Chapitre 9

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Des crissements de pneus retentissaient dans la ville de Vannes dont l’animation habituelle était éteinte par l’heure tardive. La voiture de nos héros tourna brusquement sur la droite, manquant d’emporter un feu de signalisation dans sa course. À son volant, Rom vérifiait sans cesse dans son rétroviseur si les démons étaient toujours à leurs trousses.
- On les a semés ?
- Je ne les vois plus en tout cas, répondit Sandra qui regardait à travers la vitre arrière. Tu as bien fait de t’engager dans le centre-ville.
No était enfoncée dans son siège et n’avait pas dit un mot depuis leur départ. Ses doigts étaient crispés sur le cuir de la banquette. Les voix des autres passagers résonnaient comme des sifflements dans ses oreilles. Le cri des freins la fit brusquement revenir à la réalité. L’automobile se figea au milieu de la rue, entourée de vieux bâtiments datant du XIXème siècle. Rom et Kevin fixaient le bout du boulevard, qui restaient plongé dans les ténèbres malgré les lampadaires clignotants. La voleuse s’appuya sur le siège conducteur pour voir quelle était la raison de cet arrêt.
À quelques mètres d’eux se trouvait Gericho, sous sa forme démoniaque. La bête lorgnait en direction de nos héros, tandis que leurs silhouettes se réfléchissaient dans ses yeux de prédateurs Sandra pencha la tête et aperçut à travers la vitre arrière la silhouette de dizaines de tentacules se dirigeant vers eux. Elle en informa immédiatement Romain qui empoignait fermement le volant :
- L’autre est derrière nous, et je peux t’assurer qu’elle fonce sur nous !!
- C’était un piège, commenta Kevin. Ils ont fait en sorte de nous attirer ici. Nous sommes fichus.
Rom ne broncha pas . Son regard était plongé dans celui de Gericho, qui marchait lentement dans leur direction. Alors que la peur s’emparait d’une partie des passagers, Rom sortit de son silence et ordonna à Kévin :
- Tu prends le volant ! J’ai un plan, mais c’est toi qui vas devoir conduire !
- Quoi ? Toi, un plan ? s’étonna Kevin qui ne cachait aucunement son scepticisme.
- En espérant que ça marche … Alors, ne discute pas et bouge !
Malgré sa réticence, le beubarz s’exécuta et échangea son siège avec son comparse. Gaby et Sandra les suppliaient de se dépêcher. Une fois ceci fait, Rom se tourna vers les filles alors qu’il expliquait avec un ton paternaliste :
- Quoi qu’il arrive, quand je vous l'ordonne, fermez les yeux. Il en va de votre survie.
- C’est quoi ce plan ?! S’offusqua No après avoir quitté sa torpeur. Depuis quand garder les yeux ouverts peut nous tuer ?! Puis tu vas changer de ton avec nous !
Rom poussa un long soupir d’agacement et répondit sèchement :
- Je vais vous emmener dans le monde des ombres. Je suis le seul à pouvoir voir ce qu’il s’y passe. Si jamais vous osez les ouvrir, ce qui s’y trouve vous rendra aveugle.
- Ah … souffla Sandra avec un air circonspect. Dans ce cas, je préfère me les cacher.
La réticence d’il y a quelques instants disparut et les filles se couvrirent les yeux. Rom pivota vers Kevin et lui donna des instructions qu’il allait devoir suivre à la lettre :
- Tu roules vers eux les yeux fermés, je te guiderais.
- Je ne sais pas si c’est une bonne idée, . Mais je suppose qu’on ne peut pas faire autrement, concéda Kevin.

Le conducteur prit une grande inspiration, ferma ses paupières, puis écrasa de tout son poids l’accélérateur. La voiture s’envola et fonça à toute allure en direction de Gericho, tandis que plusieurs tentacules émergeaient derrière eux.
Gericho se mit à quatre pattes tandis que ses deux dents blanches réfléchissaient la lueur des lampadaires . Il fixait le véhicule qui fusait dans sa direction ; Il était semblable à un félin qui attendait que sa proie fasse une seule erreur. Rom guidait Kevin à travers les différents tentacules qui émergeaient du sol pour les réduire en morceaux. Très vite, elles formèrent un chemin qui obligèrent nos héros à foncer tout droit dans la gueule de Gericho. Gaby, toujours les mains sur son visage, questionna le beubarz sur la situation :
- Ça se passe comment ? Ça n’a pas l’air d’être la joie ?
