Chapitre 60

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L’abruti passionné

Nal’ki

Elle est là, devant moi, et je ne sais pas quoi lui dire. J’étais tellement sûr qu’elle ne viendrait pas que je ne me suis pas préparé à cette confrontation et me voilà paralysé. A sa place, ça fait longtemps que je serais parti loin d’ici. Ou alors je me terrerais dans un coin loin de tout pour ne pas me faire prendre. Mais non, elle, avec son courage, ou plutôt sa folie, elle vient dans le quartier des dirigeants ennemis alors que l’un d’eux sait qu’elle fait partie des rebelles. Et le pire, c’est qu’elle n’a pas l’air plus inquiète que ça. Je l’observe, prolongeant ainsi le silence qui s’est installé. Qu’elle est belle, toujours, avec sa veste en cuir et son débardeur bleu pâle. Ses yeux bruns me dévisagent, perplexes et je ne me suis toujours pas décidé sur la conduite à tenir. Finalement, après encore de longues secondes, je m’écarte un peu et lui fais signe de me suivre.

Me retourner et ne plus l’avoir dans mon champ de vision me fait du bien, j’arrive à mieux réfléchir et à retrouver un peu mes esprits. Mais il va falloir que je me reprenne rapidement car je ne vais pas pouvoir passer les prochains instants les yeux fermés. Je m’assois dans mon canapé et attends de voir ce qu’elle va faire.

— Assis-toi, indiqué-je. Je crois qu’il faut qu’on parle.

— J’imagine que tu ne m’as pas fait venir pour qu’on se regarde dans le blanc des yeux, effectivement, me répond-elle en s’installant à bonne distance, son corps tourné vers le mien, pas le moins du monde intimidée, il faut croire.

— Pourquoi es-tu venue ? Tu te jettes comme ça dans la gueule du loup sans crainte ? Qu’est-ce qui m’empêche de t’arrêter là tout de suite et de mettre fin au mouvement des Valkyries ? Tu ne devrais pas être partie à des kilomètres d’ici ?

— Je ne suis qu’une arme des Valkyries. Si tu m’arrêtes, il en restera encore beaucoup, prêtes à tout pour gagner leur liberté et se faire entendre… En toute honnêteté, une partie de moi est ici parce que tu as menacé de brûler ce qui me reste de mes parents. C’est une raison valable, non ? Sans doute pas la seule, mais c’est celle que j’avance.

— Tu dois avoir une bien mauvaise image de mon intelligence. Dire que je t’ai emmenée sur le vaisseau-planète sans même soupçonner que tu étais une Valkyrie ! Le loup dans la bergerie. Tu dois me prendre pour un idiot complet, si facile à manipuler. Un décolleté, un regard doux et hop, la grande perche oublie tout et on en profite. Je n’en reviens pas de m’être fait avoir aussi facilement.

— Je pourrais te dire que vous avez les mêmes faiblesses que les hommes de la Terre, au final. Un peu de peau visible à l'œil nu, quelques œillades et un semblant de drague et vous pourriez presque vendre père et mère… mais je vais surtout te rappeler que j’étais une Valkyrie avant que nous apprenions à nous connaître et que j’étais sincère avec toi. Je n’ai pas joué la comédie en ce qui nous concerne.

— Et comment je sais ça ? m’écrié-je presque en l’interrompant. Je suis un tel abruti que je suis incapable de savoir quand tu me dis la vérité et quand tu me mens… Mais ce n’est pas de ça dont nous devrions parler… Il y a des choses bien plus importantes maintenant que vous avez tout fait sauter. Il faut que j’oublie mon égo blessé et me concentre sur l’avenir.

Je suis pathétique, j’ai l’impression de geindre et je suis tellement loin de l’image que j’aimerais donner du mec en pleine possession de ses moyens, du dirigeant qui sait où il va, de l’homme qui n’a pas le coeur brisé de voir que la femme qu’il aime lui a menti sur toute la ligne. Mon cœur me dit de la croire quand elle dit qu’elle était sincère, mon cerveau me fait comprendre que je suis encore sous le charme et que cela m’empêche de voir la vérité en face.

