Repos

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Julius était déjà installé dans le monorail, son sac sur les genoux, en grande conversation avec Junie qui s’était assise à côté de lui. En entrant à son tour, Spiros prit place devant eux en saluant Junie qu’il n’avait pas vue depuis des jours.

— Comment vas-tu, Spiros ? lui demanda-t-elle en se tenant sur l’appuie-tête du siège devant elle.

— Comme quelqu’un qui a besoin de vacances et toi ?

— Tout se porte pour le mieux. Il paraît que c’est grâce à toi qu’on a eu la vie sauve ?

— En effet, c’est moi ! répondit-il en prenant un air faussement crâneur.

— Je ne sais pas comment te remercier… J’ai bien cru qu’on vivait nos derniers instants… tu n’imagines même pas l’angoisse, j’en tremblais comme jamais !

— Je n’ai fait que mon devoir, rien de plus… Vous avez eu de la chance que les appareils de la base Alpha-3 vous ont détectés et au bon moment. Et aussi que le mécano qui était avec moi ait pu optimiser mon chasseur pour aller plus vite. Même si tout ça a bien failli me coûter ma place…

— Julius m’a raconté. C’est vraiment n’importe quoi ! Ils n’ont rien dans la tête ces amiraux !

— C’était le commandant Bekker, rectifia Julius.

— Même, c’est pareil ! répliqua Junie en croisant les bras au fond de son siège. Heureusement que le général à la sienne sur les épaules et sait reconnaître la valeur de ses agents !

Après que tout le monde eut embarqué, la porte se referma et le sas se dépressurisa avant le départ du tram. Celui-ci se mit alors en route jusqu’au spatioport.

— Tu as pris ton temps pour venir, fit remarquer Julius lorsqu’ils passèrent dans le tunnel lunaire. Je pensais que tu serais déjà là quand je suis arrivé au monorail.

— Oui, j’ai rencontré Nadeige sur le chemin. On a un peu discuté…

— Ah, je vois.

— Qui est Nadeige ? demanda Junie.

— C’est un des agents de service qui est à l’accueil, expliqua Spiros.

— Oh ! Vous êtes ensemble ?

— Pas du tout ! répliqua-t-il avec agacement. Elle sort avec Bayler !

— Quoi ? s’exclama Junie, étonnée. Jude Bayler ? Mais elle est conne de sortir avec un mec pareil ! Qu’est-ce qu’elle lui trouve ?

— Je n’en sais rien, marmonna Spiros.

Junie le regarda avec un sourire malicieux.

— Tu ne serais pas amoureux, par hasard ? lui demanda-t-elle.

— Il souhaitait entamer une relation avec elle, mais il n’a jamais eu le courage de lui avouer son amour pour elle, répondit Julius avant que Spiros ne puisse dire quelque chose.

— La ferme ! souffla celui-ci entre ses dents, rouge de honte.

— Mais… ! C’est la vérité…, se défendit Julius.

— Ne sois pas gêné, dit Junie en rigolant. C’est trop mignon, un garçon timide et amoureux…

— Je ne veux plus en parler ! décréta Spiros en se remettant dans son siège.

— Spiros, ce n’est pas beau de bouder !

— M’en fou !

— Allez ! insista Junie qui réprimait un fou rire.

— Non !

— Spiros est amoureux ! taquina-t-elle. Spiros est amoureux !

— Chut !

Le monorail sortit du tunnel et arriva en vue du spatioport. Après être entré dans le sas de pressurisation, il s’arrêta au bord du quai de débarquement. Une fois la pression et l’oxygène remis à niveau, la porte s’ouvrit et tous purent descendre.

Au passage, Spiros croisa Homar et Joris, ses amis de promotion lorsqu’ils étaient cadets. Homar était agent de terrain et artilleur, tandis que Joris était lui aussi pilote de chasseur. Tous les deux étaient affectés sur l’Odysséas. Il y avait aussi d’anciens cadets des deux autres promos comme Yukio Kosawa, artilleur, Clair Jardain, opératrice avec Junie et Pol Taron, également pilote.