- Pas le temps ! Et tu ne vas pas assez vite ! Fonces bon sang !!! Hurla Rom.
Un tentacule frappa violemment le côté droit de l’automobile. Ceci eut pour effet de la faire basculer sur le côté, et de la mettre sur deux roues. Gericho saisit cette chance, et cracha un puissant laser démoniaque qui vaporisa tout sur son chemin. Rom plaqua ses deux mains sur le tableau de bord, et aussitôt la voiture se recouvrit de matière noire, ce qui la fit disparaitre juste avant l’impact. La déferlante d’énergie parcourut la rue dans sa totalité. Elle frôla même Medusa avant de percuter une boutique. La devanture explosa, les lumières des flammes illuminant le sourire dérangeant de la simili gorgone. Gericho se remit sur ses deux jambes tandis que le goudron fondu générait de la fumée autour de lui. Il fit un pas en avant, et déclara après s’être essuyé la bouche :
- Il semblerait que j’y sois allé un petit peu trop fort cette fois encore.

Au même moment, la voiture s’était téléportée dans une étrange dimension entièrement constituée d’ombres. Une multitude de portes qui menaient à la dimension de nos héros parsemaient l’endroit, mais la lumière qui s’en échappait était immédiatement dévorée par les ténèbres environnantes.
Les filles ainsi que Kevin avaient du mal à supporter les cris stridents des créatures qui peuplaient ces lieux. Rom, pendant ce temps, fixait intensément les différentes ouvertures, et espérait trouver celle qu’il cherchait. Soudain, ses yeux s’arrêtèrent sur l’une d’entre elles. Il agrippa le volant et fit brusquement virer la voiture sur la gauche, ce qui envoya les passagers arrière hors de leurs sièges. Les hurlements autour d’eux s’amplifiaient et les monstres entouraient dangereusement le véhicule. Cela obligea Rom à guider le volant toujours tenu par Kevin. Il ordonna à son partenaire de foncer aussi vite qu’il pouvait, ce qu’il fit sans rechigner. Alors qu'ils étaient quasiment arrivés à destination, le beubarz constata que les ténèbres envahissaient l'automobile et se rapprochaient peu à peu des filles qui avaient encore les yeux couverts.
Au même moment, une créature gargantuesque apparut juste derrière leur issue de secours, et essaya avec l’un de ses gigantesques membres d’écraser nos héros. C’était quitte ou double pour eux. Rom était le seul à voir les multiples dangers qui les entouraient . Mais au moment où tout semblait perdu, il remarqua un bouton caché près du siège de Kevin. Sans réfléchir, il appuya dessus, Le tableau de bord se transforma instantanément en ce qui ressemblait à une station de contrôle d’avion.
Face à cette multitude de possibilités, Rom ne savait que choisir tandis que l’immense main du monstre allait s’abattre sur eux. Dos au mur, Il se fia au hasard. Il prit une manette et la poussa vers l’avant. Sandra commenta le timide "Bang" qui retentit l'instant d'après :
- C’était quoi ça ?
Sans prévenir, deux réacteurs remplacèrent le pot d’échappement et transformèrent cette voiture familiale en un puissante bolide de course. A cause de la soudaine accélération qui suivit, nos héros furent scotchés dans leurs sièges. Rom et Kevin maintenaient tant bien que mal la voiture sur ses quatre roues tandis qu’ils transperçaient littéralement la horde de créatures qui tentaient de leur barrer la route vers la sortie. Rom retint son souffle, et finalement, ils parvinrent à fuir juste à temps, pendant que le géant écrasait violemment ses congénères à leur poursuite.

