Prisonnier

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Les mains attachées à des menottes en métal, Bannoc suivait ses geôliers à travers un long couloir dont les murs noirs et brillants reflétaient grossièrement leur silhouette. Au-dessus de leur tête, une lignée de cercles incrustés au plafond émettait une lumière blanche, éclairant parfaitement le corridor.

Les gardes étaient au nombre de trois. Les deux qui l’encadraient de chaque côté étaient habillés des mêmes uniformes noirs que ceux qu’il avait lui-même capturés sur Damass. Leurs casques étaient reliés à la combinaison par un tuyau à l’arrière, sans doute pour y acheminer l’air des bonbonnes situées dans le dos.

L’agencement de leurs équipements n’est pas très différent des nôtres, pensa-t-il. En changeant les couleurs, on pourrait croire qu’il s’agit d’un uniforme de la Police Spatiale…

Le troisième avait, quant à lui, une combinaison singulière. Elle était blanche du torse jusqu’aux jambes. Seuls les manches, la ceinture et le casque étaient noirs. Ce dernier avait, en revanche, une visière verte et transparente, à l’inverse de celles de ses deux comparses qui étaient aussi sombres que le reste. Sur le torse étaient brodés les trois triangles alignés de leur symbole.

Ils montèrent dans un ascenseur et d’après le temps qu’ils y restèrent, ils durent gravir pas mal d’étages. Puis ils prirent un autre couloir similaire au précédent et entrèrent finalement par une porte coulissante en forme de pyramide qui donnait sur une salle circulaire. Celle-ci était dépourvue de décoration et de meuble à l’exception des cercles au plafond qui diffusaient de la lumière, d’une table au centre et de deux chaises.

Sans dire un mot, les deux gardes en noir le forcèrent à s’asseoir et se positionnèrent ensuite de chaque côté. Le troisième était resté vers la porte et ne bougeait plus. L’adjudant attendit, tournant la tête pour observer la pièce autour de lui, bien qu’il n’y ait rien à regarder. Puis, il leva les yeux vers ses deux geôliers qui ne bronchèrent pas une seconde puis posa ses mains menottées sur la table.

Après de longues minutes, quelqu’un entra enfin. Les trois gardiens le saluèrent d’un signe en se dressant droit comme des piquets.

Ils ont au moins le respect de la hiérarchie, remarqua Dorys. Ils ne semblent pas si différents de nous, finalement.

Le nouvel arrivant était habillé d’un uniforme noir et blanc, toujours avec le symbole des pyramides sur le torse. Un insigne sur le cœur indiquait clairement qu’il s’agissait d’un haut gradé. C’était un homme qui devait avoir dans la cinquantaine d’années, les cheveux grisonnants courts en brosse, le teint pâle et les yeux légèrement vitreux sur un visage émacié et fatigué. Une telle apparence était probablement due à un manque cruel de soleil. Ils ne devaient peut-être pas avoir de systèmes de lampe à rayonnement solaire dans leurs structures comme dans les exploitations minières de Képhas ou le centre de commandement sur Neyria.

L’homme s’assit en face de lui et l’observa quelques instants.

— La fameuse "police de l’espace"…, marmonna-t-il en croisant les mains au-dessus du menton. Je ne m’attendais pas à vous trouver dans cette partie du système...

Il avait un certain accent que l’adjudant ne reconnut pas. Il parlait cependant le même langage que celui qui s’était formé au sein de la colonie en soixante-dix ans d’existence.

— Je ne vous y attendais pas non plus, admit Bannoc, très calme. Un simple concours de circonstance, semble-t-il…

— Une coïncidence fâcheuse, ajouta l’homme face à lui, un rictus aux lèvres. Nous étions sur une opération qui réclamait une totale discrétion. Mais vous nous avez remarqués, il fallait donc intervenir. Vous abattre aurait été préférable, cependant vos talents de pilotage ont mis à mal nos chasseurs, alors j’ai pris la décision de vous capturer pour vous emmener à bord.