— Pardon mais je n’en ai pas terminé, moi. Je ne t’ai jamais menti quand nous apprenions à nous connaître. Alors, certes, je t’ai caché mon côté Valkyrie, mais en même temps, tu t’attendais à quoi au juste ? Un petit salut, un verre déposé devant toi et un “oh, au fait, je suis une Valkyrie, Chéri. Mais ne t’inquiète surtout pas, hein, je suis une Valkyrie toute sage, prête à courber l’échine”. Tu me connais, non ? Est-ce que mes mots t’ont laissé croire que j’étais une fille sage qui acceptait la situation ? Je ne crois pas, même dans mon attitude tu aurais pu deviner ce que j’étais. N’est-ce pas ce qui te plaisait chez moi, au final ? Que je ne m’écrase pas à chacun de tes propos, que je te pousse à réfléchir à vos actes ?

Ce qui m’énerve avec Lévana, c’est qu’elle a toujours des arguments contre lesquels je ne peux lutter. Bien sûr qu’elle n’allait pas se dénoncer… Et oui, c’est clair que son côté insoumis et rebelle fait partie de ce qui la rend irrésistible. Mais la douleur de la trahison est toujours là et j’essaie de m’appuyer sur ça pour continuer la conversation.

— Moi, j’ai toujours été sincère avec toi. Je t’ai montré mes faiblesses, j’ai pris des risques pour toi, pour retrouver ta soeur, et j’ai l’impression que tu t’es juste servie de moi pour obtenir des infos sur le vaisseau-planète, sur les miens, pour retrouver ta soeur. Tu vois, ce mensonge sur ton appartenance aux Valkyries, ça remet tout en question pour moi. Parce que oui, je t’admire et tu me fais réfléchir sur nos actes. Je… non, j’ai dit que j’arrêtais de parler de mon cas personnel, cela n’aboutira à rien de toute façon. J’ai été stupide, je ne peux m’en prendre qu’à moi-même. Alors, passons aux choses sérieuses, sinon tu vas finir par croire que je ne suis qu’un type incapable d’oublier son chagrin et son désespoir.

Lévana reste silencieuse un moment sans pour autant cesser de m’observer, puis elle me surprend en se levant, poussant un lourd soupir avant de malmener ses cheveux de ses mains et de reprendre la parole plus fermement en se plantant devant moi.

— Tu ne comprends vraiment rien, hein ? Tu te rends compte de la position dans laquelle je me suis retrouvée ? Fricoter avec l’ennemi, céder à tes charmes, me rapprocher de toi ? Coucher avec toi, bon sang ! Sans parler de ce que j’ai pu ressentir à coucher avec l’un de ceux qui ont participé à tuer mes parents ! Tomber amoureuse de toi, devoir tout cacher à tout le monde ! Oui, je suis une Valkyrie, mais je ne suis pas que ça, tout comme tu n’es pas qu’un envahisseur ! Ces foutus sentiments s’en foutent qu’on soit ci ou ça, ils te tombent dessus et te foutent K.O sans s’inquiéter du tremblement de terre qu’ils causent !

— Tu as dit quoi, là ? Toi aussi, tu es amoureuse ? Ce… ce n’est pas possible, si ? Je suis plus qu’un simple amusement pour toi ? Tu as raison, je ne comprends vraiment rien…, me lamenté-je avant de sentir une de ses mains se poser sur mon épaule et l’autre sous mon visage pour le relever vers elle.

— Tu penses vraiment que j’aurais fauté avec toi juste pour te manipuler ou pour profiter de ton attirance pour moi ? Tu me vois réellement me rabaisser à ça ? Si c’est le cas, tu es vraiment un imbécile, tu as raison. Si pour toi, coucher avec une humaine, c’est juste coucher, moi j’ai fauté avec l’ennemi. Alors à minima, il fallait une attirance folle, en réalité, il s’agit de bien plus. Je t’aime, abruti, termine-t-elle en s’asseyant sur mes cuisses sans lâcher mon regard.

— Mais pourquoi avoir voulu m’éliminer avec cette bombe alors ? demandé-je, incrédule, en ne pouvant m’empêcher de caresser ses cheveux, l’autre main sur sa hanche pour la stabiliser.

— Tu ne devais pas être là… Nos… l’une de nos sources nous avait affirmé que tu n’y serais pas. Imagine ma surprise quand je t’ai aperçu… j’ai tellement eu peur que tu sois blessé.

