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Naëlle

Houlà, elle m'a saoulée celle là. Je pense que je ne ferais pas de vieux os dans cette boite. Non mais, pour qui me prend-elle ? Elle veut m'initier à la gestion de la boite sans me donner ni les moyens physiques, ni financiers, elle m'a bien regardée, ais-je l'air d'une bonne poire ?

Madame Gimeno, me dit elle ! Oui je sais, j'ai un prénom breton et un nom de famille espagnol, que voulez vous, je ne suis pas responsable de mes parents, qu'y puis-je si un petit fils de républicain espagnol a rencontré une fille de marin pécheur de Douarnenez immigrée à Grenoble, ( en avait elle marre du beurre salé et du paté Henaff ?).

Madame Gimeno ( j'ai repris mon nom de jeune fille, je n'allais pas m'appeler Leroux toute ma vie tout de même ? )

  • Madame Giméno , dans un premier temps vous resterez Chef d'équipe. C'est petit a petit que vous monterez en charge, pour l'instant je vous demanderais juste, en plus de votre travail de manager, de vous former auprés de Durand, dans six mois il part à la retraite. Attention Giméno, -au fait m'autoriseriez -vous à ce que je vous appelle par votre prénom ?- oui, ce sera plus simple, ma petite Naëlle. C'est une marque de confiance que je vous accorde là. Bien entendu, je saurais être reconnaissante, tout travail mérite salaire. Vous aurez, en plus de votre paie de manager, une prime mensuelle de 200 euros, ce qui n'est pas négligeable de nos jours. J'aimerais faire plus, mais la conjoncture économique ne le permet pas. Je ne vous demande pas de me donner une réponse tout de suite, ma petite Naëlle, vous avez jusqu'à la fin du mois pour vous descider, je vous fait antierement confiance, je suis certaine que vous saurez prendre les bonnes decision, vous étes une battante Giméno, enfin Naëlle. Nous sommes le 17 octobre, vous avez jusqu'au 3 novembre, allez, jusqu'au 10 novembre, le 11 étant férié, j'aurais ainsi toute une journée pour vous expliquer les arcanes de la boite. Ah oui, ma petite Naëlle, méfiez vous de vos mauvaises fréquentation, ce jeune homme à l'air trés sympathique mais il aura à plus ou moins long terme une mauvaise influence sur vous, il n'est ni sérieux dans son travail, ni trés courageux, il vous tireras vers le bas. Regardez Steeve Jobs, n'a t'il pas dit : No sex in job ? Bien entendu, quand Durand sera parti à la retraite... en Mars ou Avril, vous partagerez le poste avec Madame Vigier, et vous exercerez seule le temps de son congé parental, elle doit accoucher au mois de février, mais nous nous sommes arrangés, elle ne partira en congé maternel qu'à partir de juin, je ne sais comment elle se débrouillera mais elle gére sa vie familiale comme elle le désire, faites comme moi, ma petite Naëlle, ni Hommes , ni gosses, ce ne sont que des freins à notre épouissement personnel, ce ne sont que des chaines. Sans homme, nous sommes plus libres...

Et elle continua ainsi, pérorant qu'un homme qui ronfle devant son match de foot sa biere à la main, c'était tout sauf glamour, par contre un quatre à huit avec un stagiaire ou un intervenant extérieur, ça c'était admis, si je le voulais,elle pouvait même me prêter ponctuellement sa garçonniére. Quelle horeur cette bonne femme, heureusement elle m'a proposée de prendre mon relicat de congé annuel, pour prendre ma descision, ça tombe bien, je voulais présenter Claudio à tia Magdaléna, la soeur ainée de mon pére... je suis certain qu'il aimera l'arriére pays de Castellon de la Plana . Il y a des plages magnifiques vers Valencia. quinze jours c'est court, mais ça lui permettra de couper le cordon avec la belle évanouie .