Gericho observait fièrement les dégâts engendrés par son attaque, tel un artiste devant son chef d’œuvre. Il entendit soudain sa partenaire lâcher un grognement de colère. Il se releva et croisa son regard. C’était la première fois qu’il la voyait ainsi. Ses yeux de démons étaient devenus entièrement noirs à cause de la rage, et la terre se fissurait autour d’elle. Gericho sentit une présence apparaitre dans son dos. Il se retourna doucement, et se retrouva face à nos héros qui s’extirpaient d’un portail d’ombre. Alors qu’il s’égosilla comme sa soeur, nos héros filaient peu à peu hors de sa portée. Le démon laissa exploser toute sa bestialité, puis se lança à la poursuite de fuyards. À l’intérieur de l’automobile, les filles et Kevin purent enfin se découvrir les yeux tandis que Rom surveillait ce qu’il se passait derrière eux.
Sandra, qui ne put que constater le tour de force qu’ils venaient d’effecteur, s’émerveilla après avoir le siège devant elle :
- COMMENT T’AS FAIT CA ?! JE VEUX TOUT SAVOIR !!
Rom qui était encore dans le feu de l’action, esquissa un faible sourire en guise de réponse. Il ouvrit soudainement sa portière, ce qui poussa un Kevin crispé à le questionner sur ses intentions :
- Tu comptes faire quoi là ?
- Je vais les retenir. Tu te contentes de les amener loin d’ici ! ordonna Rom qui sauta de la voiture.
Kevin et les filles tentèrent de le stopper, mais leurs cris furent très vite atténués par la distance. Le beubarz était maintenant en tête à tête avec les deux démons. Il se craqua les doigts et dit, alors qu’il les défiait du regard:
- C’est entre vous et moi mes chéris. J’espère que vous êtes prêts.
Gericho arrêta sa course, et demanda, pendant que Medusa le rejoignait :
- Je suppose que tu comptes te sacrifier pour permettre à tes amis de s’échapper ?
- Non, rétorqua le beubarz accompagné d’un signe de l'index. Ce n’est pas mon genre. Vincent ferait cela, Max peut-être si ce n’était pas un immense trouillard. Moi, j’suis plutôt quelqu’un … de méchant.
- Oh, s’étonna Medusa qui remarqua le changement d’expression dans le visage de son adversaire. Tu essayes de nous faire peur ? C’est bien tenté. J’aimerais ne pas te faire de la peine, mais vu comment tu t’en es sorti précédemment, je doute que tu ne reviennes vivant de notre affrontement …
Medusa prit une courte pause dans son discours et jeta un bref coup d’œil à la droite de Rom avant de reprendre :
- Puis notre cible se trouve juste à côté de toi.
- Hein ? marmonna Rom en fronçant les sourcils.
Le beubarz tourna la tête, et aperçu No qui lui fit un sourire gêné. Lorsqu’il vit qu’elle l’avait suivi lors de son saut du véhicule, son visage se déforma, sa bouche s’élargit et il poussa un long hurlement d’effroi.

A l’autre bout de la ville, un autre combat faisait rage. Vangog plongea en avant, et esquiva le katana de Yann qui lui frôla la joue. Le démon, en guise de représailles, attrapa son sabre et tenta de le briser. D’un coup de pied, le beubarz se dégagea comme il le put, et du très vite faire face à une nouvelle offensive de son adversaire. D’un geste rapide, Vangog parvint à désarmer notre héros qui se retrouva dans une position défavorable. Le bruit de l’épée qui chutait sur les graviers sonna comme une sentence macabre. L’assaillant ne laissa pas passer cette opportunité et accabla de coups le beubarz. Les impacts étaient si violents que leurs bruits résonnaient dans toute la rue. Le démon termina sa salve avec une puissante droite dans l’estomac du sabreur, ce qui l’envoya contre le mur derrière lui. Une partie s’écroula sous le choc, et plusieurs morceaux tombèrent tout près du combattant immobile. Pour vérifier si le sabreur était encore conscient, L’Artiste tira plusieurs lasers dans ses jambes. Comme Yann n’eut aucune réaction, le démon ne cacha pas sa déception et décida d’en finir. Il généra un orbe d’énergie démoniaque dans sa main qui teint de violet les alentours. Mais dès qu’il eut lancer son attaque, Yann reprit vie et s’élança dans sa direction. Il dévia l’attaque à la simple force de son bras, et il profita de l’effet de surprise pour ramasser son sabre. D’un pas rapide, il se rapprocha de son adversaire qui se trouva dans l’incapacité de se défendre face à la vivacité de l’attaque. Maintenant à portée, Yann se positionna avec la grâce d’un danseur. Son Katana et son corps s’unirent en une seule entité qui n’avait qu’un seul but : Faire tomber son ennemi.