— Ceci est bien trop aimable, monsieur. Mais sans vouloir vous offenser, j’étais attendu ailleurs…

— Vous m’en voyez désolé. Mais l’occasion était trop belle pour bavarder enfin avec un membre de votre corps défensif. Voyez-vous, depuis que vous avez décidé de riposter contre nous, je mourrais d’envie de vous connaitre.

— Une simple demande de votre part aurait suffi, fit remarquer l’adjudant. Nous vous avons envoyé plusieurs messages afin de rentrer en contact, mais vous n’y avez nullement répondu.

— C’est exact. Ce n’était pas dans nos intérêts d’être en contact avec votre colonie, seules vos ressources nous intéressent.

— C’est ce que nous avons cru comprendre, en effet. Pourquoi ?

L’homme le toisa avec un regard noir, presque menaçant.

— Nous en avons tout simplement besoin, c’est tout ce que vous avez à savoir.

— Qu’en faites-vous ? insista Bannoc, désireux de connaitre leurs objectifs. Si elles sont primordiales pour votre survie, nous pouvons très bien vous offrir ce qu'il vous faut !

Les traits de l’officier Black-Tron se durcirent et son ton devint plus sec.

— Nous n’avons rien à faire de votre compassion ! Ces ressources nous appartiennent de droit ! Nous ne faisons que récupérer ce qui nous revient !

— Je ne vois pas en quoi ? Nous étions là bien avant vous, il me semble…

— Votre colonie n’avait en aucun cas le droit de venir s’installer sur la Terre Promise ! Vous n’étiez pas au programme de l’immigration, vous vous êtes emparé du prototype de vaisseau-mère afin de nous devancer…

— Nos aïeuls ont embarqué à bord du Myriam pour une vie meilleure, tandis que les vôtres se battaient pour la possession des autres vaisseaux mères, habités initialement par des personnes pensant être supérieures ! répliqua Bannoc sur un ton de défi. Mon grand-père venait du Centrafrique, un homme pauvre qui a vécu dans la misère toute son existence alors que les riches de ce monde comptaient s’en aller en laissant une population mourant de faim et de maladie. Quand les émissaires du projet Exodus sont arrivés dans son village, cela a été comme une délivrance ! Une nouvelle vie pour lui et…

— Taisez- vous ! lança sèchement l’officier.

Bannoc n’insista pas. Son interlocuteur respira fortement puis se leva.

— Je vais vous montrer quelque chose…

***

Spiros et Corson étaient tous deux concentrés sur leur partie d’échecs. Les nombreuses défaites de l’agent contre Julius lui avaient appris quelques astuces qui étonnèrent le scientifique. Mais celui-ci avait une bien plus grande expérience dans ce jeu et il mettait facilement son adversaire en danger. Spiros sentait que Corson laissait durer la partie, car à bien des occasions, il aurait pu le battre aisément. Bien qu’ayant encore des difficultés, il prenait de plus en plus de plaisir à jouer, et il y avait trouvé une utilité : cela développait son sens tactique.

Alors qu’il commençait à entrevoir une possibilité d’attaque, son Holocom reçut un appel du caporal Abell.

— Spiros, j’écoute ?

— Est-ce que tu peux venir dans la salle de contrôle ? On a une urgence !

— Très bien, j’arrive.

Il coupa son Holocom.

— Je vais devoir abandonner la partie, dit-il en se tournant vers Corson.

— Il semblerait en effet, répondit celui-ci. C’est dommage, j’étais sur le point de gagner.

— Vraiment ?

— Je vous ai coincé par ma reine, mon fou et ma tour. Deux coups supplémentaires et c’était joué.

— Effectivement, se résigna-t-il en examinant le plateau. Vous feriez un très bon adversaire contre l’agent Derry.

— Si l’occasion s’y présente, j’en serai enchanté. Merci pour cette distraction, mais il est visiblement temps de reprendre le travail.

— De rien, monsieur Corson.

