Le lendemain matin, Théo reçut un message laconique : Salut gars, viens me chercher à mon bureau quand tu veux. Faut-il que j’apporte quelque chose ?

Il répondit aussitôt : “Cool, je serai là à midi. Pas besoin d’apporter quoi que ce soit.

À l’heure dite, Victor vint chercher Jin au bureau. Théo l’attend déjà à l’arrière du véhicule. Avant de monter, Jin observe l’humanoïde au volant avec curiosité : “Wow, tu as ton propre assistant ?

- Eh oui mon ami, je te l’ai dit, il y a pas mal d’avantages à travailler pour Omni.

- Je vois ça, répondit Jin avec une pointe d’amertume. “Quand je pense à la galère que ça a été pour avoir un humanoïde pour la clinique...

- Quasiment tous les employés d’Omni ont des assistants humanoïdes.

La voiture s'élança vers la côte. Le trajet s’annonçait long, mais Théo et Jin activèrent leurs puces neuronales pour communiquer en privé, à l’abri des oreilles indiscrètes.

- Première fois dans la Plaine ? demanda Théo par transmission neuronale.

- Oui, Monsieur.

- Tu as peur ?

- Un peu. Mais j’essaie de rester positif.

- Je vois. Tu sais ce que tu vas demander à Omni ?

- Travailler à distance et d’autres trucs aussi.

- Tu veux bien me dire ? Ou tu es superstitieux ?

- Je ne dirais pas superstitieux, juste un petit peu stitieux, répondit Jin avec espièglerie.

Théo sourit malgré lui. Le véhicule s'engagea alors sur un pont interminable qui s'étendait au-dessus de l'océan. L'accélération les plaqua contre leurs sièges tandis que la terre ferme s'éloignait inexorablement. Bientôt, le dernier bâtiment ne fut plus qu'un point minuscule à l'horizon avant de disparaître complètement, comme si le monde les abandonnait sur ce ruban d'acier suspendu au-dessus de l'Atlantique.

- On y est presque, annonce Théo alors qu’une structure gigantesque apparaît devant eux, flottant majestueusement sur les flots.

- C’est incroyable... Comment cette chose peut-elle résister aux vents forts et aux courants ?

- Les humains peuvent faire de grandes choses quand ils mettent de côté leur idéologie et toutes leurs disputes.

- La cupidité n’est-elle pas leur principale idéologie ?

- Touché.

Le véhicule se gara automatiquement dans le parking de la station. Les trois hommes pénétrèrent dans la structure flottante. À l'intérieur, l'austérité régnait : un point de contrôle de sécurité lourdement gardé et une unique pièce aux portes hermétiquement closes. La puce neuronale de Théo transmit instantanément les informations requises.

- Il est avec moi. Il vient voir Monsieur Jackson.

Les gardes ne daignèrent même pas regarder Jin. Les portes s’ouvrirent à leur approche, révélant un ascenseur aux dimensions impressionnantes, équipé de sièges comme un véritable salon.

- Combien de temps jusqu’au fond ?

- Trente minutes.

- Bon sang, trente minutes pour cinq mille mètres, avec cette pression extérieure... C’est incroyable !

- J’étais aussi choqué la première fois. Cette vitesse n’est possible que grâce à ces murs ultra-renforcés. D’ailleurs, prends ça.

Théo lui tendit une pilule bleutée.

- C’est quoi ?

- C’est pour que ton cerveau supporte la pression en bas.

Jin avala la pilule sans broncher. Les parois commencèrent à émettre des grincements sourds et ses oreilles se débouchèrent progressivement.

- Ce n’était pas toujours comme ça dans la Plaine Abyssale. Mais Omni a continué d’investir ici pour rendre le forage plus efficace et faciliter les recherches.

- Combien de personnes vivent là-dessous ?

- Je ne sais pas exactement... Dix mille ? Peut-être plus. Il y a plusieurs points d’entrée, mais ici, c’est la section VIP.

- Dois-je comprendre que tu es une star ici ? taquina Jin.

- Puisque j’ai pu t’amener, apparemment oui. Je préfère ne pas imaginer comment ça se serait passé si je n’avais pas réussi.

- Content d’avoir pu aider alors.

L’annonceur grésilla : Arrivée au niveau -5000. Bienvenue dans la Plaine Abyssale.

Les portes coulissèrent et Jin resta bouche bée. Ses yeux s'écarquillèrent devant le spectacle qui s'offrit à lui. Il s'était attendu à un sinistre laboratoire souterrain mal éclairé. À la place, une véritable métropole s'étendit devant ses yeux ébahis. Le plafond formait un gigantesque écran diffusant un ciel artificiel si réaliste qu'on en oubliait presque qu'ils se trouvaient à cinq kilomètres sous le niveau de la mer.

Rassemblant ses esprits, il parvint enfin à articuler :

- Quelle... quelle taille fait cet endroit ?

- Environ sept cent mille mètres carrés. C’est comme cent terrains de football. Et des sections sont ajoutées régulièrement pour développer de nouveaux quartiers. Nous sommes un peu en avance sur l’horaire. Laisse-moi te montrer le plan.

Les lunettes de Théo projetèrent une carte holographique détaillée. Jin découvrit avec stupéfaction que cette cité souterraine possédait tout : résidences, restaurants, gymnases, bars, fermes à oxygène, stations de recyclage, laboratoires de pointe, et même des parcs artificiels et centres de loisirs.

Théo pointa le siège d’Omni sur la carte : On va là-bas. Allons prendre la navette.

Pendant le trajet, Jin observait discrètement les habitants. Une constatation le frappa.
- Ceux qui ne sont pas pâles sont des humanoïdes ou sont arrivés récemment ? murmure-t-il.

Théo hocha la tête pour confirmer.

Ils arrivèrent devant le siège d’Omni, un imposant bâtiment de trois étages qui domine tous les autres édifices. À l’entrée, un garde de sécurité intercepta Jin.

- Il est avec moi, nous rencontrons Nathan Jackson, intervint Théo.

- Très bien Docteur Garnier, simple vérification, répondit l’humanoïde en s’écartant.

Les deux hommes montèrent à l’étage et patientèrent dans une petite antichambre adjacente au bureau de Nathan. Victor se dirigea directement vers le bureau de Théo.

Prochainement : Nathan sourit à Jin. Ce sourire glacial que vous connaissez bien. Jin, lui, va le découvrir.

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