Chapitre 8
Cette journée allait être chargée. Au Conservatoire, nous nous entrainions à l’improvisation, en vue du prochain concours de danse. Nous enchainions les musiques, toutes plus différentes les unes que les autres. Le professeur Lance me laissa partir à quatorze heures trente. Les livreurs arrivèrent comme prévu à quinze heures. Liva m’avait même fait des courses. Après le départ des livreurs, Liva et Sacha partirent chercher Lianna à la garderie et j’informais Véra qu’elle avait enfin l’autorisation de venir.
— Lia ! Oh…
Lianna s’immobilisa en découvrant toute. Pour le moment, la maison était rangée. Avec l’arrivée de ma fille, elle n’allait pas le rester longtemps.
— Tu aimes ?
— Est Zolie.
— Tu veux voir ta chambre ?
— Oui ! s’exclama-t-elle tout excitée.
Ayant pu l’aménager sur mesure, elle avait un lit à baldaquin, de grande fille, un petit bureau, une belle armoire violette pour ses vêtements et une autre pour ses jouets. Mais il y avait surtout un grand tapis de jeu, comme dans mon studio.
— A moi ?
— Oui ma chérie. C’est tout à toi.
— Erci. T’aime Lia.
— Je t’aime aussi, mon p’tit chat.
Je la laissais découvrir sa chambre et ses jouets quand j’entendis la porte d’entrée s’ouvrir. Je descendis dans le salon où Véra étudiait le moindre détail, souriante.
— Tu es douée, mon ange. Cette maison est magnifique.
— Toujours d’accord pour y emménager avec moi ?
— Plus que jamais.
Elle m’embrassa et je lui fis visiter. Le salon, la cuisine et le garage au rez-de-chaussée. Ainsi que les trois chambres, la salle de bain et les toilettes à l’étage. Son visage s’illumina quand elle entra dans la chambre de bébé.
— Tu ne peux pas savoir à quel point ça me fait plaisir, Élia.
— Je le vois sur ton visage. J’ai une surprise pour toi dans le jardin. Je te montrerais après.
Elle fit rapidement le tour de la maison avant de sortir. Elle s’immobilisa en apercevant les Iris plantées dans un coin et l’écriteau. Je m’approchais et entourais sa taille. Sur la plaque, il n’y avait qu’un ange dessiné. J’avais voulu mettre une date, mais je ne la connaissais pas.
— Tu as vraiment fait ça ? Tu t’es souvenue des Iris.
— Je me suis dit qu’il avait le droit à son espace rien qu’à lui. Un endroit où tu pourrais te recueillir pour ton fils parti trop tôt.
— Merci, Élia. C’est le plus cadeau.
— Il fait partie de la famille. Et comme ça, il veillera toujours sur toi.
Elle se retourna dans mes bras et sécha ses larmes. Elle souriait et ma poitrine se réchauffa. C’était la première fois que je la voyais sourire en pensant à lui.
— J’ai envie de te remercier avec un cadeau.
— Ce n’est pas la peine, mon amour.
— Je dois aller faire quelques courses.
— Je vais préparer le diner alors.
Je n’étais pas spécialement douée en cuisine, mais mon minimum de connaissance allait faire l’affaire. Pour ce premier diner à la maison, je préparais une pizza. Ce premier repas se déroula en famille. Pour une fois, il n’y avait que nous trois. Véra s’occupa même de faire la vaisselle, ou plutôt de remplir le lave-vaisselle pendant que je douchais Lianna. Dès qu’elle fut couchée, je pris ma douche à mon tour. Serviette autour de la poitrine, je m’arrêtais en voyant Véra m’attendre dans la chambre. Sur la commode, plein de produits. En plein milieu de la chambre, une table de massage.
— Je t’en pris, installe-toi.
— J’ai droit à un massage ? m’exclamais-je.
— Mon premier en cinq ans. Soit indulgente.
— Promis.
