Le couloir derrière la bibliothèque était calme, presque trop.
Ron Weasley en sortait, un parchemin roulé sous le bras, marmonnant à propos d’un devoir de métamorphose, quand une voix tranchante s’éleva dans son dos.

— Weasley.

Il se retourna d’un bond. Drago Malefoy s’avançait lentement vers lui, les yeux étroits, le visage fermé.

— Qu’est-ce que tu veux ? grogna Ron.

Drago s’arrêta à quelques pas de lui. Il parlait à voix basse, mais chacun de ses mots était chargé de tension.

— T’as passé beaucoup de temps avec Louise, ces derniers jours. Un peu trop, tu trouves pas ?

Ron croisa les bras, les sourcils froncés.

— C’est quoi ton problème, Malefoy ? On essaie de comprendre ce qui se passe dans ce château. Et elle a demandé mon aide, c’est tout.

— “C’est tout”, répéta Drago avec amertume. Je vois comment tu la regardes. Et je vois bien que ça te rend fou qu’elle soit proche de moi.

— Tu te prends pour qui ? s’emporta Ron. Tu crois que parce que t’es Drago Malefoy, tout le monde doit te laisser faire ? Louise n’est pas à toi.

La tension monta d’un cran. Aucun des deux ne semblait prêt à reculer.

— Je t’ai vu, continua Drago, serrant les poings. À la bibliothèque. Dans les couloirs. Même dans les toilettes pour aller parler à Mimi. Toujours là, collé à elle comme un chien perdu.

— Et toi t’es quoi ?! siffla Ron. Tu viens pleurnicher parce qu’elle ne t’a pas choisi aujourd’hui ? C’est pathétique.

Drago n’attendit pas davantage. Il fondit sur Ron, le saisissant par le col. Ron riposta sans réfléchir.
Les deux garçons roulèrent au sol, échangeant des coups désordonnés. Ils n’étaient pas très doués à mains nues, mais la rage parlait pour eux.

Des livres tombèrent au sol, une étagère vacilla.

— Arrêtez ! hurla une voix plus loin dans le couloir.

Mais aucun ne semblait entendre.

Finalement, Drago donna un coup d’épaule qui projeta Ron en arrière, et resta là, respirant fort, les mains tremblantes.

Ron se redressa lentement, une lèvre fendue, le regard noir.

— Elle ne t’appartient pas, répéta-t-il.

Drago ne répondit pas. Il le fixa un moment, puis tourna les talons et partit en silence.

Quelques minutes plus tard, il traversait les couloirs vides du sous-sol, le pas rapide, le souffle encore court.
Il ne voulait pas rester dans le doute. Il devait lui parler.

Il trouva Louise dans un couloir près des escaliers menant aux cuisines, accroupie, apparemment en train d’examiner un plan du château avec une carte des canalisations.

Elle leva les yeux, surprise de le voir.

— Drago ? Tout va bien ?

Il resta immobile un instant, observant son visage.

— Non. Rien ne va. Il faut qu’on parle.

Elle fronça les sourcils, en refermant doucement son carnet.

— Je t’écoute.

Drago hésita, puis lâcha d’un ton sec :

— Tu passes beaucoup de temps avec Weasley. Tu lui fais confiance. Tu lui demandes de l’aide. Mais… pas à moi. Pourquoi ?

Louise le fixa, déconcertée.

— Ron m’a aidée à parler à Mimi. Et sa sœur a disparu. Il est concerné, Drago.

Il secoua la tête.

— Tu pourrais m’impliquer aussi. Mais tu m’évites. Je le sens.

— Je ne t’évite pas, dit-elle doucement. Je suis… perdue. Il se passe des choses que je ne comprends pas. J’entends des voix, j’ai des rêves, et maintenant j’ai peur de ce que je suis en train de découvrir. Ce n’est pas contre toi.

Le regard de Drago s’adoucit à peine. Un silence pesant s’installa.

— Je ne veux pas te perdre, murmura-t-il. Et je ne veux pas qu’il te vole à moi.

Louise baissa les yeux. Son cœur battait plus fort.

— Personne ne me vole à personne, dit-elle lentement. Je fais ce que je dois faire… mais ça ne veut pas dire que je t’oublie.

Elle le regarda droit dans les yeux.

— Je te promets, Drago. Je n’oublie pas.

Il resta silencieux un instant. Puis hocha la tête, plus calme. Et sans rien dire d’autre, il tourna les talons et s’éloigna dans le couloir.

Louise resta seule un instant, le dos contre la pierre froide. Le poids des secrets l’écrasait. Elle savait qu’elle ne pourrait pas les porter tous encore longtemps.