Vangog baissa légèrement les yeux, et tous ses sens se mirent en alerte en croisant le regard de l’épéiste, qui devint celui d’un assassin. La lame de Yann se teint de noir, et en un éclair, il décocha une puissante estocade qui souffla les gravats dans son dos. Le démon eut juste le temps de claquer des doigts pour se téléporter afin de se mettre hors d’atteinte. Il atterrit sur le toit de la maison, d’où il vit l’attaque de Yann détruire tout ce qu’il y avait sur sa route. Cependant, l’épéiste avait disparu.
Yann profita d’un bref moment d’inattention pour se faufiler dans le dos du démon et placer une estocade en traite. Cette fois le démon ne se laissa pas duper et évita l’attaque. Il essaya immédiatement de punir cette fourberie, mais le sabreur le bloqua avec son fourreau. Les deux hommes se faisaient face, et Yann en profita pour railler son adversaire :
- Bah alors ? On dirait que ton petit numéro de force n’a pas suffi à me mettre à terre !!
Le démon ne jugea pas bon de répondre. Il repoussa le fourreau du Beubarz, esquiva une estocade défensive et lui décocha un puissant uppercut qui envoya le sabreur dans les airs. Le démon se téléporta pour atteindre la hauteur de son adversaire, et lui dit avant de conclure cet enchainement dévastateur :
- J’espère que ce petit numéro là va faire son petit effet dans ce cas.
Vangog pivota sur lui-même pour abattre un lourd coup de talon sur la poitrine de Yann. Par réflexe, le beubarz para l’attaque avec son sabre, mais la simple pression du mouvement suffit pour l’envoyer s’écraser plus bas. Il heurta le sol qui trembla sous l’impact. Vangog déclencha une salve d’énergie que Yann parvint à esquiver en exécutant plusieurs roulades sur le côté. Le monstre se téléporta à nouveau derrière le sabreur. Celui-ci était aux aguets, et il se retourna avant que son opposant ne puisse l’atteindre. Il lacéra la poitrine du démon et l’obligea à se retrancher sur les toits.
Vangog, depuis son promontoire, toucha sa poitrine. Il observait le sang qui coulait lentement le long de ses doigts fins. Ses yeux blancs se tinrent de rouge et l’expression de son visage devint celle d'un homme poussé dans ses derniers retranchements. Le cri de rage qu'il poussa était si puissant qui Yann dut planter son sabre dans le sol pour ne pas s’envoler. Bon nombre des vitres du quartier volèrent en éclats tandis que Vangog s’enveloppait d’une fine aura violette. Cette dernière agissait comme une armure, épousant les contours du démon et empêcha notre héros d’interférer. Puis tout s’arrêta.

Le monstre, avec son stoïcisme habituel, déclara après avoir poussé un long soupir :
- A partir de maintenant, je vais tout donner à cette personne à qui je dois tant.
- A qui tu dois tant ? s’étonna Yann qui relâcha sa posture défensive. Tu n’essayerais pas de me faire verser une petite larme ?
- Tu ne peux comprendre, répondit sèchement son adversaire avec une expression à la limite de la mélancolie. Je dois tout à cet homme.
-
Un Vangog d’une dizaine d’années plus jeune se trouvait dans une ruelle sombre, prit à parti par des démons plus vieux que lui. Ces derniers se moquaient de lui, le bousculèrent puis finirent par le rouer de coups. Les cris et les supplications du jeune garçon ne purent invoquer leur pitié. Comme il n’avait pas la force de se défendre, il encaissa les coups. C’était l’unique chose qu’il savait faire. Soudain, une lumière rompit les ténèbres crasseuses, et les bourreaux s’écroulèrent les uns après les autres. Vangog, dont la douleur suite aux coups s’était estompé, rouvrit les yeux. Il vit face à lui un démon très âgé, une canne à la main. Il ne parvint pas à distinguer le visage du démon, sa vision ayant été endommagée à cause de son passage à tabac. Il sentait pourtant quelque chose se dégager de ce démon, un sentiment qui vous pouserrait à le suivre jusqu’au bout du monde. L’homme se baissa, lui tendit la main et lui dit d’une voix rassurante :
- C’est fini. Ils ne sont plus là. A partir de maintenant tu es en sécurité.
