je m’écoute, je n’ai pas envie de me contenter de ce que j’ai…

Donc je fais quoi moi dans tout ça ? Et ben, je vais vous dire, je vais faire comme j’ai toujours fait. Je vais attendre que tout ça m’explose à la figure, et j’aviserai et me relèverai à ce moment-là.

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