Comment dire non à Lola ? Comment lui refuser une soirée à laquelle l'amour est présent ?

La lumière se tamisa n'éclairant que la petite scène. Une foule se forma rapidement devant celle-ci parmi elle, beaucoup de fille. Notre table était située plus au fond et la visibilité était encore bonne. La batterie débuta vigoureusement, la basse et la guitare électrique suivirent puis une voix douce, sensuelle et cassée hérissa la foule qui poussait des cris aigus à l'apparition de ce dernier. Lola me fixait les yeux pétillants comme jamais elle les avait eu auparavant.

Je ne le connaissais pas son "Félix" mais la façon dont elle m'en parlait me laissais croire qu'il était génial et qu'elle en était, probablement folle amoureuse. Il devait être drôle et beau. Lola a de très bons goûts en matière de garçon.

La voix envoûtante du chanteur me plaisait. Ces paroles provocatrices bourrées de jeux de mots m'amusaient à me faire danser.d'ici, je le voyais bouger sur scène, mais mon regard se consentrait principalement sur le guitariste de Lola qui semblait profiter du moment et complétement à l'aise sur scène. C'était un groupe de Rock français qui débutait, mais s'était visiblement déjà produit plusieurs fois dans tous Paris. Je les connaissais pas avant que Lola ne les rencontre à une fête privée. Il faut admettre qu'ils sont talentueux et que le chanteur en plus d'avoir une belle voix semble avoir une belle plume. Le mini concert toucha à sa fin et la foule déjà se disperça.

• Lola: On y va ! Avait-elle dit sur un ton franc.

J'avais acquiescé d'un signe de tête et elle avait attrapé mon poignet afin que nous ne nous perdions pas en nous frayant péniblement un chemin jusqu'au bout du bar. Elle poussa une porte un peu dissimulée qui nous mena tout droit dans un couloir sombre et étroit. La porte se referma et insonorisa le bruit du bar.

• Lola: Je suis bien ? Me questionna-t-elle anxieuse.
• Moi: Cette robe bleue moulante en velours te rend encore plus belle que tu ne l'es naturellement Lola... L'avais-je rassuré.

Elle passa son bras autour de mes épaules et déposa un baiser délicat sur ma joue avant de me sourire fièrement. Après tout, elle a toujours été là pour moi lors de nos débuts avec Jules. Elle aussi m'accompagnait et passait de très longues soirées ennuyantes pour mon propre bonheur. C'était tout naturel que je fasse de même.

Elle poussa la première porte qui laissa partir une épaisse fumée odorante. A l'intérieur, un canapé et deux fauteuils chacun occupé, sur la table basse, bières, verres vides, cigarettes et diverses autres herbes à fumer. Une longue silhouette élancée s'avança vers Lola, certainement Félix. Il était grand et fin. Il portait un T-shirt blanc avec une veste en jeans, pantalon noir et converse blanche, une petite boucle d'oreille. Des cheveux foncés ébouriffés sur un visage jovial et agréable. Pas de bisou sur la bouche, mais sur la joue ainsi qu'un long câlin. La description de Lola était drôlement précise, je souris en les voyant se saluer et se murmurer quelques mots. Elle nous présenta rapidement puis Félix nous présenta à chaque membre du groupe. Comme si nous nous connaissions déjà nous discutions ensemble de tous et rien et rigolions. Les garçons étaient très sympas. Lola et Félix étaient si beaux à regarder. Le début d'une histoire est toujours exceptionnel lorsque tu es spectatrice ou le personnage principal !

La porte claqua et Félix se redressa avant de saluer le nouvel arrivant qui me semblait familier.

• Félix: Adrien le retour !
• Adrien: Coucou, je suis revenu ! Avait-il dit en plaisantant.

