Chapitre 9°) La baguette magique
- Avant tout, comment les vampires pouvaient savoir que je protégeais ce qu'ils convoitaient ?
Anubis soupira :
- Oh, c'est bon, je me suis peut-être trompé... Si c'est le cas, ça veut dire que ces saloperies sont plus dangereuses que ce que je pensais. On verra ça plus tard, j'ai besoin que tu te téléportes là où j'ai besoin de toi.
Pour éviter que les garçons n'apprennent l'adresse, le nom du "Désert des Plaintes Eternelles" ne résonna que dans mon esprit.
Je cherchai l'information dans les souvenirs de Luka et de Bobby. Je recopiai donc son sort de "Téléportation". Je conjurai la rune en forme de "S" inversé et couché.
Pour ce faire, j'envoyai la spectaculaire énergie qui m'avait permis de désintégrer les vampires à la rencontre de l'arbre magique que Luka visualisait quand il incantait ses sortilèges.
Thème de la Zone Zéro (Area Zero en anglais), "Pokémon Ecarlate et Violet" par Toby Fox, arrangé par Go Ichinose :
En moins d'une seconde, les poussières dorées, parsemées de plusieurs arcs-en-ciel flamboyants, émanèrent de l'intérieur de mon corps.
Ces feux d'artifice composant mon aura se sont changés en arcs électriques violets et roses. Sous la forme d'une boule de foudre, cette force magique m'a aspirée dans son cœur gris plomb et argenté.
Je venais donc de me téléporter jusqu'à un endroit que j'avais vu dans l'esprit de Luka et de ses amis.
Je me trouvais dans un phare.
En regardant par la fenêtre, je vis qu'il faisait nuit, le blizzard soufflait. Au centre de la pièce, une tour métallique était connectée à quatre cages sphériques par des tuyaux emplis de liquide rouge brillant.
Au-dessus de la tour, flottait un gigantesque rubis en forme de suppositoire gros comme un camion. Cette pierre brillante projetait une étrange aura me rappelant des tentacules. L'une des décharges d'énergie qu'elle offrait aux quatre cages métalliques gicla sous la forme de plusieurs piquants noirs.
- C'est une centrale nucléaire ? demandai-je.
- Par où commencer ? réfléchit l'esprit divinisé à haute voix.
L'entité immatérielle fit apparaître ses souvenirs. Sa télépathie me transmettait les sons et les images auxquelles il pensait :
Je voyais l'espace.
Je découvris le vrai visage de galaxies, d'exoplanètes et de comètes que je n'avais jamais vues.
Anubis me montra aussi le combat qu'il avait mené contre un démon composé de nébuleuses, on aurait dit la version "hentai tentaculaire" de la Voie Lactée. Au moment où l'intersidéral esprit fut mitraillé d'explosions, il tenta de réagir en transformant la lance dont il était équipé en rayon de pure énergie.
La rafale bleu foncé crépita, puis projeta ses vagues incandescentes. L'éruption de ces dernières se répandait dans toutes les directions. Les yeux de la divinité Nord-Africaine auraient pu sortir de leurs orbites.
Il n'y avait aucun sol pour accueillir la chute de sa mâchoire. Tout l'univers venait d'être rayé de la carte :
- Honnêtement, je ne sais même plus si c'est ce jour où je me suis décidé à cacher cette baguette, mais...
- Oh, bordel, ça a tué, combien de gens, cette explosion ?
Anubis se dépêcha de me rassurer :
- Non, rassure-toi, ce n'était qu'une dimension inhabitée, il n'y avait même pas de morts-vivants. Ni d'esprits. Seule l'entité que j'ai combattue est morte ! Je n'avais perçu ni âme, ni conscience !
- Et qu'est-ce qui me dit que vous n'avez pas éradiqué une nouvelle espèce ou "une forme de vie" qui aurait dépassé même notre compréhension de la vie.
- Tu tiens vraiment à ce que je sois tourmenté par cette pensée pour le reste de l'éternité ? A moins que je me fasse tuer avant ou que je m'avère finalement pouvoir mourir de vieillesse... Bon, reprenons !
La créature-chacal s'éclaircit la gorge.
- Euh… Vous respirez ?
Le sorcier divinisé répondit :
- Dans la dimension où je me trouve, oui. Ce que tu as devant toi n'est qu'une projection astrale... LAVIE ! Je te prierai d'arrêter de digresser.
- Pardon, pa... Tron.
La vache ! J'avais failli l'appeler "papa"...
- Comme je le disais, j'ignore si ce cataclysme a motivé mon geste, mais le fait est que j'ai décidé qu'il valait mieux cacher la relique qui se trouvait dans mon arme. Fort heureusement pour moi, les humains la prirent pour un "dieu", tout comme moi, d'ailleurs.
Anubis me montra le rubis géant alimentant quatre grilles sphériques.
Il flottait au-dessus d'un cylindre.
Anubis me révéla ce que Lennox appelait "sa clé", un talisman placé au milieu du cristal rouge géant.