Je laissais tomber ma serviette et Véra me détailla de la tête aux pieds. Je m’allongeais à plat ventre sur la table de massage et elle déposa une serviette sur mes fesses. Elle éteignit la lumière pour en allumer une d’ambiance puis lança une musique douce. Je sursautais légèrement quand ses mains, refroidies par le produit, se posèrent sur mes épaules. Je me détendis complètement, fermais les yeux et la laissa faire. D’abord avec douceur et lenteur, ses mains glissèrent sur mes épaules, détendant les muscles, les uns après les autres. C’était si bon, si relaxant. Elle continua dans mon dos, mes bras et sur mes jambes. Je profitais d’un moment rien qu’à moi depuis longtemps. Ses mains chauffaient ma peau, apaisant toutes les tensions de mon corps.
— Je m’en sors bien ? murmura-t-elle.
— Caroline avait raison. Tu es incroyablement douée.
— Merci, mon ange. Je continue ?
— Fais-toi plaisir.
— Toi, tu vas bien dormir, cette nuit.
Je ne savais pas depuis combien de temps elle avait commencé, mais j’étais parfaitement bien, totalement apaisé et serein. Toujours en chuchotant, elle me demanda de me retourner et ajusta la serviette sur ma poitrine. Elle continua par un soin du visage. Elle avait se truc indéfinissable dans les mains qui me faisait voyager, sans bouger.
— Tu t’endors, mon ange. Je te laisse aller te coucher.
— Merci.
— Tu commences à quelle heure demain ?
— Huit heures.
— Je te mets ton réveil à sept heures. Je m’occuperais de Lianna.
— Merci, je t’aime.
Je me mis rapidement en pyjama, embrassait ma fiancée, me couchais en m’endormis aussitôt.
——
À mon réveil, je n’avais jamais aussi bien dormi. J’étais en pleine forme, prête pour cette belle journée. J’enfilais l’une de mes tenues d’entrainement, tressa mes cheveux et descendis enfin. Sur la table du salon, mon petit déjeuner était déjà prés. Un verre de jus d’organe frais, un bol de muesli avec du fromage blanc et des bananes. À côté, il y avait un petit bouquet de tulipes rouges. Après quelques recherches, je sus qu’elles aussi étaient le symbole de l’amour. Ma cuillère de fromage blanc dans la bouche, musique en fond sonore, je dépliais délicatement le petit mot laissé là.
« Mon Impératrice,
J’espère que ces tulipes et ce petit déjeuner fait par moi-même te conviennent. Lianna s’est préparée sans bouder, elle a bien mangé et elle était contente que je l’emmène à l’école. Je te souhaite de passer une excellente journée.
Je t’aime. »
Ma journée commençait à merveille. Je pris le bouquet en photo et l’envoyais à ma fiancée pour la remercier. Je mis les fleurs dans l’eau quand Sacha sonna. C’était l’heure de partir.
— C’est vous qui conduisez, Mademoiselle. J’ai eu l’autorisation de l’inspection académique du permis de conduire, pour vous apprendre à conduire.
— Merci.
Je ne conduisais pas depuis longtemps, mais j’étais de plus en plus à l’aise. Arrivée au Conservatoire, tout le monde remarqua ma bonne humeur.
— Tu es rayonnante, Élia.
— Si vous saviez. J’ai dormi comme un bébé, dans ma nouvelle maison après avoir bénéficié d’un super massage de ma fiancée.
— L’Impératrice fait des massages ?
— Elle a un diplôme d’esthéticienne, oui. Et elle est douée.
— Tu as déménagé ? me questionna une autre collègue.
— On commence oui. Je vous invite tous boire l’apéro ce soir. Je vous présenterais officiellement Véra. Vous êtes aussi invités, Professeur Lane.
— Je vais devoir décliner l’invitation. Ma fille me présente son copain.
— Une autre fois alors.
— Bien sûr. Allez, au travail de tout le monde. Commencez par vous échauffer.
En musique, on attaqua les premiers exercices d’échauffement puis quelques exercices d’improvisation. La matinée, on avança sur les chorégraphies en duo. Gaëtan avait beaucoup progressé.
— Votre attention, s’il vous plait. La compétition a lieu dans deux jours, pour ceux que j’ai inscrits. Vous aurez deux passages, en couple et en solo. Aujourd’hui, nous allons travailler l’improvisation en couple.