Son regard s'arrêta dans le mien tandis que Félix nous présenta. Adrien était mon mystérieux inconnu de l'horrible soirée du bisou, mais pas seulement, il était l'auteur-compositeur des paroles plaisantes que j'aurais rêvé d'écrire et le propriétaire de cette voix si douce et brute à la fois. Il se rapprocha pour se servir un verre et prit place en face de moi vers Nico, le batteur du groupe. Mon regard se baladait sur lui, il était grand lui aussi entièrement vêtu de noir sauf sa chemise blanche, déboutonnée d'environ trois boutons, laissant apparaître son torse-nu et un collier de perles noires. Un visage pâle mais doux avec des cheveux foncé et ondulé. Ses yeux noirs brillaient. Il portait également un anneau à l'oreille comme Félix. Un homme à bijoux comme Jules l'était avant. Il ne parlait pas, il écoutait et restait silencieux. Il semblait apprécier rester à l'écart en étant présent et les autres ne semblaient pas choqués de sa non-participation aux conversations animées et drôles que nous partagions tous.

Mon téléphone n'arrêtait pas de sonner. C'était encore Jules. Je n'avais pas trouvé la force de lui parler depuis que je l'avais à nouveau surpris avec cette jolie brune dans les couloirs de la fac. Ils ne s'étaient rien passé, mais j'avais découvert qu'il ne s'agissait pas d'une rencontre d'un soir. Il la connaissait et j'avais beau me dire que tout allait bien et faire comme si, ça n'allait pas. Ce souvenir me hantait et je n'arrivais pas à le sortir de ma tête. Bien sûr nous en avions vaguement parlé ensemble et j'en avais parlé également avec les filles, mais rien. Impossible d'oublier. Ma main glissa lentement sur mon écran refusant son appel avant de le ranger dans la poche de ma veste.

• Lola: Tout va bien ?
• Moi: Oui, oui!
• Lola:Tu veux y aller toi à cette fête ?
• Moi: Quelle fête ?
• Félix: Un pote à nous. C'est pas loin, c'est dans le 10ème.

Mon regard questionna Lola, je ne m'étais pas rendu compte que j'avais perdu le fil de la conversation.

Moi: Oui pourquoi pas!

Elle me sourit ravie par ma réponse et nous nous préparions tous à quitter la loge. Dehors, il faisait froid et nuit. Il était déjà tard et peu de gens étaient de sortie. Nous avions marché rapidement et l'immeuble était déjà devant nous Bérald ouvra la porte avec le code alors que je m'apprêtais à entrer, une main agrippa mon poignet, doucement me poussant à me retourner. Adrien me tendait une cigarette que j'avais prise sans réfléchir du bout des doigts. Lola avait crié mon prénom et j'avais répondu que j'arrivais avant qu'elle ne disparaisse dans les escaliers. Il alluma d'abord la sienne avant de se rapprocher de moi. J'avais déjà glissé ma cigarette entre mes lèvres. Il fixa un court moment ma bouche avant de presser sur le briquet et de se reculer une fois la cigarette allumée. Il s'appuya élégamment sur le mur froid de l'immeuble en me fixant froidement. Il a cet air dangereux et imprévisible qui lui colle à la peau, mais quel charme cela lui donne ! Bon sang ! ça crève les yeux que c'est un homme à femme. Il est beau et terrible à la fois. Le type qui ne te laisse pas indifférente. Celui à qui on ne peut résister. D'ailleurs, lui a-t-on déjà refusé quoi que ce soit ? Certainement pas ! Je venais d'accepter une clope alors que je ne fume pas ! J'ai froid et il ne me parle même pas.

• Adrien: Ne me regarde pas comme ça chérie. Avait-il dit d'une voix à peine audible.

Il crachait sa fumée le regard fixé sur moi. Mon téléphone vibra, c'était Lola qui me demandait ce que nous faisions.

• Moi: On est attendu...
• Adrien: dans ce cas, allons-y.