Je pensai à la moitié d'un bijou, on aurait dit un pendentif doré, monté d'une demi-sphère coupée en deux.
Le chacal envoya sa pensée prendre possession du rubis, il le transforma en un liquide flamboyant et fit léviter le médaillon hors du cristal, ce pendentif doré flottait devant moi.
Tout en laissant la gemme colossale redevenir solide, Anubis me regarda :
- Lavie... J'ignore pourquoi ces brigands en ont après les cristaux, mais le fait est que mon...
Il essuie des larmes, je le vois bien.
- Erreur est en danger... Tel est notre pacte, protège ces huit trésors et je m'engage à protéger ta famille et à te laisser tes pouvoirs féeriques.
Je réfléchis...
J’observai l’hologramme représentant le mur de diamant contenant les six gemmes restantes.
Je devais protéger sept boules de cristal et un médaillon, qui apparemment était en réalité une baguette destructrice d'univers.
Anubis précisa :
- Tu peux refuser et redevenir humaine, mais si je te laisse te métamorphoser... Il n'y aura aucun retour en arrière... De plus...
Le chacal prit son inspiration :
- Tout ce que je te demande, c'est de trouver quelqu'un de plus compétent. Et si tu le désires, tu peux rester mortelle, tout en conservant tes pouvoirs psychiques.
Le marketing était l'âme-sœur d'Anubis !
- Qu'est-ce qu'on attend ? demandai-je.
L'écho télépathique que me projeta le chacal humanoïde m'évoquait un gigantesque :
- QUOI ?!
La divinité Egyptienne me transmettait d'autres pensées, il ne les formulait pas. Il m'incitait à réfléchir, à me remettre en question. Je m'exclamai :
- J'accepte votre offre ! Féerisez-moi ! F... "Féerifiez-moi" ? Bref, transmutez-moi !
La créature se frotta les yeux, je pus lire un mélange de sérieux, de déception, de confusion et de dépit. Il pencha légèrement sa tête sur le côté. Ses oreilles se baissaient. C'était mignon !
Je regardai mes pieds, il me prévint que j'avais toujours un peu de temps, il comprenait que me demander de protéger une arme nucléaire qu'il n'avait pas la possibilité de défendre sans ça pouvait être déstabilisant.
Anubis fit apparaître l'image de celle que les mortels avaient appelée "Fée Morgane". La sorcière avait été une métisse, son père ayant du sang de fée.
Contrairement à ce que certains artistes aimaient faire croire, la légende Arthurienne ne finissait pas sur une note heureuse, la sœur de Morgane, Morgause (ou Anne chez les mortels), avait abusé de ses pouvoirs, puis de leur demi-frère. Mordred naquit de cette union.
Le roi Arthur et son fils incestueux s'entretuèrent. Morgane dut donc transporter son frère mourant jusqu'à l'Île d'Avalon...
Pour apaiser le chagrin du massacre de sa famille, la sorcière abandonna complètement son humanité.
Morgane était certes une métisse qui avait juste renoncé au sang de ses ancêtres, mais le fait était qu'elle n'en avait plus rien à faire de sa sœur, de leur demi-frère ou de son neveu.
Je fis appel à mes capacités intellectuelles. Anubis sursauta, non pas parce qu'il m'en pensait incapable, mais parce que quelque chose l'appelait, il se hâta :
- Ecoute, je te laisse un peu de temps, ça fait un moment que je traque "une ennemie" et là, je suis enfin dans la bonne dimension.
Anubis se moquait bien que je comprenne ses mots, il allait avoir le temps de développer.
Je m’enfonçai dans les abysses de l’introspection.
Lennox avait abordé ce sujet dans ses textes. Les mortels, du fait de leur fragilité, avaient consacré un pan entier de leur art et du reste de leur culture à glorifier cette fragilité.
N'importe qui rêverait de posséder des superpouvoirs, de se transformer en animal, de chanter pour envoûter les gens, d'exaucer les désirs de ses êtres chers, de voler à travers l'espace ou de traverser les murs, mais c'était impossible.
L'inconscient collectif voulait que de tels rêves doivent être réprimés. Il voulait que le "besoin" soit la conformation à la faiblesse.
Les artistes et créateurs de mythes engendraient alors toutes formes d'allégories et de contes afin de montrer la futilité qu'ils voyaient dans la quête de ces désirs.
Et parmi tous ces pouvoirs fantasmés, l'un d'entre eux était devenu tabou : l'immortalité !
J'avais grandi en voyant des auteurs trouver tous les prétextes possibles pour diviniser la mortalité et l'humanité tout en faisant apparaître leurs opposés comme des aberrations.
Certains artistes choisissaient d'accompagner ces tabous de la perte de toute moralité ou d'émotions, de prétendre que leurs détenteurs ne pouvaient être que des criminels n'ayant gardé que le pire de l'humanité.
D'après Lennox, la perte de son identité et de son esprit s'accompagnait de souffrances, mais il remettait en cause la négativité de ce phénomène. Il savait que c'était la conséquence de la métamorphose en monstre, mais avait toujours observé que les personnes cessant d'être humaines finissaient par ne plus se soucier de ça.
