Elle est partie.

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Voilà le coup de téléphone où ma vie a basculé.

J’ai cligné des yeux, incrédule. Elle ? De qui parlait ma mère ? Mon cerveau a tenté de rattraper ces mots, mais tout restait flou, incompréhensible. Quelques secondes de silence avaient précédé sa voix, et ces quelques secondes m’avaient déjà figée.

— Qu… quoi ? balbutiai-je, comme si la phrase pouvait se rétracter.

Le téléphone est resté collé à mon oreille, lourd, froid. J’avais compris sans même que son nom soit prononcé. Mon cœur a raté un battement, puis deux, puis trois. J’ai eu envie de crier, mais aucun son n’est sorti. À quoi bon ? Rien ne pouvait ramener celle que j’avais toujours pardonnée, celle que j’adorais malgré sa jalousie et ses blessures.

Et puis la colère a remonté, malgré moi. Ma mère. Ma sœur. Pauline. Toutes ces années où je l’avais vue choisir des chemins qui me faisaient mal, où j’avais encaissé ses jalousies et ses piques, tout en lui pardonnant encore. Et depuis un an… ce choix amoureux, ce choix de se mettre avec l’homme qui avait été mon grand amour de jeunesse… pourquoi ?

Le brouillard est tombé autour de moi. Les murs de ma chambre semblaient se rapprocher, étouffer le peu d’air qu’il me restait. La lumière du jour, claire et indifférente, filtrait à travers les volets. Comme si le monde continuait, inconscient de ma douleur. Et c’était exactement ça : le monde continuait, mais moi, je m’étais arrêtée.

Je me suis laissée tomber sur le bord de ma chaise, incapable de bouger. Chaque souvenir me traversait comme un éclair : son rire, ses reproches silencieux, ses éclats de jalousie, et ces rares instants où elle m’avait serrée contre elle comme si j’étais la seule au monde à pouvoir la comprendre. Et puis le vide, encore plus grand, plus froid. Elle n’était plus là. Jamais plus.

Quand j’ai enfin trouvé la force de parler, ma voix s’est brisée en un murmure :
— Mais… comment ?

Ma mère n’a pas répondu. Son silence était lourd, presque un reproche. Dans ce silence, j’ai entendu quelque chose de plus terrifiant que les mots eux-mêmes : l’absence. L’absence totale.

J’ai raccroché, sans vraiment savoir pourquoi. Le téléphone retomba avec un bruit sourd, comme un cercueil miniature qui venait de se refermer. Je suis restée là, immobile, regardant le plafond, me demandant comment continuer à respirer quand celle que j’avais toujours pardonnée, celle que j’avais aimée malgré tout, n’était plus là.

Le monde existait encore, oui. Les oiseaux chantaient, le café fumait dans les cuisines des voisins. Mais moi, je ne faisais plus partie de ce monde. Je n’avais plus ma place nulle part.

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