Le scientifique se remit sur ses appareils de mesure d’astronomie tandis que Spiros repartit rejoindre la salle de contrôle.

Sur le chemin, il se demanda ce qui pouvait bien se passer pour être appelé ainsi. Il n'y avait rien de palpitant rien dans cette partie du système, à moins qu’une activité Black-Tron eût été découverte.

Lorsqu’il arriva dans la salle de contrôle, le caporal Abell était penché sur une table représentant le système Promesso au complet en 3D tandis que Godrik s’affairait sur ses écrans. Quand il le vit, Abell invita Spiros à le rejoindre.

— Regarde ! dit-il en montrant la carte holographiée. Ceci est la reproduction sur la map stellaire des dernières informations enregistrées par le radar.

— Heu… Qu’est-ce que je dois y voir ?

Abell déplaça le plan et agrandit un point précis vers la ceinture d’astéroïdes.

— C’est une flotte ennemie ? demanda-t-il en reconnaissant les images de vaisseaux miniaturisés.

— En pleine bataille contre notre propre flotte, confirma le caporal. Je pense qu’il s’agit de l’Odysséas. Je savais qu’il devait escorter un important convoi de minerais de Képhas vers Terre Nouvelle. Mais pour une raison que j’ignore, ils ont dévié de leur route de vingt-deux degrés après un premier contact avec l’ennemi, les éloignant de leur point d’arrivée.

— De quand datent ces relevés ?

— Il y a à peine deux heures, sans compter le temps de recevoir les données et de les interpréter sur la carte. Mais ce n’est pas le plus gros problème. Regarde ici…

Il fit bouger la map vers un autre point un peu plus loin, ce qui déplaça également la flotte miniature. Un second escadron ennemi, plus important cette fois, s’apprêtait à les prendre à revers. Deux croiseurs Deserters étaient en retrait tandis que les Intruders s’enfonçaient dans la ceinture.

— À l’heure qu’il est, le convoi doit déjà être confronté à la deuxième offensive. D’après les calculs, il se dirigeait en plein dans la ceinture d’astéroïdes, probablement pour s’offrir une sécurité. Ils ont sûrement anticipé la seconde attaque. Comment l’ont-ils découverte, c’est un mystère, mais c’était bien joué de leur part.

— Ils ont l’air de bien se débrouiller alors, mais pourquoi m’avoir demandé ?

— Pour la raison suivante : Il y a un troisième escadron Black-Tron qui ne vient pas du Lunar Centaury mais de ce point-là !

Il montra un corps rocheux, dix fois moins gros que la plus petite lune recensée.

— Qu’est-ce que c’est ? demanda Spiros.

— Je ne sais pas, répondit Abell. L’ordinateur le reconnait comme étant « Orphos », mais je n’ai pas plus d’indications. Cette troisième flotte est beaucoup plus importante que les deux précédentes et l’Odysséas n’arrivera pas à en venir à bout, surtout après avoir affronté la seconde. Tant qu’ils seront dans la ceinture, ils ne pourront pas lancer d’appel au centre de commandement. Et si les Black-Trons ont établi d’autres bases dans le système, il faut prévenir Neyria immédiatement !

— Et le Destiny ? demanda Spiros.

— Il est peut-être encore sur Neyria, mais je sais qu’il devait partir en mission avant de venir nous récupérer, d’où la nécessité d’atteindre le centre de commandement au plus vite. Le second escadron est beaucoup plus important que tout ce qui nous a été donné de voir jusqu’à présent. Ils ont deux Renegats à leur côté et au moins vingt Intruders. Quant au troisième, c’est une véritable armada. Mais le plus inquiétant, ce sont les signatures énergétiques qui sont inconnues à notre ordinateur.

— De nouveaux vaisseaux Black-Tron ?

— Quatre-vingt-dix pour cent de chance que oui, marmonna Godrik en hochant la tête.

— Et comment prévenir le centre de commandement ?

— Avec ton chasseur, répondit Abell tout simplement.