Je ne suis pas partie tout de suite au travail ce matin, j'ai fait semblant de partir et je me suis cachée derriére la grosse église, le peu que j'ai vu m'a confortée dans mes idées, j'avais eu l'impression qu'ils se connaissaient déjà, je n'ai eu qu'a les suivre jusqu'à son appart à elle, rue Trés Cloitre, je me suis éclipsé avant qu'il ne sorte, il est arrivé au travail une bonne demi heure plus tard, ça ne laisse pas le temps de faire des choses, mais ça laisse le temps de parler, ça, une demi heure. En marchant normalement je n'ai mis que dix minutes pour aler à la boite.

Quand je vous disais que je ne suis pas une poire, je pensais à Claudio aussi.

Je n'ai pas voulu l'embêter en rentrant si tard ce soir, j'avais besoin d'air aussi. Il m'a envoyé un SMS le pauvre chaton, il préférait trainer en ville que se morfondre dans un appartement vide, sans moi ! Il parle bien, il sait parler au femmes l'animal, il a une sacré belle gueule aussi, je la comprend l'évanouie du bistrot, il a de ces tablettes de chocolat, parfois je le regarde à brûle pourpoint, avec ses cheveux mi longs de poète maudit, il ressemble à une statue de Michelangélo... Moi aussi, je connais l'Italie, mais je préfére l'Espagne, mon romancier préféré c'est Ernest Hemingway, je ne lui en ai pas parlé, il n'a que Stendhal dans la tête, je n'aime pas Stendhal, j'ai étudié des textes de lui à l'école comme tout le monde, mais j'aimais pas ça, le ton était geignard, les héros indecis, velleitaires... mous, comme Claudio, mais pas au lit, non dans ses prises de descisions. Bah, je prendrais des descisions pour lui...

Je l'aime déjà comme une folle, je suis certain que tia Magdaléna l'aimera, je lui parlerais de Pour qui sonne le glas, de cette putain de guerre civile ! de Garcia Lorca assassiné en Andalousie Hemmingway aimait l'Italie également, il y avait été soldat pendant la premiére guerre mondiale, enfin ambulancier à Fossalta di Piave à coté de Venise où il aété bléssé, il est tombé amoureux d'une infirmiére américaine, celle qu'il a appellée Catherine dans L'adieu aux armes... nettement plus classe que la Chartreuse de Parmes ( que je viens d'acheter, il va me falloir la lire, c'est le roman fétiche de chaton)

On avait fait un Road trip en Italie avec des copines, juste aprés la fac, je n'étais pas encore marié, alors, on était partis sur les traces d' Ernest H, Milan, vallée de la trebbia, la plus belle vallée du monde d'aprés H, les iles boromées, sublimes. je me souviens nous étions trois jeunes et belles Grenobloises en goguette, pas farouches... ah non, pas trois, deux Lucie, Lucia l'avait on surnomée était d'Annecy. Nous étions fauchées comme les blés également, nous voulions dormir au grand hotel à Stresa... nous nous sommes contenté du siége arriére de la voiture de location. Nous voulions aller jusqu'en sicile, nous avons arretés le périple à Venise, morte a Venezia, disait Visconti, c'est ce qui a failli arriver à Sophie, ( sophia ) mon ex meilleure amie, qui a couchée ensuite, plus tard avec mon mari... Un simple mal de ventre était en fait une appendicitte, je me souviens de cette période de ma vie bénie des dieux... et des glaces que nous mangions à l'hopital avec la malade... on nous avait dit que les glaces c'était bon pour ce qu'elle avait. Nous en mangions, matins midi et soir, les draps de son lits en etaient poisseux, le personnel hospitalier était d'une d'une gentillesse extréme avec nous... je me souviens de Mama générossa - c'était le surnom affectueux que nous lui avions octoyés- une grosse infirmiére brune d'un certain age qui ralait gentiment :

  • Attenzioné, les filles, il faudrait pas que le docteur voit tout ça, les glaces c'est bon, mais pas huit par jours...

