Rencontre - Partie 2
Le groupe de Léo, Marion et Jules revenait de leur soirée au centre-ville. Ils riaient, se bousculaient un peu, pleins de cette énergie bruyante des retours de soirée, la tête légère, le cœur plein. En tête, Léo ralentit soudain en apercevant les silhouettes sur le chemin. Il marqua une pause, fronça légèrement les sourcils.
Après un échange rapide à mi-voix, Jules et Marion le dépassèrent et arrivèrent à hauteur de Susie, Justin et Xavier. Ils stoppèrent, un peu hésitants.
— Bonsoir… fit Jules d'une voix incertaine, tout en lançant un regard curieux à Xavier.
— Salut, ajouta Marion, en le dévisageant un peu plus longuement. Son regard, acéré, intrigué, passait d’un détail à l’autre : les traits tirés, la posture, la clope au bord des lèvres. Son esprit analysait, essayait de valider une hypothèse fantasque : et si c'était vraiment lui ?
— Moi c’est Marion, voici Jules. On loge ici aussi, dit-elle enfin.
— Enchanté, répondit simplement Xavier.
— Vous êtes client ici ? demanda-t-elle aussitôt.
Son ton se voulait neutre, le regard resta accroché à l'inconnu. Elle le détaillait franchement à présent, sans chercher à masquer son trouble.
Xavier baissa un peu la tête, les yeux fixés sur le gravier.
— Disons que je loge ici.
À ce moment-là, Léo les rejoignit. Il souriait franchement, la main déjà tendue vers Xavier.
— Salut, moi c’est Léo. On est là pour le week-end, avec les potes, dit-il en désignant Marion et Jules d’un geste du menton.
— Enchanté, dit Xavier, toujours sans se présenter.
C'était de toute façon inutile, et il le savait bien. Xavier connaissait bien ce regard là, et cette façon de l'aborder et de s'adresser à lui comme à un vieil ami alors qu'ils ne se connaissaient pas. Léo le fixait, lui aussi, un peu trop longtemps, un peu trop intensément. Pas de doute : il l’avait reconnu.
Pour se donner une contenance, le temps de se remettre les idées en place, Léo se tourna vers Susie et Justin avec un sourire élargi :
— Et vous, les amoureux , ça peut aller ?
— On papotait, répondit simplement Justin. Bien passée, votre soirée ?
— Un bar à vin, puis un autre… puis encore un autre, lança Jules avec un clin d’œil.
Il se sentit bête, soudain, certain que tout le monde avait noté la légèreté exagérée dans sa réponse. Mais que dire lorsque l'on se retrouve, possiblement, face à lui ? Léo prit les choses en main.
— Bon, les gens, on se les gèle ! lança-t-il en tapotant ses bras.
Et puis à Xavier, il désigna d'un signe de tête la grande verrière de l'aile des hotes et ajouta avec un certain enthousiasme :
— Du coup, on avait prévu de se faire une petite fin de soirée dans la salle commune, un petit brouilly, un piano… ça te dit ?
Léo le regardait toujours, avec un mélange de curiosité sincère et de respect contenu.
— Non, il est tard, je vais vous laisser, répondit Xavier en se redressant. Sa voix était soudain lointaine, presque absente.
— Vraiment ? Même pas un verre ? insista Léo, comme s’il y croyait un peu.
Xavier leur offrit un sourire épuisé, plus poli que chaleureux.
— C’est gentil, mais non, merci. Bonne nuit à vous.
Tandis qu’il s’éloignait, rejoignant le bâtiment principal du château le groupe demeura un instant figé, le temps comme suspendu par ces mots que l’on n’ose pas prononcer.
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