Quel étrange sentiment, se dit-il en les saluant. Nous voilà tous préposés aux différents postes de la Police Spatiale alors qu’il n’y a pas si longtemps, nous n’étions que des recrues en apprentissage. J’ai l’impression d’être nostalgique…

— Au fait, Spiros, dit Julius en posant sa main sur l’épaule de son camarade, mes parents ne sont pas là ce soir, mais ils sont d’accord pour que tu viennes manger à la maison demain midi. D’ailleurs, tu peux venir avec nous à l’église le matin et nous rentrerons ensemble, si tu en as envie.

— Ah ? Eh bien, OK, pourquoi pas ?

— Super, dans ce cas. Je suis content que tu puisses fortifier ta foi. C’est très important !

— Heu… oui. Si tu le dis…

Cela faisait des années que Spiros n’avait pas été à l’église. Sa sœur non plus, par ailleurs. Il avait accepté de venir surtout par politesse, mais il se demandait s’il ne l’avait pas fait trop vite. Il n’aurait su dire s’il était prêt à rentrer à nouveau dans le temple pour prier et écouter un pasteur faire son message. Peut-être qu’Emie l’accompagnerait ?

Une fois dans le spatioport, les agents montèrent dans la navette via un sas pliant permettant la liaison entre elle et la salle d’embarquement. L’intérieur était spacieux avec deux rangées de trois places et un couloir au milieu. Au-dessus de leur tête, des compartiments fermés leur offrirent d’y déposer leurs sacs. Les sièges bleus étaient très confortables et pouvaient s’abaisser sans gêner la personne située derrière.

Toujours le même style de Futur-On, pensa Spiros en se rappelant le vaisseau remorqueur.

Lorsque l’embarquement se termina, le sas se replia sur lui-même et la navette se mit en mouvement pour se placer face à la piste d’envol. Des lumières éclairèrent celle-ci sur chaque côté. Une voix résonna alors depuis la cabine de pilotage :

— Chers passagers, il est 11 h 23, heure de Centralville. Avant le décollage, veuillez attacher vos ceintures de sécurité et vérifier que vos bagages se situent bien dans les compartiments dédiés. Notre temps de vol sera de trois heures jusqu’au spatioport de Centralville. Passez un agréable voyage.

La navette se mit à avancer doucement, puis prit une soudaine accélération qui plaqua chaque passager à son siège. L’autre bout de la piste était un tremplin surélevé qui permit à l’astronef de s’envoler en direction de Terre Nouvelle.

***

Le capitaine Ferne sortait du bureau des officiers lorsque son confrère, le capitaine Rodrigues, alla à sa rencontre. En le voyant arriver ainsi tout enjoué vers elle, Bayrénisse soupira. Allait-il encore chercher à lui faire la cour ou bien se vanter de ses exploits ?

— Capitaine Ferne, dit Rodrigues avec son insupportable sourire aux dents blanches.

— Capitaine Rodrigues, salua-t-elle poliment, mais sèchement.

— Je voulais que vous soyez la première à entendre la nouvelle, continua-t-il.

— Une nouvelle ? Et quelle est-elle ?

— Devinez qui sera le capitaine du prochain vaisseau-amiral.

— Voyons… laissez-moi réfléchir… non je ne vois pas.

— Bayrénisse, vous me taquinez…

— Oh, c’est vous ? fit-elle en ayant l’air faussement étonnée. Mais comment est-ce possible ?

— Eh bien, je dirais que c’est parce que ma requête auprès du général et du colonel a été acceptée.

— Vous m’en voyez ravie, déclara-t-elle dans un mensonge.

— Votre sollicitude me touche, Bayrénisse. Je ne m’y attendais pas moi-même.

Ben voyons… Depuis des semaines qu’il me rebat les oreilles avec ça !

