Chapitre 5(Julia)

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Absence

Il est cinq heures du matin et je n’ai rien de mieux à faire que de rêver du prince charmant. À vingt-quatre ans, je pense encore qu’un homme va venir m’enlever sur son cheval blanc. Mais ce rêve naïf est l’une des seules choses auquel je peux m’accrocher, ça et mon petit renard.
Mon petit frère est parti pour une durée indéterminée sans me prévenir, et je n'ai plus que ça. Je n'en veux pas à ce rouquin d'être parti avec Victoire en vadrouille : Un changement d'air ne lui fera pas de mal, mais il me manque terriblement. Sans lui j'ai du mal à avoir mon optimisme habituel, bien que j’essaye de positiver. Quand je vois son sourire rassurant qu’il me lance tout va mieux, qu’importe mon salaire de merde, qu’importe ce quartier pourri avec un cambriolage meurtrier toutes les semaines, qu’importe mon ventre qui gargouille et l’absence de notre mère. Dès que je vois son sourire s’éclaircir, j’oublie toute ma déprime. S’occuper de lui toutes ces années m’a fait le plus grand bien. Il a été le phare qui me guide au bout de la nuit. Bien que je n’aie jamais voulue et jamais eu le rôle de mère de substitutions que ce soit d’un point vue morale et sentimental. J’ai assumé mon rôle de chef du foyer, ce qui m’a permis de ne pas sombrer et m’a donné une raison d’être tout le temps joyeuse, même si je ne le suis pas.
Bon, l'heure n'est pas à la déprime, mon voisin a encore mit sa musique à fond. C'est sa façon de me dire que je dois arrêter de rêver pour aller bosser. Malgré sa méthode bruyante d'attirer l'attention, je l'aimais bien.
C'est un beau garçon, aux cheveux bruns et avec des yeux noisettes et un style de métalleux. Mais il surtout doux, il aime la poésie et le théâtre, il est plein d’attention. J’ai appris à le connaître et à l'apprécier en parlant avec lui. Il s'appelle Florent et c’est un fan invétéré de métal. Il s’intéresse vraiment à ma personne, contrairement aux connards que je fréquente d'habitude et qui ne veux qu'une chose : que j'écarte mes jambes.
Ce métalleux m'écoute sans se préoccuper de ça, enfin je crois. Ne sait-on jamais, peut-être que c'est une autre façon de m'avoir dans son lit. Peut-être qu’il n’a aucun d’intérêt pour la musique classique et le théâtre, ou l’opéra contrairement à moi et qu’il fait juste semblant de s’y intéresser pour discuter. Mais pour l'instant il est attentionné et je ne veux pas me poser plus de questions que ça.
Je me rends à mon travail d’un pas, nonchalant. Je n’ai aucune envie de voir mes collègues. Ces doctoresse et infirmières qui me détestent parce que je semble plus belle qu'elles mais aussi parce que j'attire et subis le harcèlement de ces crétins de médecins. Ceux-ci en me voyant, oublient tous les malades et qu'ils sont mariés. Me plotent de façon indiscrète et me prennent de haut. Une fois où nous étions seuls, un deux à sortit sa bite et la mise devant moi et voulait me forcer à le sucer. J’ai mordu son sexe comme au cantabile, jusqu’au sang, et il a crié comme un fou, l’histoire fut étouffée par l’hôpital.
Mes collègues féminins comme masculin, voulurent avoir ma tête, mais une bite en sang n’est pas gênante pour moi mais l’idiot qui l’a sortie. Les mains baladeuses sont toujours là, en public mais en priver ils tiennent trop à leur membre pour ça. Les seules personnes agréables, sont les aides-soignants masculins qui ne peuvent pas profiter de leur position pour me ploter. Mais une fois, qu’ils ont compris, que je ne coucherai pas avec eux, parce qu’ils sont gentils, ils m’ont très vite abandonné. Ceux-ci me traitent d’allumeuse et de pute dans mon dos.
J’aime mon travail et aider les gens de façon générale. Dommage que mes collègues froids, condescendants, dragueurs, harceleurs et lourdauds m'enlèvent une grande partie de ce plaisir. Mais ç'aurait pu être pire, je ne sais pas comment.
J'ai aucun ami au boulot, ou dans la vie en règle générale, seule Victoire me tient compagnie quand elle ne traîne pas avec Noah. Ces deux-là s'entendent comme des jumeaux, et le fait qu'ils y aient quatre ans de différence entre eux ne se ressent pas.
Je dois encore arrêter de rêvasser, car malgré ma démarche nonchalante et la lenteur du bus, je suis arrivée à l'hôpital. Une fois là-bas, je n'ai pas le temps de penser à des choses futiles, et c'est plutôt une bonne chose, en ces jours assez monotones.
La journée est finie, le soir est tombé. Je n’ai pas rencontré le prince charmant aujourd’hui. Juste vu des gens mourir, souffrir et je n’avais que mon sourire, ainsi quelque soin bénin à offrir. J’ai perdu ma carte de bus et je n’ai pas de quoi prendre un ticket, la chauffeuse m’a refusé l’entrée avec mépris. Donc je dois marcher, mais ce n'est pas si grave ou ça aurait pu être pire. Je n’en suis pas sûr mais je suppose que malgré tout ça j’ai la santé et c’est l’essentiel.
Je rentre chez moi d'une démarche nonchalante, après tout, pourquoi je me presse pour rentrer ?! Peut-être parce qu'il y a de la lumière chez moi. En voyant cette lumière, je me précipite et me voilà déjà en train d'étouffer dans mes bras mon petit frère adoré. Celui-ci ne dit rien et, lorsque je le libère de mon étreinte, il lâche :
—Désolé d'être retourné.
— Je ne t'en veux pas !
Répondis-je étonnée.
—Ah bon, c'est pour ça que tu as essayé de m'étouffer avec tes deux air-bacs ?
Je ne réponds pas, je me contente d’avoir un sourire béat. Je suis heureuse de le voir, malgré ses moqueries sur mon imposante poitrine.
Victoire aussi, je veux la prendre dans mes bras, mais celle-ci s'amuse à esquiver mon étreinte plusieurs fois, par pure sadisme de ne pas m’accorder ce que je désire. Mais je veux ce câlin, alors je lui cours après dans la maison. Elle crie : « Au viol ! Au viol ! », en se retenant de ne pas mourir de rire. Je finis par l’attraper pour lui faire son câlin qui est accompagné d'une pluie de fous rires.
Nous finissons la soirée en jouant aux cartes et en parlant de leurs vacances. Là, pour la première fois depuis un moment, je n'ai pas à être optimiste et penser que la vie était belle. Je n'ai pas besoin de cet effort, car ce soir la vie est vraiment belle.

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