Chapitre 14
Heera était attachée depuis des heures. Une horrible impression s'emparait d'elle, Anise n'était pas venue comme à son habitude et elle craignait une nouvelle tentative de la part de sa « mère ». Cette dernière s'amusait à la faire souffrir psychologiquement. Avec difficulté, elle essaya de défaire ses liens, dans son état, ce n'était guère facile, elle était à genoux, les mains attachées dans son dos, afin de bloquer toutes tentatives de fuites. Heera essayait toujours de se libérer lorsque Jules entra.
- N'essaie pas de t'échapper, nous te réservons une fin des plus dignes.
Heera releva fièrement la tête, il n'était pas question de dévoiler la peur qui s'insinuait méticuleusement dans son esprit.
- Faites ce que vous voulez, je n'ai pas peur de vous, répondit-elle calmement, sûre d'elle.
- Très bien, alors brûler vive ne t'effrayera guère je présume, argua-t-il espérant lui faire peur.
Ses beaux yeux ardents ne faiblirent pas devant la menace, elle affrontait fièrement le sort qu'on lui réservait. Elle savait que Philippe la trouverait, Heera avait entièrement confiance en son mari, elle lui avait donné son cœur ainsi que sa vie. La jeune femme n'était en rien effrayée, sa vie était liée à celle de son mari aussi longtemps qu'il vivrait.
- Tu feras moins la fière lorsque tu te retrouveras prisonnière des flammes et tu sentiras la vie de ton enfant s'éteindre, ajouta-t-il, sournoisement.
Sur ces sombres paroles, il s'en alla. Heera essaya encore une fois de défaire ses liens mais sans grand résultat. Plus que jamais elle devait s'échapper, elle n'allait pas mourir ainsi. La jeune femme recommença plusieurs fois jusqu'à ce que ses poignets finissent en sang, sous la pression continuellement exercée.
« Il faut que je réussisse à sortir d'ici ! Je veux revoir Philippe ! Je veux voir mon enfant ! »
Ne pouvant plus supporter cette attente, le Comte s'apprêtait à se rendre chez Anise lorsque le téléphone sonna, il décrocha avec rapidité.
- Allô ! Heera, c'est toi ? Cria-t-il avec frénésie.
Un rire sinistre lui répondit et une voix féminine ajouta :
- Ta petite femme va périr dans les flammes ainsi que ton enfant ... Je vais te faire un petit cadeau, je te laisserai assister à sa fin. Elle se trouve dans le manoir abandonné à la sortie de la ville...enfin si tu arrives à temps.
À nouveau son rire sinistre résonna dans le combiné. Philippe n'attendit pas la suite et se rua vers la porte. Rapide comme l'éclair, il prit la voiture et fonça en direction du manoir, chaque seconde était essentielle à la vie de sa femme. En route, il prévint Velkan du lieu où elle était prisonnière. Conscient que la vie d'Heera était en danger, il accéléra la voiture au maximum.
Quelques minutes plus tard, il arriva devant le manoir, le bâtiment était déjà la proie des flammes rouge. Il se dégageait une fumée noire terrifiante à asphyxier plus d'une personne. Philippe fixait avec effarement l'immense feu qui assiégeait le manoir, alors que sa femme était à l'intérieur. Tel un forcené, il plongea dans les flammes avec tout le désir de sauver Heera. À peine eût-il fait un mètre, qu'il commença à suffoquer sous l'épaisseur de la fumée. Malgré tout, il trouva la force nécessaire de continuer et de parcourir toutes les pièces du manoir. La chaleur du feu ne l'aidait pas dans sa tâche et il avançait avec difficulté. Philippe se moquait bien de sa vie, tant qu'il pouvait sauver celles de sa bien-aimée et de son enfant.
C'est alors qu'il aperçut au bout du couloir enflammé, une porte à moitié ouverte et se dirigea vers elle en espérant y trouver sa femme. Après avoir évité de peu, une poutre enflammée qui s'était effondrée, il entra dans la chambre entièrement assiégée par les flammes. Se protégeant le visage à l'aide de ses bras, le comte avança à tâtons et, bientôt, il sentit sous ses doigts une silhouette gisant à même le sol. À l'instant où il toucha le corps inerte, le jeune homme comprit qu'il s'agissait d'Heera.
Bien que physiquement et psychologiquement épuisé, le Comte prit sa femme dans ses bras, non sans l'avoir recouverte d'un drap, et entreprit le chemin inverse priant à chaque seconde que sa femme ainsi que son enfant soient encore en vie. Le retour s'effectua dans les pires conditions car l'incendie avait pris de l'ampleur et embrasait une grande partie du manoir. Ses dernières forces le quittaient peu à peu. Il craignait de lâcher Heera à tout moment, tous ses muscles criaient de douleur et l'air devenait de plus en plus rare. Lorsqu'il aperçut la lumière du jour, il retrouva la force de continuer et de sortir de cet enfer. Sa principale préoccupation était de mettre Heera dans un endroit plus sûr que ces murs. Le jeune comte sentait le corps fébrile de sa femme et craignait qu'il ne soit trop tard.