— Hein ? Mais mon Protector n’a pas assez d’autonomie pour atteindre Neyria !

— J’en ai déjà parlé à ton mécanicien et il se pourrait qu’il ait une solution à ce problème. Il est dessus.

— Ah… mais s’il y parvient, cela implique que nous allons devoir laisser la station Alpha-3 avant l’heure, non ?

— Tu seras le seul à partir. Pierrik m’a averti que les modifications qu’il est en train d’opérer nécessitent d’enlever la cellule de transport.

— D’accord. Mais toujours est-il qu’il n’y aura plus personne pour surveiller la station…

— Ne t’en fais pas pour ça. Le plus important est de prévenir le haut commandement le plus vite possible.

— Pierrik a-t-il dit en combien de temps je vais pouvoir atteindre le centre ?

— Il a parlé de deux ou trois heures environ. C’est plus que ce que met un vaisseau amiral.

— Mais c’est beaucoup trop long ! s’exclama Spiros. D’ici que j’arrive, la flotte sera anéantie !

— Le but n’est pas d’arriver sur Neyria, mais d’en être suffisamment proche pour envoyer un message radio. Si tu peux atteindre la bordure extérieure de la ceinture, ça sera déjà pas mal. Tu devras adresser le message au commandant Dekker. Va rejoindre Pierrik au garage, il te briefera sur le reste.

— Bon, très bien. Espérons que je ne me fasse pas repérer pendant le trajet…

— Il n’y a pas de raison. À la vitesse où tu passeras, ils n’auront pas le temps de t’apercevoir. Le Lunar Centaury n’est pas encore en phase avec Terre Nouvelle, mais nous si. Une traversée en ligne droite, on ne pouvait rêver mieux !

***

En entrant dans le garage, Spiros se dirigea vers Pierrik qui s’affairait sur le Protector. Le réacteur était démonté et posé sur un support, rattaché au reste de l’appareil par quelques câbles.

— Qu’est-ce que tu as fait à mon vaisseau ? demanda Spiros en voyant l’état du chasseur.

— Abell t’a briefé ? demanda Pierrick sans tenir compte de sa remarque.

— Il m’a dit que j’étais congédié et que je repartais sur Neyria en vous laissant vous débrouiller, plaisanta Spiros.

— Parfait. Viens par-là que je t’explique. Il faut que tu ailles en direction de Neyria et que tu t’en approches le plus possible afin de lancer un signal radio au centre de commandement.

— Ça, j’avais compris.

— Bien. Pour se faire, je t’installe une amélioration sur ton chasseur pour te permettre d’aller plus loin que d’habitude.

— C’est-à-dire ?

Il montra une étrange machine ressemblant à l’arrière d’un vaisseau plus gros que le Protector de Spiros.

— Ce sont des réacteurs semiluminiques adaptables à ton appareil, expliqua le mécanicien. Je remplace également les accumulateurs basiques par des batteries de rechange de nouvelle génération. Ces petites merveilles seront installées sur les prochains chasseurs actuellement en production sur Terre Nouvelle. J’en ai fait venir deux avec nous lors de notre arrivée pour des cas comme celui-ci.

— Et qu’est-ce que ça va changer ?

— Ces accus sont beaucoup plus puissants que la première génération et sont nécessaires pour alimenter les nouveaux réacteurs. Malheureusement, le reste du chasseur n’est pas fait pour accueillir autant d’intensité. Je vais pouvoir te le bricoler un peu, mais il va falloir être prudent en utilisation.

— Dis tout de suite que tu veux me faire exploser dans l’espace ! s’exclama Spiros, pas rassuré du tout.

— Ne t’inquiète pas, tranquillisa Pierrik, j’ai la solution pour parer à ça. Il te faudra faire plusieurs petits sauts en semiluminique et à divers points précis. Tu devras attendre quelques secondes entre chaque saut afin de laisser refroidir le système. C’est là tout le problème : ton Protector n’est pas équipé d’un circuit de refroidissement efficace pour réduire la chaleur dégagée par les batteries lors de leur utilisation. Il faut donc limiter leur usage sur le long terme en effectuant plusieurs sauts avec un temps de répit avant de repartir. C’est pour ça que j’enlève aussi la cage de transport, le froid de l’espace sera un facteur important pour la réfrigération du système de propulsion.

