Chapitre 12

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« T’es vraiment un veinard, fit Maxine en fermant la portière de la voiture.

— Pourquoi ça ?

— J’ai rarement vu ma mère aussi aimable avec quelqu’un. Surtout pour une première fois et sachant que ce quelqu’un est en affaire avec moi. »

Maxine semblait amusée par cette dernière remarque.

« Parce que tu as déjà fait plusieurs essais ? » fit Loïc.

Maxine ne répondit pas tout de suite et donna l’impression de réfléchir.

« Oui et non. Ma mère est hostile par principe à tout être humain qui m’approche. C’est assez ridicule car en réalité, elle n’en rencontre qu’une toute petite partie, mais, pour les malheureux qui font partie de cette mini-sélection, c’est en général, une sorte de… Comment dire ? Une sorte de baptême du feu.

— C’est vrai qu’elle est très directe et ne s’embarrasse pas sur les formes quand elle veut faire comprendre les choses. Mais ce n’est pas un défaut, je trouve, fit Loïc qui essayait de se ressasser toute la conversation qu’il avait eue.

— C’est ce que je te dis. J’ai rarement vu ma mère ainsi. Je n’aurais jamais cru la chose possible. »

Loïc ne pouvait plus trop rien dire et acquiesça. Il laissa une petite minute de silence passer et puis reprit.

« Et maintenant, on passe chez toi, c’est ça ?

— C’est ça. » répondit Maxine en démarrant la voiture.

*

L'appartement de Maxine surpassait celui de Loïc en termes de taille. Situé au troisième étage du premier immeuble d'un ensemble de résidences HLM de quatre étages, il disposait de quelques garages privés au rez-de-chaussée et de vastes espaces de stationnement en surface. L'ensemble du quartier présentait une esthétique typique de l'urbanisme populaire des années soixante. La médiathèque, les crèches et les écoles témoignaient tous de cette époque et étaient facilement identifiables. L'agencement des pièces de l'appartement était quelque peu singulier. On y trouvait un vestibule d'entrée qui donnait accès directement au salon en face, à la droite se trouvait la cuisine, tandis qu'à gauche, un petit couloir conduisait aux toilettes, à une petite salle de bain, et à la chambre à coucher située à l'extrémité.

« Dépêche-toi d’entrer et de fermer la porte, fit Maxine. Sinon Oust va essayer de se barrer. »

Oust, le fameux chat dont Loïc avait moults fois, entendu parler et dont il semblait que ce dernier tenait une place très particulière dans le cœur de sa maîtresse. Et en fin de compte, il s’avéra que l’animal était vraiment atypique. Physiquement, pas de signe distinctif. C’était un petit rouquin aux pattes grises et au pelage rayé de bandes blanches. En revanche, psychologiquement, la bestiole lui apparut rapidement très perturbé. Il était à la fois craintif et agressif, feulant à bonne distance dès qu’on empiétait sur une zone qu’il avait décrétée comme étant son territoire, et par moments, il se collait dans les pattes de sa maîtresse d’une manière insistante et gênante jusqu’à provoquer une réaction énervée de cette dernière. Ensuite, il disparaissait, fier de lui.

Loïc s’abstint de faire tout commentaire mais il ne put s’empêcher de demander à Maxine si le félin se comportait toujours comme ça.

« Oui. Il est comme ça depuis qu’il est tout petit. Il n’a pourtant jamais été traumatisé par quoi que ce soit. J’ai toujours pensé qu’il lui manquait une case. Donc je lui pardonne. Un truc : si un jour, tu ouvres la fenêtre, arrange-toi pour qu’il soit dans une autre pièce, porte fermée.

— Pourquoi ?

— Parce que sinon il se jette par la fenêtre.

— Du troisième étage ?

