Janvier

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Bonjour Tristesse de Françoise Sagan

Premier roman de Françoise Sagan, Bonjour Tristesse parle de la découverte par une jeune fille de 17 ans, de son égoïsme et de sa capacité à manipuler ses proches. Sous des dehors nonchalants et la couverture d' une fausse ingénuité, Cécile rejette une belle-mère inattendue, qui menace la tranquillité de son esprit fantasque et sa complicité avec son dandy immature de père. Elle ira très loin, avec certes des états d'âmes, mais sans vrais remords. Une écriture fluide, une intelligence de l'âme humaine rare. Cet histoire d'un été paresseux m'a séduit.

A lire d'une traite.

Un léopard sur le Garrot de Jean-Christophe Rufin

Je viens tout juste de terminer "Un léopard sur le Garrot" de Jean-Christophe Rufin. Il s'agit d'une autobiographie que Gallimard a publiée en 2008. J'ai lu ce récit avec plaisir et admiration pour l'homme, simple, honnête, rempli de doutes, qui possède tant de talents qu'ils suffiraient à remplir la vie de plusieurs personnes. Médecin, ambassadeur, directeur de journal, dirigeant d'une ONG, Passionné de montagne et enfin écrivain !

Rufin ne se raconte pas, il nous partage sa vie avec son regard généreux, touché par la souffrance qu'il rencontre et vers laquelle il se dirige. Si la profession de médecin hospitalier l'a très vite déçu, par son manque d'humanité, sa hiérarchie, il n'a jamais cessé de l'être par son désir de soigner, de comprendre et de respecter l'humain.

Depuis ses études de médecine et ses frasques d'étudiant, jusqu'à la révélation de l'écriture, il n'a jamais fait carrière, il a saisit les chances d'aventures que l'existence lui proposait, en s'adaptant, en apprenant, conscient de ses lacunes.

Il distingue deux types de médecins écrivains, ceux qui parlent de leur pratique (Il cite Martin Winckler, que j'ai lu avec bonheur, dans la maladie de Sachs) et ceux pour qui la littérature est une échappatoire, une ouverture sur l'imaginaire. Il fait partie de la seconde catégorie. Evidemment, s'agissant d'une autobiographie, de médecine il est aussi question, mais de loin, avec distance. Il porte un regard tendre, sans jugement définitif, sur les personnages de sa vie. On voudrait être son ami et c'est un peu de cette amitié qu'il nous offre en se confiant à nous comme pourrait le faire un proche, sans faux semblant ni autoglorification. Il nous dit : là j'ai commis des erreurs, j'ai hésité. Il n'en rajoute pas, jamais. Il n'en a pas besoin, il en a sous le pied et pourtant il ne nous le fait pas sentir.

Pour finir, son approche de l'écriture me ravit, car il n'a jamais pensé qu'il faille se cantonner à un genre précis. Il a toujours eu besoin de vivre pour nourrir sa plume et laisser venir ce que la vie lui inspirait. Jean-Christophe Rufin est partageur, ça tombe bien : il est passionnant !

Blouses d'Antoine Sénanque (inachevé)

Cette fois, tant pis, je vais vous parler d'un roman que je n'ai pas lu, du moins pas entièrement. Antoine Sénanque est médecin, neurologue. Après l'autobiographie de Jean-Christophe Rufin, un autre neurologue, je me suis frotté les mains. Ce n'est pas que j'espérais trouver un auteur semblable à Rufin. Mais j'imaginais à minima un air de famille, un regard rendu proche par la difficile proximité de la souffrance et de la mort. Cet auteur n'est pas fait pour moi. Après une centaine de pages, j'ai rendu les armes.

Alors peut-être n'ai-je rien compris ? Sénanque a de belles phrases qui me font un temps rentrer dans son discours. Ensuite, il se répète, trois fois, quatre fois, comme pour enfoncer le clou. J'avais compris la première fois, inutile d'insister ! Je devais sans arrêt faire l'effort de me concentrer sur ma lecture pour en être distrait aussitôt.

En résumé, il explique que les internes en médecine ne sont pas préparés et que tout le monde, les infirmières, les médecins en titre se déchargent sur eux des décisions douloureuses : abréger la souffrance, choisir un traitement rapidement, quitte à se tromper, sans espérer beaucoup d'aide.

Les patients ne peuvent entendre le doute, ils veulent des certitudes alors que le médecin bien souvent, ne sait pas. Je peux comprendre tout cela, mais il aurait pu adopter un style moins larmoyant. A force de l'écouter se plaindre sans cesse, mon empathie a trouvé ses limites. Le livre m'est tombé des mains.