— Je comprends. Et en combien de temps je vais pouvoir atteindre la ceinture d’astéroïdes ?

— Je dirais qu’en moins de trois heures tu seras à la bordure extérieure.

— D’accord. Et quand ça sera fait ?

— Si tu me donnes un coup de main, en quinze minutes on aura terminé.

— Parfait, dit Spiros en prenant une clé dynamométrique.

Ils se mirent activement au travail afin de finir au plus vite. Spiros remarqua avec admiration les connaissances de Pierrik qui improvisait lorsque l’assemblage des pièces n’était pas conforme. Il trouvait une solution à toutes problématiques rencontrées, allant jusqu’à fabriquer lui-même un tuyau de raccordement pour le transfert du carburant gazeux vers les turbines.

Spiros eut en même temps un rapide cours sur les deux systèmes de propulsion d’un chasseur. Le premier, alimenté par le gaz récolté sur Thaddée, était utilisé lors des manœuvres à faible vitesse, l’entrée et sortie en atmosphère ainsi qu’en combat. Le second employait une technologie moins traditionnelle, basée sur ce qui était appelé l’Énergie Pure.

Cette énergie provenait d’une concentration de rayons solaires dans un accélérateur de particules à très haute densité puis elle était emmagasinée dans un accumulateur, ou nommé communément "pile EP" ou "batterie EP". La puissance de cette énergie était incommensurable et existait déjà sur le Myriam. Conçue de manière primitive à cette époque, elle permit au grand vaisseau mère de se propulser à des milliards d’années-lumière en quelques mois seulement.

L’inconvénient résidait dans le fait qu'elle s’épuisait rapidement et ne pouvait s’employer sur le long terme, d’où la nécessité encore aujourd’hui d’utiliser un moteur à carburant.

Pour le Myriam, le voyage vers la Galaxie 77 s’était effectué en plusieurs étapes, s’arrêtant tous les deux ans dans des systèmes comprenant des étoiles de type "géantes rouges" afin de recharger promptement les immenses batteries EP du chasseur. Actuellement, l’Énergie Pure servait uniquement pour les déplacements rapides sur de longues distances en vitesse semiluminique, mais n’était pas présente sur certains vaisseaux comme les cargos et transporteurs de M:Tronic.

— En ce moment, Futur-On travaille sur des moyens de rendre cette énergie moins consommatrice, expliqua Pierrik. Mais comme je te l'ai dit, la création de chasseurs pour la Police Spatiale retarde beaucoup les recherches annexes. Je sais déjà que les prochains appareils de combat auront ces nouvelles batteries permettant de parcourir de plus longues distances, mais je pense que l’on peut faire mieux encore.

— Ça serait génial de pouvoir utiliser cette énergie dans notre quotidien, fit remarquer Spiros.

— Ce n’est pas nécessaire. L’énergie solaire simple que nous exploitons est amplement suffisante pour tout Centralville et moins compliquée à produire.

— D’accord.

Ils finirent de remettre en place les réacteurs après avoir rebranché le moteur et les nouvelles batteries. La cage de transport avait été détachée pour laisser un espace libre afin de dégager la chaleur émise par le système de propulsion.

— Dommage que je n’ai pas le temps de bricoler quelque chose pour récupérer cette chaleur, soupira Pierrik. Ça pourrait être une seconde source d’énergie.

— Tu saurais faire ça ?

— Avec le matos nécessaire oui. Mais ça prendrait beaucoup de temps, il faut que je dessine des schémas, que je réfléchisse à la structure et aux matériaux à utiliser…

— Tu devrais essayer de créer un prototype et de le montrer à Futur-On, proposa Spiros.