— Et quand prenez-vous vos fonctions à bord ? demanda-t-elle, histoire de s’intéresser un minimum par politesse. Je pensais que le prochain vaisseau-amiral était en construction ?

— En effet, il n’est pas tout à fait opérationnel. Nous allons partir dans quelques jours pour un voyage d’essai. Mais la majorité des éléments sont en place. Je vais d’ailleurs aller le visiter cet après-midi, si le cœur vous en dit de m’accompagner…

— Merci Dario, mais je rentre à peine de la mission d’escorte depuis Képhas et avec le briefing qui s’en est suivi, je n’ai pas pu me reposer un seul instant. Je vais aller au réfectoire pour me restaurer et me coucher ensuite.

— Vous avez raison, approuva Dario en lui tapotant l’épaule amicalement. Votre épreuve a été rude… si seulement j’avais pu être à vos côtés pour vous soutenir, vous apporter mon assistance…

Et voilà qu’il recommence ! grommela Ferne intérieurement.

— Je tâcherais d’être à la hauteur la prochaine fois, continua le capitaine Rodrigues. Ce nouveau vaisseau-amiral nous permettra enfin d’être plus facilement disponibles sur plusieurs fronts. S’il avait été opérationnel, il est clair que j’aurais pu accourir à votre secours dès le moment où l’information nous était parvenue !

— Je n’en doute pas un seul instant, souffla-t-elle en levant les yeux au ciel. Maintenant, si vous n’y voyez pas d’inconvénient, je vais me retirer. Je ne voudrais pas vous retarder dans vos affaires…

— Certes. Je vous reverrais très bientôt, Bayrénisse. Reposez-vous, surtout.

— Merci, capitaine.

Rodrigues s’en alla de sa démarche assurée et légèrement hâbleuse.

Enfin débarrassée de lui  ! Qu’est-ce qu’il peut être collant 

Depuis son entrée dans la Police Spatiale, Bayrénisse Ferne était très souvent importunée par Rodrigues. Tout comme elle, c’était un ancien agent de sécurité de Centralville qui s’était engagé dans les forces de défenses célestes à sa création. Beau parleur avec un sourire permanent, Dario était un séducteur volontaire, tant auprès de Bayrénisse que des supérieurs qui lui ont conféré ses distinctions sans avoir réellement prouvé sa valeur.

Certes, il n’avait que des missions réussies au cours de sa carrière. Mais le capitaine Ferne sentait que quelque chose clochait avec lui. Elle n’était pas dupe par son numéro de charmeur raté. Selon elle, il n’avait pas vraiment mérité son grade d’officier secondaire, contrairement à l’adjudant Bannoc qui était, à ses yeux, un homme avec de vraies vertus et qui valait amplement la place de Rodrigues.

Balayant l’importun de sa tête, elle reprit la direction du réfectoire en bâillant. Le repas promettait d’être rapide, au vu de sa fatigue.

Sur le chemin, elle croisa Niki qui sortait d’une salle de repos dédiée aux officiers primaires.

— Sergent Pellia ? s’étonna-t-elle. Vous n’êtes pas partie avec la navette ?

— Non capitaine, répondit-elle avec un sourire. Je… j’avais des choses à faire au centre avant de m’en aller. Je prendrais le premier transport demain.

— Vous, au moins, vous avez la possibilité de rentrer, soupira-t-elle. J’ai encore une montagne de tâches à faire ici. Je ne pourrais retourner à Centralville que dans deux jours…

— Vous devriez en déléguer certaines à des subalternes, suggéra Niki. Vous allez vous épuiser pour rien.

— Vous avez raison, concéda Ferne. Mais nous sommes tellement mal organisés… Personne n’est entraîné pour réaliser ces tâches administratives.

— C’est vrai. J’ai déjà soulevé ce point lors du dernier briefing interne. Mais j’ai l’impression que ma voix est noyée dans la masse…

Ferne leva les bras en signe de lassitude.