À côté de moi, Gaëtan déglutit. Il était bien plus doué en chorégraphie ou en improvisation en solo. Nous dansions ensemble depuis quelques mois, mais nous n’étions pas encore parfaitement adaptés à l’autre.
— Ça va bien se passer, le rassurais-je.
— Je ne veux pas te faire perdre la première place, Élia.
— Je ne peux pas gagner tout le temps, ne t’inquiète pas.
— Emeline et Tony, vous commencez, nous interrompit le Professeur Lane.
En duo, ces deux-là étaient bien plus doués que nous. Parce qu’il ne réfléchissait pas, contrairement à Gaëtant. D’autres couples, tous aussi doués, passèrent avant nous. Pourtant, à notre passage, Gaëtant craqua. Il s’emmêlait les pieds, il n’était pas en rythme.
— Arrêtons le carnage ici, intervint Lane. Reprends-toi Gaëtan, sinon je vous désinscris.
— Excuse-moi, Élia. Je ne suis pas prêt.
— Le problème, c’est qu’Élia ne peut pas participer en solo sans participer en duo.
— Trouvez-lui un autre partenaire. Si j’y vais, je vais tout gâcher.
— Faisons une pause. Approchez tous les deux.
Tous les danseurs rejoignirent la cafétéria, nous laissant seuls.
— Tu peux y arriver, Gaëtan. Aie confiance en toi.
— Tu dois juste arrêter de réfléchir, repris-je.
— Je suis vraiment désolé, mais je ne peux pas. Tu n’as personne qui pourrait danser avec toi et te faire gagner ?
— Si, peut-être, mais…
— Propose-lui.
— Gaëtant, intervint Lane. C’est toi le partenaire d’Élia. C’est à toi de concourir avec elle. Je vais vous ouvrir une salle et vous allez vous entrainer, jusqu’à y arriver.
Sans nous laisser le choix, nous étions déjà dans une autre salle. Perdre ne me dérangeait pas, je savais que je gagnerais en solo. Je voulais surtout qu’il se dépasse, lui prouver qu’il en était capable. Je commençais par le faire danser seul. Pour qu’il se laisse emporter par la musique, qu’il arrête de réfléchir. Durant le reste de la journée, on dansa ensemble. En fin de journée, il était bien plus à l’aise. Avant de partir, j’informais tout le monde que je les attendais pour dix-neuf heures. Ça me laissait le temps de récupérer ma fille à la maternelle, de faire des courses, mais aussi de tout préparer.
— Bonjour, Mademoiselle Aubelin, m’accueillit la maitresse. Est-ce qu’il y a eu un changement chez vous récemment ?
— Oui. Ma fiancée et moi sommes en plein déménagement. Il y a un problème avec Lianna ?
— Pas du tout, au contraire. Venez voir.
Dans la salle de classe, il y avait une petite musique et Lianna dansait et chantait.
— Ma maman est trop forte, expliqua-t-elle à sa copine. Moi danser avec elle. Et maison que à moi. Grande maison.
— Elle n’arrête plus de parler, rigola la maitresse. Et elle parle bien.
— Ça fait plaisir à entendre. Merci, Madame.
— Ce serait bien que l’Impératrice l’amène plus souvent à l’école. Ça lui a fait plaisir.
— Je lui en parlerais.
— Lianna ? Ta maman est là.
Ma fille se retourna, un grand sourire sur les lèvres.
— Élia !
Elle sauta dans mes bras et je reçus plein de bisous baveux. Je saluais la maitresse et rentrais. Je fis escale au supermarché pour acheter tout ce qu’il me fallait. Lianna entendit les chuchotements avant moi. Son sourire s’évanouit et Sacha se rapprocha.
— C’est elle ? La gamine de l’Impératrice ?
— On dirait. Regarde, elle a même un garde du corps.
— Oh, mais c’est Élia Aubelin ! Elle est plus jolie en vrai. Et parais plus jeune.
— Sa fille est tellement mignonne.
