Tensions et coups fourrés

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Je savais que ce séjour allait me peser. Devoir partager son quotidien, ainsi que ses repas et ses soirées avec des invités lunatiques, ce n’est pas de tout repos ! Pire encore, cela transforme une maisonnée à l’ambiance digne d’un cimetière en véritable foire. Les tensions étaient constantes entre nos invités Français et Italiens pour qui, le simple fait de se croiser dans les couloirs donnait visiblement de l’urticaire, et provoquait une dispute pour un vulgaire regard en biais. Même si chaque famille causait des problèmes, il fallait tout de même souligner que les Morosini et les De Montreuil étaient les plus virulents. En à peine deux jours, ils s’en firent des vertes et des pas mûres, frôlant souvent la violence physique ! Lors d’un dîner, au cours d’une dispute entre les deux familles, Armand De Montreuil avait jeté son verre de vin épicé au visage du mari de la comtesse Morosini, après que ce dernier l’ait insulté en italien. S’en étaient suivi un échange de noms d’oiseaux très variés, puis un départ précipité dans leurs chambres respectives. En guise de représailles, la comtesse avait vidé la fiole de parfum d’Armand pour la remplir d’essence d’ail et de vinaigre volée dans les cuisines. Les vêtements du comte furent ainsi imprégnés pendant des jours ! Fou de rage, De Montreuil avait acheté des vessies de poissons séchés pour ensuite les glisser sous le matelas du couple Morosini. L’horrible odeur marine avait contraint la famille à changer de chambre. Margaret Blyth se tirait constamment les cheveux, obligée d’effectuer du nettoyage intensif tous les jours, ses lamentations résonnant dans toute la demeure. Quant à Réginald Ashworth, qui devait répondre à toutes leurs demandes, même les plus grotesques, il passait son temps à arpenter les couloirs, courant des chambres aux cuisines. Les familles De La Rivière et Bardi, même si elles se détestaient ouvertement, ne tombaient pas dans de tels excès. Benedict Crowe et Ewan Tressel passaient leurs journées à préparer les repas, ainsi que des en cas à la demande des invités. Rowena Clay, notre palefrenière, qui avait accompagné le couple Bardi pour une balade à cheval, avait reçu le courroux de Lorenzo, après la chute dans une flaque de boue de son épouse, causée par une réaction inhabituelle de son destrier. Même Père, qui n’était pas revenu sur l’incident du soir de la réception, m’avait avoué se sentir démuni. Devant un verre de cidre, il m’avait expliqué que les échanges autour de l’ouverture des routes marchandes étaient tumultueux. Isolde Marrowe, qui ne semblait pas affectée par toute cette agitation, était régulièrement sollicitée de toutes parts. Fort heureusement, elle trouvait toujours le temps de me visiter le soir, afin que nous puissions poursuivre son portrait, qui progressait rudement bien ! Un détail m’avait interpellée, dans toute cette cacophonie. Chaque soir, avant le début du dîner, l’herboriste offrait à Père un bouquet confectionné par ses soins. Souvent de la lavande ou des œillets rouges. Plus troublant encore : lorsqu’il s’agissait d’œillets, ils se rendaient dans les appartements ducaux après le repas. Isolde y restait une dizaine de minutes avant de repartir comme si de rien n’était. Que pouvait bien signifier ce rituel qui s’était installé entre eux deux, et qui semblait être un secret fichtrement bien gardé ?

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