Vangog, d’abord méfiant, se recula de quelques mètres pour finalement se retrouver dos au mur. L’homme se rapprocha doucement du jeune démon, et s’agenouilla à nouveau. Vangog vit pour la première fois de sa vie une expression bienveillante à son égard. Après une légère hésitation, il demanda à son bienfaiteur :
- Qui êtes-vous ?
Le vieil homme posa sa main sur l’épaule du garçon, et lui répondit avec un grand sourire :
- Ne t’inquiète pas. Je suis quelqu’un qui te veux du bien.

- Depuis ce jour, j’ai juré de le servir sans jamais faillir, expliqua Vangog. Il a été capable de me transformer en l’arme que je suis aujourd’hui, et je ne laisserais personne salir son image, surtout pas cette humaine. Laisse-là moi et j’épargnerais ta vie. Tu pourrais même rejoindre nos rangs.
- Je vois, rétorqua Yann alors que son sabre tournoyait dans sa main. Je dois admettre que c’est une très belle histoire, mais malheureusement, je ne peux accepter ta proposition. Car moi aussi j’ai quelqu’un que je ne peux décevoir.
Le beubarz adopta une posture plus agressive, puis cacha son visage derrière sa lame immaculée. Le démon posa un genou ainsi qu’une main sur le sol, et il dit avant de disparaitre :
- Dans ce cas … Je vais devoir t’éliminer.

Il se transporta derrière Yann et déploya une droite robuste chargée d’énergie maléfique. Son adversaire se retourna et la para avec son katana, mais sous la puissance du coup, le métal dont était fait la lame vibra, comme s’il était sur le point de céder. Cela perturba Yann qui ne s’attendait pas à une telle force, et Vangog en profita. Il se baissa puis agrippa violemment le beubarz au niveau du ventre. S’en suivit un chaos sans nom. Le démon multiplia les téléportations pour désorienter Yann. Ainsi, ils se transportèrent de lieu en lieu, passant d’un entrepôt délabré à un magasin de vêtements pour ensuite finir au-dessus du vieux port de la ville. Les deux adversaires semblaient flotter comme des nuages. Ils surplombaient les habitants inconscients de ce qu’il se déroulait au-dessus de leurs têtes.
Yann tenta à maintes reprises de se dégager, mais l’étreinte du monstre était bien trop forte. Le démon qui se trouvait en position de force, ironisa le refus de sa précédente proposition par le spécial :
- Tu aurais dû accepter mon offre. Mon maitre aurait apprécié recruter un fier guerrier comme toi !
Yann, malgré les circonstances, ne perdit pas pour autant sa répartie :
- Primo, je ne pense pas faire un très bon soldat et secondo, Je n’ai pas pour habitude de pactiser avec des zozos dans votre genre.
- Rester sur ses convictions malgré une mort imminente … Tu m’impressionnes. DOMMAGE QUE CA NE TE SAUVE PAS LA VIE !
Le démon le retourna, lui attrapa la jambe puis se mit à tournoyer sur lui-même. Rapidement, les sens du beubarz furent brouillé et ces multiples rotations le rendirent amorphes. Après de longues secondes, il sentit la pression autour de son tibia diminuer. Un long sifflement perça ses oreilles, jusqu’à ce que son entrée dans l’eau ne vienne l'interrompre.

Vangog ne se contenta pas de cette seule attaque . Alors que les saoulards encore debout et les promeneurs tardifs se réunissaient pour voir qui avait plongé à une telle vitesse dans le port , le démon écarta les bras. De multiples particules l'enveloppèrent, pour ensuite se répandre autour du port. Des choses diverses et variées se mirent à disparaitre. Ça allait des bancs de pierre aux voitures stationnées prêt des docks, et tout cet amas d’objets réapparut dans les cieux. Ainsi, une multitude de débris commencèrent à tournoyer dans le ciel, ce qui forma une énorme ceinture de débris qui entoura le démon. Il leva la main, et aussitôt, les différents objets se chargèrent d’énergie. Tous ces déchets devinrent ainsi des bombes à retardements.