Il écrasa sa cigarette pendant que je finissais la mienne et nous montions à l'étage rejoindre les autres. L'appartement était plongé dans la pénombre et dans chaque pièce se trouvait des invités, nous avions eu beaucoup de peine à nous déplacer, les gens dansaient et nous bousculaient. Finalement, nous avions rejoint les autres. Lola et Félix étaient déjà sur la piste de danse Adrien avait subitement disparu me laissant seule avec Nico et Bérald. Lorsque je m'étais finalement absentée un instant pour trouver la salle de bain, je l'avais légèrement aperçu. La porte n'était pas complétement fermée et le peu de visibilité que j'avais le montrait en charmante compagnie. Ma main s'était posée sur la poignée de la porte et en voulant la refermer discrètement, il m'avait vu. Je fermai la porte rapidement en me dirigeant vers la direction opposée de la chambre où je venais de le surprendre dans une situation plutôt délicate. Devant les toilettes, il y avait une file d'attente plus longue que dans n'importe quels autres bars. J'avais attendu dix bonnes minutes avant d'enfin pouvoir y entrer. Lorsque j'étais revenue, ils n'étaient plus là et avant que j'atteigne Lola qui se déhanchait encore sur la musique sourde et dynamique mon regard croisa celui d'Adrien qui me fit faire demi-tour à tort. Il m'attrapa fermement par la bras m'obligeant à lui faire face. Il semblait fâché, mais ne me parlait pas.

• Moi: Désolée pour avant, je cherchais les toilettes...
• Adrien: Où sont les autres ?

Je clignai des yeux devant son ton froid.

• Moi: Lola et Félix dansent là-bas et je chercherais justement Nico et Bérald...
• Adrien: Je peux te raccompagner si tu le souhaites...
• Moi: Non. Non merci... C'est gentil.

Il retira sa main et se recula un peu avant d'avoir un regard plus doux.

• Adrien: Je vais rentrer aussi...
• Moi: Bon alors, tu ne me laisses pas vraiment le choix...

Il m'avait tendu sa main que j'avais mal considérée après la scène que j'avais vue.

• Adrien: Je me suis lavé les mains.

Grillée. Est-ce qu'il lit en moi ou suis-je trop expressive lorsqu'il s'agit de dégoût? Je saisis timidement sa main et il me guida jusqu'à la sortie. C'est une fois dehors que je me rendis compte que nous n'avions pas prévu les autres et surtout Lola que je m'en allais.

• Moi: Merde! Je dois prévenir Lola.

Je sors rapidement mon téléphone de ma veste et lui envoie un message pendant qu'il fume à mes côtés.

• Moi: C'est bon.
• Adrien: Génial.
• Moi: Je peux rentrer seule avec le dernier métro, tu sais ?

Il m'envisagea un court instant avant de me cracher sa fumée dessus.

• Adrien: C'est pas très prudent pour une fille comme toi chérie...
• Moi: Je suis une grande fille et je sais me défendre... Répliquai-je calmement.
• Adrien: Te défendre ?
• Moi: Oui.

Ses yeux noirs se plongèrent dans les miens une lueur étrange passant rapidement avant qu'il ne fixe le sol.

• Adrien: Tant mieux... Alice... Murmura-t-il en avançant.

Je n'avais pas bien compris sa réponse, mais j'étais presque sûr qu'il ne me laisserait pas rentrer seule ce soir. Nous avions emprunté plein de raccourcis dont je ne connaissais même pas l'existence. Il connaissait Paris comme sa poche, bien que les ruelles prises n'étaient pas les plus fréquentables et rassurantes à prendre lorsqu'il est 4 heures 20 du matin, mais bon, il était apparemment sûr de lui et j'étais arrivée chez moi sans problème et relativement vite.

Quand il s'était avancé pour me dire au revoir, je m'étais reculée habilement et il avait saisi le message. Il avait levé les mains en l'air en me fixant gentiment.

• Moi: Merci de m'avoir raccompagné...Rentre bien...
• Adrien: Bonne nuit, Alice.