Une amie de la famille de Jean-Marie Laclavetine

La sœur aînée de l’auteur est morte fin 1968, lors d’une promenade aventurée sur les rochers de la chambre d’Amour à Biarritz. Lui avait quinze ans. Il se souvient d’une famille sous le choc, qui peu à peu enfouie l’absente sous une chape d’oubli. Le drame atroce blesse tant les parents qu'ils n’en parlent plus, ni entre eux, ni aux autres. Des années après, alors que les petits enfants passent leurs vacances dans la maison familiale, ils tombent, forcément sur une photo plus ou moins cachée de leur tante. Ils exhument des souvenirs dans le grenier, des mystères dans les silences de leurs aînés. A leurs questions, il leur est répondu qu’il s’agit d’une amie de la famille. Bientôt le poids du non-dit leur pèse tant que Laclavetine, petit frère de la disparue, décide qu’il est temps de lever le voile et de faire la lumière sur cette vie écourtée.

Cinquante ans après, il décide d’écrire un livre. Il lui est impossible de faire ce portrait sans l’aide de tous ceux et celles qui l’ont aimée. Gilles son fiancé, sa meilleure amie de l’époque, son autre frère. La peine ne s’effacera pas malgré les mots. Une forme de justice a peut-être été rendue : la faire revivre un peu parmi ses proches et nous autres les lecteurs de ce roman délicat et touchant.

Semiosis de Sue Burke

Sue Burke est une autrice américaine. La première page nous apprend qu’elle a vécu à Madrid et qu’elle a réalisé des traductions en anglais, pour une autrice sud-américaine et enfin que Semiosis est son premier roman.

L’intrigue débute classiquement par une expédition de colons, venus de la terre, qui se posent enfin sur Pax, une planète lointaine.

Ce qui différencie ce nouveau monde de la plupart de ceux qui ont été décrit dans la littérature de science-fiction, c’est l’importance de la flore. Je ne veux pas vous gâcher le plaisir en vous en parlant trop. Par contre, je peux vous dire que l’auteur met l’accent sur l’interdépendance des écosystèmes et des êtres qui le constitue. Elle dessine des relations de symbiose ou d’agression. L’humain n’est pas comme dans les vieux récits de SF, le conquérant magnifique, mais un groupe occupé à sa survie, c'est-à-dire à essayer de comprendre le fonctionnement du monde qui les entoure et comment ils pourraient s’y adapter. La faune, différente et dangereuse leur posera également de graves problèmes et ils devront trouver des alliés inattendus.

J’ai adoré.

Patronyme de Vanessa Springora

Ce roman parle de la recherche d'identité de l'auteur.

Son père vient de mourir. Vanessa se retrouve à trier ses affaires et s'interroge sur ce père mythomane, sur lequel elle n'a jamais pu compter. Toute sa vie il a multiplié les fausses pistes et s'est présenté sous des dehors flatteurs pour s'évader d'une vie vouée à l'échec. Il possédait pourtant des atouts pour réussir. Son imagination aurait pu faire de lui un créateur. Sa capacité à convaincre, lui aurait, à coup sûr, ouvert des portes. Ses qualités n'ont servi qu'à tromper, à dissimuler.

Qu'avait-il donc à cacher ce père qui lui a transmis ce drôle de nom "Springora" ? Ce patronyme n'existe que dans une famille en Europe : la sienne. Comment expliquer un pareil mystère ? L'auteur ne peut pas compter sur les rares explications de son père pour l'apprendre. Il s'est inventé tant d'ascendances prestigieuses que sa parole est d'emblée suspecte. Maintenant qu'il est mort, comment le faire "parler" ?

Cette porte qui se ferme, la pousse paradoxalement à rechercher la vérité maintenant qu'elle est l'héritière de cette curieuse lignée. Elle devra remonter jusqu'au père de son père pour comprendre.

Quels secrets cache donc ce grand-père ? Qui était Josef Springora ?

C'est tout l'objet de ce livre brillant.

Un homme seul de Frédéric Beigbeder

Impertinent, Frédéric Beigbeder, règle son compte à son père récemment décédé. Je suis intimidé au moment de rédiger ma petite chronique habituelle. J'ai décidé d'en écrire une sur chaque roman lu et je m'y tiens. Cependant certaines sont plus difficiles à faire que d'autres. Malgré le propos "funèbre" j'ai lu ce roman avec délice, en traitant intérieurement Beigbeder d'imposteur parisien, car le dandy donne toujours l'impression de ne pas y toucher avec sa manière facétieuse de dire des vérités profondes. Pourtant rien n'est plus faux. Tout d'abord, parce qu'il a quitté la capitale voici huit ans, pour rejoindre Guétary, le village de son enfance, près de Biarritz. Ensuite parce que ce qu'il écrit est d'une grande finesse. Ses phrases, toutes en nuances, se dégustent. Son propos trouve des échos tout au long du roman et les époques se répondent. Son père chasseur de têtes, charmeur, familier des plus grands, intelligent, cultivé. Invincible ? connaîtra une fin solitaire, oublié du monde. Une fin de vie sans fard ni paillettes. Reste un hommage pourtant, d'un fils à son père et d'un fils à tous les pères au travers de nous lecteurs qui nous reconnaissons dans ce récit universel et singulier.

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