Ses yeux fixés sur le point de chute de Yann, il n’attendait qu’une chose : Voir notre héros réapparaitre et l’achever avec une pluie de feu. Il voulait voir de l’amertume si le visage d’un Yann incapable de défendre sa ville. La police qui venait d’arriver sur place ne parvint pas à contrôler les quelques badauds qui se bousculaient pour sauver leur peau.
Durant un instant, les combats entre les artistes et les beubarz se stoppèrent, tandis qu’ils observaient cette pluie destructrice menacer la ville.

Yann pendant ce temps coulait peu à peu dans les eaux du port. Alors que l’inconscience l’enveloppait peu à peu et que la silhouette de Vangog devenait floue, un étrange souvenir lui revint en mémoire.
Yann, à l’époque âgé d’une quinzaine d’années, était assis sur un banc qui offrait une vue incomparable sur le Golfe du Morbihan. Il empoignait fermement son katana, et il essayait de cacher sa tristesse. Cependant, il finit par craquer et laissa explosa sa détresse. Il jeta son sabre à la mer alors qu’il hurlait des injures vers le ciel.
Puis il retomba sur son siège. Il plongea son visage dans ses mains et tenta d’essuyer les quelques larmes qui essayaient de s’échapper de ses yeux. C’est à ce moment-là qu’il sentit une présence s’installer à ses côtés. Il écarta les doigts, et vit son katana entre les mains de l’individu. Il leva la tête et reconnu Max qui observait la mer sans dire un mot, tandis que les autres beubarz attendaient à une dizaine de mètres plus loin.
Yann détourna le regard, et il avoua, le regard plongé dans ses chaussures :
- J’ai échoué. Je n’ai pas eu la force de continuer.
- C’est ce que j’ai cru comprendre, rétorqua Max qui contemplait le vol d’un oiseau.
- Je n’ai plus le droit d’être à vos côtés, grommela Yann qui se frottait les yeux. J’aurais dû prévoir que ça allait se dérouler ainsi. Ils avaient raison depuis le début.
- Moi je ne pense pas qu’ils avaient raison, ils n’ont pas su reconnaitre ta valeur, répliqua Max. Tu n’as pas besoin d’eux pour atteindre ton objectif.
- Quoi ? souffla un Yann surpris par sa réponse. Mais je suis obligé de passer par là, J’ai passé des années à suivre cet entrainement et …
- Dans ce cas tu trouveras une autre voie, l’interrompit Max après avoir posé le sabre sur le banc. Dans mes souvenirs, Yann n’est pas quelqu’un qui se laisse faire face à des vieux hommes aigris incapable de voir plus loin que leur nez. Tu leurs montreras qu’ils avaient tort de ne pas croire en toi, car je … Car nous savons que c’est le cas.
Max lui sourit, se leva, fit volte-face, puis marcha en direction des autres qui avaient tenté d’espionner la conversation sans grand succès. Yann observa son compagnon de toujours s’éloigner. Il hésita quelques instants, puis il agrippa son katana, et se lança à la poursuite de ses amis. Il les somma de l’attendre, car maintenant son cœur était rempli de détermination. A partir de cet instant, il savait qu’ils étaient loin d’être débarrassés de lui.

Yann rouvrit soudainement les yeux et se mit à nager dans tous les sens. Par miracle, il était toujours agrippé à son sabre. Malheureusement, l’air commençait à manquer et il se trouvait au bord de l’asphyxie . À travers les vagues de cette eau agitée, il contempla une chose similaire au jugement dernier prêt à s'abattre sur lui. Malgré le manque d’oxygène, il parvint à reprendre sa concentration et à invoquer son instinct de guerrier. Il prit appui au fond du port, serra de toutes ses forces le manche de son sabre, et utilisa toute la puissance qu’il lui restait dans ses jambes pour se propulser hors de l’eau. Une fois extirpé de de cet environnement crasseux, il fut confronté à une situation désespérée : Sa ville sous la menace d’une pluie d’astéroïde démoniaque.
Vangog était abasourdi par le retour inespéré du beubarz, et ne put s’empêcher de reconnaitre la valeur de son adversaire. Malgré cela, il se voyait déjà victorieux, et en profita pour narguer Yann :
- Finalement tu n’es pas resté crevé dans ton trou à rat. Ça va être beaucoup plus plaisant de te tuer devant une telle audience. Je dois admettre que tu es coriace, mais malheureusement pour ces gens, tu arrives bien trop tard, tu ne pourras pas les sauver.