— Que voulez-vous, sergent ? Nous manquons d’effectifs… et le temps pour former les nouveaux agents est si long…

— Et en même temps, pas assez, fit remarquer Niki.

— C’est vrai, approuva Ferne. Je me rendais au réfectoire, souhaitez-vous m’accompagner ?

— Volontiers ! Je suis affamée…

— Quelle idée de nous faire un briefing à peine rentré de voyage ! ronchonna le capitaine sur le chemin. Ils auraient pu attendre que nous ayons pris du repos.

— Je suis d’accord. J’ai eu l’impression que j’allais m’écrouler devant le général.

— Je parie que c’est encore le colonel Pietrezs qui l’a décidé. Il n’a jamais vraiment eu de jugeote…

Niki parut interloquée. Un capitaine de vaisseau-amiral, critiquer ainsi un supérieur ?

— Ne faites pas cette tête, sergent, rassura Ferne. On peut bien s’exprimer de temps en temps…

— Heu… oui…

Elles arrivèrent dans le réfectoire, où un mélange d’odeurs de nourriture emplissait les narines. La plupart des nouveaux cadets étaient en train de manger. Au vu du maintien de certains, ils devaient probablement sortir du cours de madame Bolivard.

Les deux officiers prirent un plateau et se servirent de légumes, de pain et de yaourt puis s’assirent l’une en face de l’autre.

— Bon appétit, capitaine.

— Merci, sergent.

— Je ne voudrais pas vous troubler pendant votre repas, capitaine, mais…

Niki hésita.

— Allez-y, je vous écoute.

— Eh bien, en fait, je suis inquiète au sujet de l’adjudant Bannoc. J’ai peur qu’il lui soit arrivé quelque chose.

Le capitaine Ferne attendit de finir sa bouchée :

— Je suis anxieuse aussi. Cette histoire de troisième flotte repérée depuis Jéricho est étrange, d’autant plus que nous ne l’avons pas croisé. Je ne vois pas l’agent Merig donner une information erronée. Et la disparition de l’adjudant est probablement le lien qui nous manque dans cette affaire.

— Vous pensez donc qu’il s’est fait capturer par l’ennemi ?

Ferne acquiesça en hochant la tête.

— Nous en avons parlé après le briefing avec le général. Une équipe est en route pour enquêter. Nous en saurons plus dans quelques heures. En attendant, videz-vous l’esprit de tout ça et reposez-vous, vous en aurez besoin.

— Bien capitaine.

Elle piqua sa fourchette dans son assiette, hésitant à changer de sujet. Observant la main de son supérieur, elle se décida finalement, histoire de ne pas finir le repas en silence :

— Est-ce que… je peux vous poser une question, capitaine ? Cela ne concerne pas le travail… Juste par curiosité… c’est un peu personnel…

— Bien sûr, sergent. Je vous écoute ?

— Vous… vous êtes-vous mariée ?

Ferne, d’abord étonnée par une interrogation si ordinaire et d’un sujet si différent, eut alors un sourire triste, voire nostalgique, en regardant la bague à son annulaire.

— Disons que je l’ai été…, souffla-t-elle.

— Pardon si je vous ai importunée, s’excusa précipitamment Niki. C’était peut-être un peu trop personnel comme demande…

— Non, pas du tout, nous sommes entre nous. Pour vous dire la vérité, je suis veuve.

— Oh ! Capitaine, vraiment, je suis confuse… je suis sincèrement désolée !

— Ne le soyez pas, rassura Ferne. Cela fait maintenant treize ans…

— Cela a dû être très dur pour vous…

— Oui. Nous étions mariés depuis quatre ans. Mon mari travaillait dans la section Exploration du centre de recherche de Centralville. Il parcourait Terre Nouvelle pour la cartographier et explorer des régions encore inconnues. Et puis un jour, pendant d’une expédition dans les terres à l’ouest, il y a eu un incident à bord de leur transporteur aérien. Personne ne sait ce qu’il s’est réellement passé, probablement une avarie… La communication avec eux a disparu subitement alors que tout semblait bien aller. Malgré les équipes de recherches qui ont balayé intensément la zone, nous ne les avons jamais retrouvés. Le temps s’est écoulé depuis, mais je n’ai jamais pu me résoudre à enlever mon alliance.