— Vos sources ne sont vraiment pas fiables, dis-je de manière plus apaisée pour la première fois de la soirée. Parce qu’on était tous obligés d’être présents… Moi, ce que je voulais, c’est être au bar, pas avec Lezeboth, tu peux me croire… Et… je dois être aussi fou que toi parce que j’ai envie d’être fâché, j’ai envie de faire semblant de continuer à me disputer avec toi mais en réalité, tout ce dont j’ai besoin, là, tout de suite, c’est de t’embrasser parce que moi aussi, je t’aime, Lévana. Je suis sûrement un abruti, mais un abruti parce qu’il est amoureux, ça excuse ma bêtise, non ?

La jolie brune sourit et se penche pour déposer ses lèvres contre les miennes dans un chaste baiser qui s’enflamme rapidement. On dirait que les digues ont craqué et elle cède à toutes mes avances. Dès que ma langue s’invite entre ses lèvres, elle l’aspire avec gourmandise. Nous nous retrouvons à nous galocher comme des adolescents en manque. Et en manque, nous le sommes assurément. Quelle réponse à mes doutes, à mes interrogations ! Dire que je l’ai faite venir pour discuter de l’avenir de la planète, des stratégies d’alliance à développer pour faire face à notre Conseil qui a perdu la tête et qu’on se retrouve à parler de nous, de notre amour réciproque, de nos envies…

— Tu peux me le dire encore, que tu m’aimes ? lui demandé-je en souriant alors que ses mains se sont glissées sous ma chemise et que je sens déjà ses doigts caresser mon torse.

— Avec ou sans le petit surnom “abruti” ? glousse-t-elle avant de reprendre un air sérieux en empaumant mon visage de ses mains. Je t’aime, Nal’ki.

Purée que c’est bon de l’entendre le dire ! Cela me fait tout oublier, les Valkyries comme le Conseil, la Terre comme le vaisseau-planète, le monde extérieur n’existe plus, il n’y a plus qu’elle et moi. Et j’ai de la chance car elle est collée contre moi et m’a déjà retiré ma chemise. Je sens sa bouche dans mon cou, ses mains sur mes épaules et je ne suis pas en reste. La veste est à mes pieds avec le débardeur et j’ai empaumé ses seins. C’est vrai qu’ils me font perdre la tête, qu’ils me font perdre mes moyens mais là, j’ai retrouvé toute la confiance que j’avais perdue. C’est fou comme ces mots ont changé la dynamique de la soirée. J’étais malheureux et désespéré, me revoilà conquérant et plein de désirs et d’envies. Et Lévana semble apprécier ce changement d’humeur vu avec quelle ardeur elle défait mon ceinturon et me débarrasse de mon pantalon alors que je la surplombe, conquérant.

— Maintenant que je sais que tu m’aimes, je te promets une chose, indiqué-je d’une voix rendue rauque par le désir. Plus jamais je ne serai un abruti !

Je ne la laisse pas me répondre avec un de ces commentaires bien acérés dont elle a l’habitude et reprends possession de ses lèvres avant de finir de la déshabiller. Elle tente de résister et de reprendre le dessus mais je ne la laisse pas faire. Je parviens à immobiliser ses bras au-dessus de sa tête et souris quand elle grogne alors que je m’amuse à frotter mon sexe tendu contre son intimité trempée sans la pénétrer. Mais la coquine est agile et parvient en ondulant avec force à se positionner de telle sorte à ce que mon corps s’unisse enfin au sien, nous faisant pousser à tous les deux un gémissement de plaisir. Et là, nos instincts primitifs reprennent le dessus. Me sentir en elle est un bonheur qui n’a aucun équivalent. Elle m’englobe et gémit sans aucune retenue alors que nos mouvements se coordonnent, faisant monter rapidement notre plaisir vers des sommets qui n'appartiennent qu’à nous. Lorsque ma main glisse entre nous et que je caresse ce renflement qui la rend folle, elle bascule la tête en arrière et jouit alors que j’explose à mon tour en elle, me souvenant juste à temps de ne pas lancer le mécanisme pour la faire tomber enceinte. La phase deux, ce n’est pas pour maintenant. Là, nous en sommes à la phase du plaisir partagé, ma colère et mes ressentiments sont oubliés et je viens de faire l’amour à la femme que j’aime et qui m’aime en retour. Ce soir, je suis au paradis, c’est tout ce qui compte.

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