— Oui. Il a juste eu du bol le jour où cela est arrivé. Il s’est rattrapé dans les branches de l’arbre, en face, tu vois ? »

Loïc jeta un œil au travers du rideau de la porte-fenêtre. En effet, le matou avait eu une chance insolente. Pendant ce temps, Maxine entra dans le salon et proposa à son compagnon de s’asseoir une minute sur le canapé recouvert d’un plaid rouge. Elle disparut cinq minutes dans sa chambre.

La décoration de l’appartement était fidèle aux goûts qu’avait déjà affichés Maxine en commençant à aménager celui de Loïc. Mais tout était constitué d’un vrai bric-à-brac collecté sur plusieurs années. Loïc entendit un tas de bruits étranges en provenance de la chambre et demanda donc à Maxine, si elle avait besoin d’un coup de main. En réponse, celle-ci apparut une trentaine de secondes plus tard avec un gros carton dans les bras.

« Oui, je vais avoir besoin de toi pour porter ça dans le coffre de la voiture. »

Loïc fronça les sourcils car il n’était pas sûr de bien comprendre. Maxine le lut facilement sur son visage et enchaîna :

« Ce sont quelques affaires à moi que je voudrais emmener à la maison. J’espère qu’on pourra trouver une place pour tout. »

Loïc se leva et tendit les mains pour saisir le carton. Il jeta un coup d'œil à l'intérieur et découvrit un joyeux petit bazar : un poste radio, plusieurs CD, une sorte de trousse de maquillage, deux cadres photo au format A5, parmi lesquels Loïc remarqua une photo de Maxine vêtue de manière légère. Ensuite, il repéra un sèche-cheveux, des brosses, des rasoirs, et au fond, un amas de vêtements de toutes sortes.

« Faudrait aussi que je prenne plusieurs paires de chaussures mais... » fit Maxine en prenant un air désolé.

Mais Loïc l’interrompit car il devinait sans peine ce qu’elle allait dire.

« D’accord. Prends un autre carton ou un sac. Emmène ce que tu veux et on va passer au magasin de meuble pour acheter un meuble à chaussures.

— Pour de vrai ? » fit Maxine avec les yeux brillants de joie, comme une gosse devant son cadeau de Noël.

Loïc était tout à fait sérieux. Son appartement n’était clairement pas aménagé pour toute fille qui se respectait. S’il voulait qu’elle s’y sente un peu moins comme une passagère clandestine, il fallait améliorer un peu les choses. Acheter de quoi lui permettre d’entreposer un peu mieux ses affaires semblait une bonne option.

Dans tous les cas, sa proposition eut pour effet d’euphoriser Maxine au point qu’elle finit par demander :

« Tu crois que je peux emmener mon ordi aussi ?

— Celui-ci ? fit Loïc en désignant la tour PC posée sur le bureau à côté d’un vieil écran cathodique.

— Oui, je voudrais faire des retouches sur mes photos. J’aurais plus de temps pour les faire si l’ordi est chez toi.

— D’accord, fit Loïc d’un ton un peu plus dubitatif. Il va falloir qu’on prenne aussi un meuble pour ça. Et un siège aussi.

— Je peux me mettre sur la table à manger du salon.

— Ça ne va pas être pratique du tout. »

Loïc entérina donc l’acquisition d’un petit bureau et d’un siège. Il n’avait jamais pris le temps, ni eut l’envie de faire un tel achat et pourtant c’était loin d’être inutile.

« Bah du coup, si t’as tout rassemblé, on charge tout ce bazar dans la voiture, on pose ça en vrac à l’appart et on repart faire les magasins. »

*

Le samedi après-midi fut consacré au montage des meubles. Loïc n’était pas particulièrement doué en la matière, mais l’activité réalisée avec le concours de Maxine, il trouva cela plutôt plaisant.

« Honnêtement, je n’aurais jamais imaginé que tu sois si peu attiré par tout ce qui touche au bricolage !

— Je n’ai jamais vu d’intérêt à cela, effectivement. »

Il mit un dernier coup de clé au meuble à chaussures et le souleva pour le poser dans l’entrée.

« Voilà, tu peux ranger toutes les paires de chaussures que tu as ramenées. »

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