En entendant le récit du capitaine, Niki eut comme un flash dans la tête, lui faisant lâcher soudainement sa fourchette sur le plateau.

— Quelque chose ne va pas, sergent ? s’inquiéta Ferne en voyant l’expression stupéfaite de Niki.

— Vous… vous voulez parler de l’incident, il y a treize ans… toute une équipe d’exploration…

— C’est cela. Tout le monde en parlait à cette époque, vous devez avoir des souvenirs, je présume ?

— Oui, oui, je me souviens. C’est juste que… Spiros, je veux dire… l’agent Merig… ses parents sont morts ce même jour… dans cet incident.

Ferne posa ses couverts, subitement interloquée.

— Spiros Merig ? Ses parents faisaient partie de l’équipe d’explorateurs ?

— Oui, il m’en avait parlé lorsque nous étions à l’école ensemble. Lui et sa sœur sont devenus orphelins depuis cette époque. Il ne me l’a jamais dit, mais… ça a été l’événement le plus dramatique qu’il ait vécu.

— Je peux comprendre ça. Toute la colonie a été bouleversée par cette tragédie. Il m’a fallu des années pour m’en remettre personnellement. Je me suis donné corps et âme dans mon travail pour y parvenir, mais, aujourd’hui encore, le souvenir de mon mari reste en moi. Je n’ai jamais pu me remarier depuis.

Niki hocha la tête doucement. Elle était étonnée que son officier supérieur se confie ainsi à elle. Surtout sur quelque chose d’aussi difficile. C’était comme si elle avait gardé tout ça en un bloc et n’attendait que de le déballer.

— J’ignorais que vous connaissiez l’agent Merig, continua Ferne en reprenant son repas.

— Oui… on s’est rencontré à l’école, quand nous avions douze ans. Nous sommes sortis ensemble un peu avant la fin du cycle scolaire.

— Ah vraiment ? J’en apprends tous les jours…

— Vous savez… il n’y a rien de bien passionnant… un amour de jeunesse, comme on dit.

— Il faut bien vivre une romance un jour, déclara le capitaine. Avant Kristof, mon mari, j’ai eu deux autres petits amis quand j’étais jeune.

— Spiros était mon premier vrai amour, confessa Niki. On a vécu une belle histoire, à mon sens, mais lui en a décidé autrement…

— C’est lui qui vous a quitté ? Oh, le goujat…

— C’est fini maintenant et j’ai tourné la page.

— Dans les bras de l’adjudant Smiss, si je ne me trompe ? lança malicieusement Ferne avec un clin d’œil.

— Oh… Nous avons tant manqué de discrétion… ?

— Il n’est pas difficile de deviner ce qu’il y a entre vous. Mais je vous rassure, votre attitude à tous les deux est des plus correcte. Comment vous êtes-vous rencontrés ?

— C’était sur Damass, lors de la mise en place des installations de surveillance. Je ne l’avais croisé que quelques rares fois sur l’Odysséas mais je n’y avais pas prêté attention, n’étant pas sous ses ordres. Mais apparemment… lui m’avait remarqué.

— Comme c’est romantique… un coup de foudre dans l’espace !

Niki avait un grand sourire. Rien ne lui faisait plus plaisir que de raconter sa rencontre avec Lioris.

— Ce ne devait pas être l’unique homme à vous avoir aperçue, ajouta Ferne. Mais il devait être le seul à faire le premier pas vers vous.

— C’est vrai. Il m’arrive parfois de constater que j’intimide les garçons… et pas exclusivement ceux qui sont dans mon équipe.