Le docteur, Un externe à peine plus vieux que nous, s'en fichait de ces trois péronelles, il avait d'autres infirmiéres à se mettre sous la dent, Lucie avait entrepris de le draguer... en vain. Les latines étaient tellement plus belles que nous, avec leurs grands yeux noirs ourlés de noir, et leurs seins de madonne débordants des corsages, elles ressemblaient tant à Ornella Mutti et Monica Bellucci alors que nous étions plates commes des limandes comparées à elles. Même moi, qui pourtant ne le suis pas, mais j'étais d'une timidité maladive à l'époque, ma jolie poitrine, dont je suis si fiére aujourd'hui je la cachais sous de chemises informes et de vieux polos de Volley ball à mon petit frére. Le petit frére mesurait déjà un métre quatre vingt alors.

Aprés cette soirée au restaurant qui n'en finissait plus, avec cette horrible bonne femme que je révais de voir mourir éttouffée, elle mangeais goulument de tout, en grosse quantité en buvant comme un camionneur Roumain. Elle devrait être obése, elle était maigre comme un coucou, la vie n'est pas juste; Quand je mange des gateaux le dimanche, je dois aller à la salle de sport le lundi, faire une séance de pilate, il n'y a pas de justice dans ce bas monde.Si j'ai bien compris elle voudrais que je fasse le bouleau du directeur, celui de manager et un peu de Rh... gratos ! enfin dans son extréme bonté elle m'octroie tout de même une famélique prime... pour combien d'heures en plus, sans oublier les dossiers à éplucher à la maison, la nuit. La nuit, je dors, ou je baise, mes nuits et mes soirées ne lui appartiendrons jamais. assez parlé de Cruélla, nous ne sommes pas des gentils dalmatiens.

Il est évident que je devrais quitter la boite aprés avoir refusé sa généreuse proposition, non mais , pour qui se prend elle. Allez, ce soir, je ne veux pas savoir ce que fait Claudio, de toute façon je suis claquée, j'ai juste envie de m'endormir sur mon canapé, en regardant un navet sur Netflix pour me détendre. heureusement que je n'ai pas rendue les clés de mon appart.

Allez, j'embarque Claudio la semaine prochaine, s'il passe le test de Tia Magdaléna, c'est que c'est le bon... parce que vous croyez que ça existe les hommes parfaits et sans défauts vous! Je lui montrerais mon Espagne, il apprendra à aimer Hémingway... un jour avec lui, j'irais à Kay west,à quelques encablures de Cuba

" J'étais tellement éprise de toi, sentimentalement, que j'aurais brisé le coeur de n'importe qui pour toi. Pauvre de moi, ce que je pouvais être idiote. J'ai brisé mon propre coeur, en plus. Il est brisé et fichu. Tout ce en quoi je croyais et tout ce à quoi j'étais attachée, je l'ai abandonné pour toi, parce que tu étais merveilleux et que tu m'aimais tellement que l'amour seul comptait. L'amour était ce qu'il y avait de plus beau, n'est-ce pas ? L'amour, c'était ce que nous avions et que personne d'autre n'avait, ni n'aurait jamais. Et tu étais un génie et moi j'étais toute ta vie, j'étais ta partenaire et ta petite fleur noire. Baratin. L'amour, c'est encore un sale mensonge de plus. L'amour, c'est les cachets d'Ergospiol pour faire venir les règles quand tu avais peur que je sois enceinte. L'amour, c'est de la quiquine et encore de la quiquine, jusqu'à ce que ça me rende sourde. L'amour, c'est cette ignoble, cette abominable séance d'avortement à laquelle tu m'as conduite. L'amour, c'est tous mes organes abîmés. C'est moitié sondes et moitié injections; je me suis renseignée sur l'amour. L'amour est perpétuellement suspendu derrière la porte de la salle de bains. Ca sent le désinfectant. Que le diable emporte l'amour.*

*En avoir ou pas, extrait, Ernest Hemingway

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