Le besoin et le désir...
Deux notions bien énervantes.
Du fait de ma condition, être humaine avait toujours été un calvaire.
Ne serait-ce que du fait de mon esprit condamné à perpétuellement passer du coq à l'âne !
Au moment où je me demandai quelle conséquence une métamorphose définitive, un prénom me sauta aux yeux : Carla !
Même si elle s'avérait être une dhampiresse ou une vampiresse, je ne pouvais pas lui faire ça.
Anubis finit par réapparaître, sa projection astrale semblait essoufflée :
- Lavie... Mon ennemie recherche ses cristaux.
- C'est quoi, exactement ? réfléchis-je.
- Oula... Disons que si je devais la définir, je dirais qu'il s'agit d'une "heure"...
- L'une des filles de Zeus ? m'étonnai-je.
- Non... Une heure au sens propre du terme. C'est pas facile à expliquer à quelqu'un qui n'a pas l'habitude de voyager de n'exister que dans une seule dimension... Tu vois c'que c'est un "Wechuge" ?
- Un genre de Wendigo ?
Le chacal se gratta la tête :
- Plus ou moins. Bref, ça fait des éons que je voyage à travers les différents plans d'existence pour découvrir que plusieurs formes de "vie" fuient une créature temporelle.
Les mots ne pouvant que difficilement exprimer ce qu'Anubis savait, la télépathie et l'empathie prirent le relais.
Je ne pouvais que le comprendre. Vous aurez en effet remarqué que je ne savais pas communiquer.
Le chacal me montra donc ce qu'il avait perçu, il s'était téléporté de monde en monde, là où l'esprit humain ne pouvait pas concevoir le moindre élément où la moindre réalité, il avait assisté à plusieurs destructions.
Là où la créature qu'il traquait passait, des territoires ou des phénomènes disparaissaient.
Anubis avait déjà essayé de rencontrer cette "chose", lui avait parlé, mais elle le fuyait.
Il voulait juste s'assurer que cette puissance destructrice ne tente pas de s'en prendre à des innocents. Il avait l'impression d'être un homme qui aurait rencontré une éruption solaire douée de pensée. Comment pouvait-il savoir ce qui arriverait si cette entité arrivait à se matérialiser dans une dimension habitée ?
Pendant qu'il essayait d'entrer en contact avec ce phénomène inconnu, ou juste de combattre ses capacités dévastatrices, Anubis avait besoin de quelqu'un pour garder les cristaux dont elle n'arrêtait pas de parler.
- Lennox a pratiqué les mêmes expériences sur la baguette que sur les pierres précieuses, je pense donc qu'elles sont liées et que cette "chose" pourrait essayer de la voler.
- Et donc, cette "heure", c'est un "Wendigo" ?
- Les mortels ont donné le nom "Wechuge" à ce phénomène, mais la plupart des gens au courant de notre existence parleront de... "Non-Êtres"... Sans vouloir t'offenser, j'ai un énorme problème, une enquête à mener. Donc, veux-tu devenir une fée ?
- Je vais mourir ? demandai-je.
- Je... Je ne suis pas doué pour ce genre de réflexions philosophiques poussées, désolé... Dans un sens... Oui… Je suppose.
- Dans un sens, je... ?
Je soupirai, puis acceptai.
En voyant mon regard, Anubis céda.
Aux dernières nouvelles, je n'avais pas envie de laisser un espace-temps intelligent, mais fuyard et destructeur, s'emparer d'un artefact capable de détruire l'univers !
Et de toute façon, la partie de moi qui hurlait, qui courait dans tous les sens et qui exigeait de pouvoir revenir à sa vie d'avant se faisait taire.
Une fois le pacte signé, Anubis forma les cornes du diable avec ses doigts, il propulsa une décharge électrique qui ne me blessa pas. J’eus le temps d’apercevoir une forme, celle d’un frêne. Devant lui, trônait un cercle incantatoire représentant le dos d’une carte de tarot, une rune argentée en forme de serpent à trois têtes tournées vers la gauche brillait en son centre :
Son khépesh me transperça, mais ne me laissa aucun autre mal.
Il avait juste réussi à faire sortir de ma poitrine l'améthyste qui était entrée en moi.
En écrivant ces mots, je plains Anubis, il ne savait même pas à quel point les informations qu'il me donnait aurait dû nous mettre la puce à l'oreille.
A l'époque, je n'aurais pas pu penser à ça. Les forces qui s'étaient disputées en moi avaient montré leur brutalité.
Une partie de moi jubilait.
Une autre s'était figée.
J'avais eu envie de crier, j'avais eu envie de pleurer.
Comment aurais-je dû réagir ?
Je savais en tout cas que l'envie avait écrasé le besoin...
Pendant ce temps, le "Résurrecteur" devait se demander lequel des deux entrait en action, lequel des deux motivait tout ce qui allait arriver…
A suivre...
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