— C’est tout à fait compréhensible. Vous êtes une femme admirable, sergent Pellia. Vous avez montré une détermination infaillible et une volonté de fer depuis votre entrée à l’académie. Vous impressionnez votre entourage !

— Capitaine, vous me flattez, souffla Niki en rougissant.

— Continuez ainsi. Je ferai en sorte que vous atteignez vos objectifs au sein de la Police Spatiale.

— Merci, capitaine. Votre sollicitude me touche.

— Je vous en prie, sergent. Et sur ces bonnes paroles, il est l’heure d’aller dormir. Surtout pour vous. Nous avons passé autant de temps sans nous reposer. Moi j’étais assise sur un siège, mais vous, vous pilotiez un chasseur.

Elle essuya les coins de ses lèvres avec sa serviette et commença à débarrasser son plateau.

— Diriger une flotte entière n’est pas non plus de tout repos, fit remarquer Niki en faisant de même. Surtout pendant presque deux jours sans dormir.

— Mais ce n’est pas aussi physique que de rester dans un chasseur pendant quinze heures d’affilée, répliqua doucement Ferne. Sans parler du stress en nette augmentation pendant la bataille. Votre rôle est crucial et c’est pourtant celui qui est le plus éprouvant.

— Mon niveau de stress est si élevé en combat pour qu’il se remarque ? s’étonna Niki, amusée.

Le capitaine eut comme un petit rire.

— Non, il est vrai que vous figurez parmi les agents les plus calmes durant les situations les plus difficiles. Mais il n’en reste pas moins que vous êtes mise à rude épreuve pendant les conflits. Puissions-nous ne jamais avoir à revivre une bataille aussi ardue.

Niki ne partageait pas cet avis. Bien qu’éprouvante, le dernier affrontement avait été exaltant. Elle s’était sentie vivace, comme si elle était dans son élément. Même si le but ultime de la Police Spatiale était de mettre un terme au conflit qui opposait la colonie contre les Black-Trons, la jeune pilote-sergente avait besoin de vivre encore des combats comme celui-ci.

Mais qu’est-ce que je suis en train d’imaginer ? Voilà que j’ai envie de faire la guerre… Que penseraient les habitants de Centralville s’ils savaient qu’un des agents censés les protéger voulait que le conflit continu ?

Tandis que Ferne partait vers les quartiers des officiers, Niki regagna celui dédié aux employés féminins. En approchant de sa cabine, elle vit que la porte de celle-ci était entrouverte. Surprise de l’avoir laissé ainsi, elle entra et remarqua que son écran holographique était allumé avec un mot écrit.

C’était de Lioris :

Mon cœur, j’ai su que tu étais rentrée et que ta mission s’était avérée périlleuse. Tu es saine et sauve, c’est tout ce qui compte pour moi. Malheureusement, j’ai été obligé de partir avant la fin de ta réunion. Sur Damass, rien de nouveau, mais mon homologue a été pris de malaise et rapatrié sur-le-champ. Je dois donc le remplacer pour la dernière semaine avant la relève. Je devrais être rentré avant ton prochain départ sur l’Odysséas et j’aimerais que tu répondes, à ce moment-là, à une petite question qui se trouve dans une boite derrière ton écran holographique.

Je t’aime !

Derrière son écran ?

Elle tâtonna à travers la lumière qui projetait l’image de son Holocom et tomba effectivement sur une petite boite en velours. Elle l’ouvrit et plaqua sa main devant la bouche en voyant l’intérieur. Une larme monta même à ses yeux.

La boite était en réalité un écrin où était encastrée une magnifique bague d’argent sertie d’un diamant si brillant qu’il reflétait la lumière bleue de l’écran holographique sur le visage stupéfait et ému de Niki. Derrière, une petite carte montrait la fameuse question de Lioris, écrite en lettres dorées :

Veux-tu m’épouser ?

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