Yann, qui affichait un air détaché, répondit nonchalamment :
- Personnellement, Je n’en ai rien à faire de ces gens ! Ce que je veux, c’est mettre un terme à notre combat.je n’ai pas besoin de pom-pom-girls pour me faire gagner.
- Humain prétentieux ! Mettre fin à notre combat ! Sottises ! riposta Vangog les bras écartés Essaye déjà de survivre à cela !
Le démon baissa les bras et dès lors une pléiade d’objets s’abattit sur le beubarz. Ils fendaient le ciel à une vitesse hallucinante. Les nuages semblaient se déchirer avec ces multiples trainées ardentes. Mais alors qu’ils étaient sur le point de percuter notre héros, Yann hallucina et vit Vangog changer d’apparence. Il devint un homme d’une quarantaine d’année doté de longs cheveux noirs. Ce dernier semblait toiser avec dédain l’épéiste. Le courage se transforma en détermination et notre héros s’exclama de toutes ses forces :
- PLUS JAMAIS JE N’ECHOUERAIS !!!!!!
Sa lame s’enveloppa d’un blanc translucide. Et pendant qu’il la bougeait de gauche à droite, il hurla avec une voix qui sembla résonner dans tout le port :
- TRANCHANT GARGANTUESQUE !!!
Ce qui suivit resta longtemps dans les mémoires. Un flash lumineux rompit la torpeur de la nuit, et l’immense onde tranchante qui s’échappa de son épée absorba tout sur son passage. Chaque débris qu’avait envoyé le démon fut assimilé par cette formidable offensive. Vangog tenta de faire exploser les déchets mais aussitôt, les déflagrations furent englobées par l’attaque sans avoir pu faire le moindre dégât.
Son attaque totalement annihilée, Vangog se retrouva face à l’onde de Yann qui se mouvait peu à peu dans sa direction. Le démon décida d’utiliser sa téléportation pour fuir, afin de mieux prendre son ennemi par surprise. Il essaya une fois, deux fois, puis une multitude de fois, mais rien ne se produisit. Son énergie était ingérée par la technique de Yann, qui l’empêchait de se transporter hors de ce mauvais pas. Il était piégé, et devait maintenant se battre pour sa vie. Il tenta de dévier l’attaque de ses propres mains, mais cela n’eut que pour effet d’entrainer la désintégration de ses membres. Mais il n’abandonna pas, ayant pour moteur sa foi et sa fidélité sans faille pour Pikasau. Malgré la douleur, il risqua une ultime manœuvre. Il ressembla tout l’énergie qu’il lui restait, et déploya une immense vague d’énergie, avec son corps pour épicentre.
Les deux techniques se repoussèrent, générant de fortes bourrasques de vents qui bousculèrent les gens n’ayant pas encore pu évacuer les lieux. Celles-ci renvoyèrent Yann à la mer. Une explosion surpuissante déchira le ciel vannetais. Puis le calme revint, comme si rien ne s’était passé.
Yann sortit de l’eau, remonta sur la terre ferme. Il cracha de l’eau, manqua de s’évanouir puis se releva face à une foule d’inconnus qui le dévisageait. Sans y prêter attention, Il se tourna vers les eaux ports, et les sondait du regard, comme s’il y cherchait quelque chose. L’un d’eux tenta de l’attraper par le bras pour le remercier, mais Yann le coupa immédiatement dans son élan avec un geste d’un doigt :
- N’essaye même pas !
Mais pendant qu’il réprimandait ce passant, il sentit une présence non loin de lui. Le beubarz poussa le pauvre bougre d’un mouvement rapide, et se mit en position d’attaque. Il se trouva nez à nez avec Vangog dans un piteux état. Il avait perdu ses deux bras, un œil et une bonne partie de son corps était brulé. Il se mit à tituber en direction de Yann tout en marmonnant :
- Je dois …. Gagner … Je dois … tuer … la fille.