— C’est ce que je compte faire, j’ai plusieurs idées qu’il faudrait que je mette sur HoloTab. Si un jour cette guerre se termine, j’aimerais retourner à Futur-On et présenter mes projets.

— J’espère pour toi que ça se concrétisera. Tu es doué en astromécanique.

— Merci. Mais je ne suis qu’un simple bricoleur, finalement.

— Non, moi je suis un bricoleur en électronique, mais toi tu sais modifier un vaisseau, quoi ! C’est plus qu’être bricoleur, ça !

— Mouais…

Il serra le dernier goujon avec sa visseuse pneumatique et referma le capot permettant l’accès aux turbines.

— Voilà, c’est terminé. Il me reste quelques paramètres à régler dans le firmware pour la gestion d’énergie.

— Parfait, je vais enfiler ma combinaison en attendant et je pars.

Spiros constata qu’ils avaient mis un peu plus de temps que prévu et se hâta de revêtir son équipement spatial avant de retourner au chasseur. Pierrik effectua les quelques réglages nécessaires afin d’éviter une surchauffe prématurée et par chance, cela exigeait d’avoir le vaisseau en état de marche, permettant de gagner de précieuses minutes sur l’échauffement des réacteurs.

— N’oublie pas, rappela le mécanicien à Spiros lorsqu’il revint. Ne fais que des sauts de vingt à trente minutes grand max et attends au moins huit minutes entre chacun pour ne pas trop solliciter le système. Je t’ai enregistré un plan de navigation, tu n’as qu’à valider chaque destination avant de repartir.

— OK !

Le pilote enfila son casque et le verrouilla à la combinaison. Il referma ensuite la verrière aux vitres rouges et démarra le système de navigation. Pierrik fit office d’opérateur dans le poste de contrôle et engagea la procédure de départ.

— Dépressurisation du sas, annonça-t-il. Lancement du protocole de sortie… À tout le personnel présent dans le hangar, veuillez évacuer la zone…

— Ça va ! lança Spiros. On n’est que tous les deux, pas besoin d’énumérer toutes les étapes !

— C’est parce que je m’y crois trop dans ce poste !

— Je vois ça…

— Dépressurisation OK, ouverture de la porte.

Spiros déploya les ailes du Protector, ce dernier étant soutenu par le bras mécanique.

— PR-21, Spiros Merig, paré au décollage.

— Autorisation de décoller, Spiros. Bonne chance à toi.

— Pas de bêtise en mon absence ! Go !

Spiros poussa la manette des gaz et le chasseur se décrocha de son bras mécanique. Il sortit du hangar et accéléra pour atteindre l’orbite lunaire de Jéricho avant de pouvoir se positionner sur la trajectoire requise et d’enclencher le système de propulsion semiluminique.

La première étape était la révolution de Philippos, située entre les planètes Tôma et Yaakov. D’après le plan que Pierrik avait inséré dans l’ordinateur de bord, le trajet jusqu’à la ceinture d’astéroïdes irait quasiment en ligne droite.

Ce qui l’inquiétait en revanche, c’était la proximité du Lunar Centaury, à la quatrième étape. Avec le laps de temps entre chaque saut, il pouvait aisément se faire repérer, même si les Black-Trons ne pouvaient l’atteindre en si peu de temps. Cependant, ils pourraient calculer sa trajectoire depuis son point de départ grâce à la signature thermique émise par le chasseur. Un changement de direction vers la gauche était impossible, car cela l’obligerait à effectuer le tour de Yaakov, ce qui prendrait un moment considérable et il ne pouvait se le permettre. Il évalua une modification du trajet pour s’éloigner le plus possible du Lunar Centaury en s’approchant de Yaakov, mais la différence était infime.

Si je me risque à me décaler encore plus de Yaakov, je me ferais happer par son attraction, pensa-t-il en réfléchissant. Je ne vais pas avoir le choix…

Il valida alors la trajectoire initiale en priant que les Black-Trons ne le repéreraient pas.

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