Ses gens m’avaient reconnu, en tant que fiancée de l’Impératrice. Allais-je devoir vivre ça au quotidien ? Et si ça empirait après mon mariage ? Ignorant ces pensées et les chuchotements, je me dépêchais de finir mes courses. Une fois à la maison, Lianna m’aide à préparer des canapés. Ou plutôt, à mettre de la farine partout. Quand Véra rentra à dix-huit heures, une tornade était passée dans la maison.
— Qu’est-ce qu’il s’est passé ici ?
— Ta fille au fourneau ? Oh merde, mes collègues arrivent dans une heure. Je ne serais jamais prête !
— J’appelle Liva et Sélina en renfort.
— Merci.
— Tu aurais pu les appeler avant, rigola-t-elle.
— C’est ça, moque-toi.
Véra m’embrassa, porta son téléphone à son oreille et récupéra Lianna, couverte de farine, qui avait besoin d’une bonne douche. Sans perdre plus de temps, je finis mes derniers toasts avant de commencer à tout nettoyer. Sélina et Liva prirent la relève pour que je puisse aller me préparer. Elle termina rapidement le ménage et nous aida à nous coiffer. On fut fin prête, dix minutes avant dix-neuf heures.
— Merci, les filles, on vous libère.
— N’hésitez pas, si vous avez besoin.
Pour les remercier, je leur donnais une boite avec quelques canapés. Sur la chaine hi-fi du salon, je lançais une musique d’ambiance qui fut interrompue par la sonnerie. Emeline et Tony venaient d’arriver.
— Bienvenue. Véra ? Entrez, je vous en pris.
Nos deux premiers invités retirèrent leurs chaussures et s’installèrent sur le canapé. Lianna dans les bras, vêtu d’une belle robe violette et décolletée, ma belle fiancée descendit les escaliers. Elle et Lianna avaient la même coiffure sophistiquée que nous.
— Votre Majesté, la saluèrent-ils.
— Dans cette maison, ce sera juste Véra. Soyez les bienvenus.
Au fur et à mesure que nos invités arrivaient, je les présentais à Véra. Elle semblait contente de rencontrer ceux avec qui je passais mes journées. Gaëtan fut le dernier à arriver. Il déglutit en croisant le regard inquisiteur de ma femme. Pendant que Véra servait le champagne, j’apportais de quoi grignoter.
— C’est une magnifique maison que vous avez là, commenta Mathilde.
— C’est Elia qui s’est occupée de tout, lui répondit Véra.
— J’aime beaucoup l’alliance des couleurs que tu as faite.
— Merci. Je suis restée plus de trois heures au magasin.
— Tu pourrais totalement réaménager le palais, mon ange ?
— C’est sur qu’un peu de neuf dans ton bureau, ça ne ferait pas de mal, la taclais-je.
Elle prit un air faussement blessé qui fit rire tout le monde. La soirée se déroula à merveille. Je couchais ma fille à vingt et une heures puis sortie un jeu de mimes et devinette. J’étais en équipe avec Véra, mais son niveau était catastrophique. Au moins, on rigolait bien.
— Merci pour l’invitation, Elia.
— C’était un plaisir. Faites attention sur la route.
— À demain.
Les derniers invités partis, la porte enfin verrouillée, Véra soupira et s’affala sur le canapé. Je souriais et la rejoignis, me faufilant dans ses bras.
— C’est bien plus épuisant que mes réunions avec le Conseil, mais ça fait du bien. On devrait organiser ça plus souvent.
— Tu n’as qu’à avoir des amis, enchainais-je.
— Mais tu as fini, oui !
— Invite Caroline la prochaine fois. Tu ne la vois qu’à l’institut.
— C’est une excellente idée. Tu es la meilleure.
— D’ailleurs, tu as réservé ta journée d’après-demain ?
— Pour ton concours ? Évidemment que je serais là pour t’encourager.
— Super ! Maintenant au lit !
En deux temps, trois mouvements, nous étions au chaud sous la couverture. Avoir notre propre maison était une bonne idée. Véra se détendait plus. Elle prenait enfin le temps de vivre pour elle-même et non uniquement pour l’Empire.
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