Prologue

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Ploc, Ploc, Ploc…

Des gouttes d’eau tombaient à intervalles réguliers devant les yeux de la jeune femme. Ce bruit constant lui donnait envie de s’arracher les cheveux et son ouïe surdéveloppée n’arrangeait en rien la situation.

  • Respire, Meril, se-dit-elle à voix haute.

Elle prit une profonde inspiration en gonflant la poitrine, bloqua le tout quelques secondes avant de le relâcher en une longue expiration libératrice. Elle recommença l’exercice plusieurs fois, faisant peu à peu abstraction de son environnement et du bruit dérangeant.

La douleur brûlante à ses poignets lui revint malgré tout à l’esprit. Elle leva la tête pour voir ce qu’elle avait déjà analysé de nombreuses fois depuis son enfermement. Des menottes maintenaient ses mains et ses pieds attachés au mur de pierre dans une position en forme de croix. Cela faisait des jours qu’elle tenait debout, entravée, contre son gré. A son arrivée, elle s’était bien demandée comment elle allait pouvoir dormir ainsi. Elle devait pourtant l’admettre à présent, c’était tout à fait possible, quoique, très inconfortable. Ses muscles et ses articulations la lançaient. Elle aurait tant donné pour pouvoir s’asseoir ne serait-ce qu’une minute.

Ses yeux étaient cernés et tuméfiés, elle sentait la pellicule de crasse sur son corps engourdi. Les récentes marques de fouet la tiraillaient, sa bouche était pâteuse, une de ses lèvres, fendues. Elle avait si faim, si soif. Son ventre protesta de nouveau. Il était bientôt l’heure du rendez-vous avec son garde pour un nouveau repas en tête à tête. Repas était d’ailleurs un bien grand mot. Elle était toujours à deux doigts de vomir sur le geolier la bouillasse grumeleuse qu’il la forçait à manger.

Elle regarda encore une fois les lieux dans lesquels elle était séquestrée. Aucune fenêtre. La petite pièce était obscure, humide et faite de pierre. Seule la porte dénotait. C’était une grille en fer toute simple, à travers de laquelle le garde passait son temps à jouer les voyeurs. À croire que la jeune femme lui plaisait. Il devait vraiment s’être attaché à son rôle de nounou. Meril n’avait cependant pas de temps à lui consacrer. Elle devait sortir d’ici au plus vite, ses amis étaient en danger. Il était également clair que la mort planait sur elle. Elle la sentait d’ailleurs imprégner les lieux. Un squelette était assis dans un coin de la cellule et ce seul camarade de chambrée n’était malheureusement pas très bavard.

Un cri retentit soudain au loin. Intriguée, Meril pencha la tête de côté. Une minute passa et un nouveau hurlement s’échappa, bien plus fort cette fois-ci. Il semblait désespéré et familier. L’angoisse s’empara de la jeune femme. Elle se concentra sur son ouïe de toutes ses forces en fermant les yeux. De son sous-sol, elle réussit à sentir l’agitation régner quelques étages plus haut. Des voix enflèrent, des ordres à demi-camouflés étaient prononcés. « Attrapez-le ! ». Une explosion se fit entendre, les murs tremblèrent, de la poussière tomba du plafond. On hurlait dans tous les sens, Meril ne savait plus où diriger son attention. Puis elle l’entendit, faiblement mais assurément, ce bruit de pas feutrés dans les escaliers. Quelqu’un descendait. Il était là, tout près, elle le sentait.

Une protestation étouffée, un gargouillement, le cliquetis de clés.

Les pas se rapprochèrent et s’arrêtèrent devant la grille. Les yeux de la jeune femme s’humidifièrent lorsqu’elle reconnut la silhouette de l’homme qui insérait la clé dans la serrure. La porte s’ouvrit dans un grincement. Son sauveur était là devant elle, paniqué par la scène misérable qu’elle lui offrait.

  • Meril, mais qu’est-ce qu’ils t’ont fait ? fit l’homme en s’arrêtant à l’entrée de la pièce.
  • Vite, dépêche-toi, on n’a pas le temps.

Elle ne pouvait pas ne pas se rappeler l’animosité qui les opposait et se devait de rester digne avant tout. Elle ravala donc ses larmes. Trop accaparée par l’instant, la jeune femme n’entendit pas les nouveaux pas dans les escaliers et ne se rendit pas compte du danger qu’ils représentaient. Un sifflement retentit soudain dans les airs. La flèche d’une arbalète transperça le flanc du sauveur alors qu’il s’approchait de la prisonnière. L’homme ouvrit grand les yeux sous l’impact et les plongea dans ceux de Meril. Elle le vit s’affaisser au ralenti.

  • Non, non, non…

Puis tomber à genoux.

  • Pas ça, pitié !

Pour venir s’effondrer au sol à ses pieds.

  • NON ! hurla-t-elle dans une plainte animale, de chaudes larmes dévalant son visage.

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