Yann fit signe aux badauds de reculer tandis que le démon était quasiment à son niveau. Soudain, le monstre trébucha et allait tomber sur le sol sans pouvoir se rattraper. Le sabreur l’agrippa juste avant qu’il ne percute le sol, et le posa délicatement sur les pavés vannetais. Malgré ses difficultés à respirer, il parvint à demander à l’épéiste :
- J’ai échoué … N’est-ce pas ?
- Tu n’as pas échoué, rétorqua Yann qui lui tenait là tête. Tu es tombé sur plus fort que toi.
- Je vois … acquiesça Vangog tandis que ses yeux se fermaient. Toi aussi, tu avais des personnes à ne pas décevoir.
Yann laissa échapper un léger sourire et ne put qu’infirmer ses dires :
- En effet. On peut dire ça comme ça.
Le démon ne répondit pas. Les dernières onces de vie avaient quitté son corps. Son visage était marqué par une étrange sérénité, ce qui perturba même un homme stoïque comme Yann. Il se remit debout avec le corps du démon dans ses bras, et se dirigea vers les policiers. Une fois près d’eux, il leur donna des consignes claires :
- Faites-en ce que vous voulez … et dites a Demetrius qu’on s’occupe de tout. Et n’abimez pas son corps, sinon vous aurez affaire à moi.
Yann n’attendit même pas une réponse positive des agents. Il leur tourna le dos et se dirigea vers la maison avec une seule idée en tête : En finir avec ces combats.

Pendant à ce temps, à plusieurs rues de là, Rom et No étaient cachés dans une des allées discrètes de Vannes. En effet, Afin d’éviter qu’elle ne soit blessée durant l’affrontement, le beubarz préféra organiser une retraite, tout ceci dans le but d’élaborer une meilleure stratégie.
Le spécial faisait le guet pendant que sa compagnonne de fortune reprenait son souffle. Après s’être assuré que personne ne les avait suivis, il se dirigea vers elle et la réprimanda pour sa prise de risques :
- Pourquoi tu m’as suivi ?! Ces mecs veulent te faire la peau et la seule chose que tu trouves à faire, c’est te jeter dans leur gueule.
No se remit brusquement droite et répliqua, pendant son index le pointait agressivement :
- Et pourquoi ? ce n’est pas ce que tu allais faire ? Tu parles de moi mais tu fais la même chose !
- PARCE QUE MOI J’AI DES POUVOIRS !!! MOI JE PEUX ME BATTRE !
Le visage de No s’assombrit. Les yeux humides, elle lui répondit :
- Je n’y peux rien si je suis née comme ça …
Rom, qui compris qu’il avait dit une bêtise, essaya de calmer le jeu :
- Nan mais je …
- Tais-toi, coupa sèchement No. Ça ne sert à rien. Tu as raison. Je ne suis qu’un poids. Tout ce que je sais faire de bien, c’est voler.
Un silence pesant s’installa, puis Rom la questionna pour rompre le silence :
- Tu parles de Voler ... C’est à cause de ça que ces types te courent après ?
No ne répondit pas immédiatement. Mais au moment où Rom allait ajouter quelque chose, elle expliqua avec une certaine gêne :
- J’ai toujours été douée pour ça … Et donc un prestataire du baron m’a contacté pour voler une œuvre d’art dans un musée. Le portrait D’Emilie-Bernard. C’était un boulot simple, mais je ne devais pas échouer, car il voulait à tout prix s’approprier cette œuvre. Je me suis infiltrée dans les lieux, mais je n’étais pas seule. Il y avait des types, vêtue de capes noires avec un œil rouge dans le dos. Ils ont massacré tout le personnel des lieux, j’ai réussi à me sauver de justesse. C’étaient des monstres. Ils ont fait porter le chapeau au Baron, qui lui-même me considère comme responsable, car il croit que c’est moi qui ait tout monté pour garder la toile.
Rom semblait s’être attardé sur un point de l’histoire de No et l’interrogea à ce sujet :
- Tu dis qu’ils avaient un œil rouge dans le dos … Est-ce qu’il avait une sorte de pentacle dans son iris ?
- Oui. Comment tu le sais ? S’étonna No pleurait alors qu’elle se remémorait cet événement traumatisant.
Rom s’apprêtait à donner une réponse mais la silhouette de Médusa les interrompit, ce qui poussa les deux fuyards à trouver une nouvelle cachette.

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