Lorsqu' enfin il franchit la porte d'entrée, il s'éloigna le plus loin possible. C'est à ce moment précis que Velkan arriva et se rua vers le couple affalé à même le sol. Il était accompagné d'une ambulance qui les transporta à l'hôpital le plus proche. L'état de Philippe était sans gravité. Pour ce qui est de la jeune femme, le diagnostic n'avait rien de positif. Elle avait respiré beaucoup trop de fumée, cela tiendrait du miracle si l'enfant vivait encore.
Arrivés à l'hôpital, Velkan se chargea d'informer sa femme ainsi que les parents d'Heera de la situation actuelle. Ensemble, ils attendirent tous le diagnostic du médecin. Philippe fut le premier à sortir de sa léthargie et demanda sa femme. Lorsqu'on lui apprit qu'elle était toujours en salle d'opération, il voulait y aller contre l'avis des médecins dont il se moquait éperdument, sa femme avait besoin de lui, il se devait d'être là pour elle.
Les heures passaient avec une lenteur incroyable, l'horloge de l'hôpital affichait dix-sept heures lorsque le chirurgien en chef sortit de la salle d'opération. Toute la famille se précipita sur lui afin d'avoir de plus amples nouvelles.
- Nous avons dû effectuer une césarienne vue l'état de la jeune femme. Pour l'instant elle est encore sous l'effet de l'anesthésiant. Le bébé est en parfaite santé, c'est un miracle !
Sur cette bonne nouvelle, le chirurgien s'en alla. Et Philippe se rendit dans la chambre de sa femme, celle-ci dormait profondément, son visage reflétait un calme, tel qu'il en existe seulement après une tempête, mais n'avait rien perdu de sa beauté. Le jeune homme s'approcha et l'embrassa doucement.
Alors le déclic se produisit, le Comte sentit une réaction en réponse à son baiser. Lentement, elle ouvrit peu à peu les yeux, parcourut la chambre du regard, avant de s'attarder sur le visage heureux de son mari, un large sourire illumina son visage.
- Je savais que tu viendrais, Philippe. Je n'ai jamais perdu espoir, murmura-t-elle. Où est notre enfant ?
Au même moment, l'infirmière entra avec son bébé, la jeune femme se redressa avec effort. Mais elle put, enfin, prendre son enfant, après neuf mois de grossesse. Heera retenait difficilement les larmes qui perlaient de ses yeux en voyant ce beau bébé.
- Il est d'une grande beauté, dit tout simplement le père d'une voix grave teintée de fierté.
Certes le bébé était magnifique. Il avait un teint couleur caramel avec les yeux bleus de son père, ce qui présageait un succès évident auprès de la gente féminine tout comme son père avant lui.
- Il te ressemble, constata la jeune femme tendrement.
Elle faisait des grimaces à son fils, et un adorable sourire illumina son petit visage accompagné de deux adorables fossettes, la jeune femme fondit littéralement devant ce joli minois.
- As-tu décidé un prénom pour notre fils ? Demanda le jeune homme.
- Que penses-tu de Richard? Répondit Heera avec hésitation.
- C'est parfait ! S'exclama-t-il gaiement.
- Richard Louis Philippe DARCY, ajouta la jeune femme, qu'en dis-tu ?
- Tu sais bien que je suis toujours d'accord avec tes décisions.
Philippe se rapprocha et enlaça son épouse ainsi que son fils. Maintenant, ils pouvaient enfin vivre en paix. Ils savouraient ce moment merveilleux, lorsque le reste de la famille se pointa à l'entrée de la chambre. Tous arboraient un merveilleux visage souriant en voyant ce charmant tableau. Chacun à leur tour félicitait le jeune couple et faisait la queue afin de serrer le petit trésor dans leurs bras.
Légèrement en retrait, Philippe et Velkan étaient en grande conversation.
- La police a arrêté Anise ainsi que son complice, un ancien détenu. Ils en auront pour longtemps.
- Parfait, nous pourrons enfin vivre en paix, souffla le Comte.
Le jeune homme se détendit, tout le stress accumulé avait disparu. Il pouvait commencer la nouvelle vie qui s'ouvrait devant eux avec sa femme et son fils. Philippe se tourna vers le lit sur lequel se trouvait Heera, elle continuait de bercer Richard sous les regards attentionnés de la famille. Son visage s'illuminait de bonheur, de joie lorsque son regard se posait sur son mari. Tout l'amour qu'elle lui portait, y était écrit. Il l'avait sauvée au péril de sa vie, il n'y avait pas de plus belle preuve de ses sentiments envers elle. Jusqu'à la fin, elle n'avait cessé d'espérer que Philippe viendrait la sauver, Heera avait cru en leur amour et ils avaient triomphé ensemble des flammes de la mort.
- Ne te tracasse plus, Philippe ! Vous pouvez vivre pleinement, dit soudainement Velkan.
- Je l'espère.
- Par ailleurs, je vais devenir papa à mon tour, ajouta-t-il avec un sourire qui retenait difficilement sa joie.
Sur cette bonne nouvelle, le Comte le félicita, ainsi qu'Aymeric et Anja. La bonne humeur était revenue et ils en oublièrent presque cet affreux épisode, cela se termina dans la joie et le bonheur.
Leurs vies prenaient un nouveau départ et ils allaient goûter à la vie en famille.
Annotations