Le silence dans la Grande Salle était presque religieux, seulement troublé par les froissements d’un parchemin que McGonagall déplia soigneusement.

Le Choixpeau magique s'étirait paresseusement sur son tabouret. Ses coutures craquèrent légèrement alors qu’il bâillait à s’en fendre la doublure.

— On me réveille pour ça ? grommela-t-il. Cinq têtes pleines de secrets, d’éclats et de complications… J’vous jure, plus personne ne respecte ma retraite.

Un léger rire courut dans les rangs. Les élèves se penchaient déjà en avant, avides.

Harry, assis à la table des Serpentard, regardait droit vers les cinq elfes en file. Son regard s’attarda sur Sophie. Elle tenait bon. Mais il voyait la tension dans sa mâchoire.

McGonagall lança :

— Sophie Foster.

Elle s’avança, digne, presque trop calme. Keefe la regarda s’éloigner, puis glissa à Fitz, à mi-voix :

— Elle marche comme une guerrière elfe en mission secrète. Tu crois qu’elle pourrait aimer un brun un peu cabossé avec de l’humour à la place du cerveau ?

Fitz ne sourit pas.

— Je pense qu’elle mérite quelqu’un qui l’aime plus qu’il ne joue.

Keefe haussa un sourcil, un sourire tordu aux lèvres.

— Touché.

Sophie s’assit. Le Choixpeau lui tomba sur la tête, lui voilant la vue.

— Oh, toi, murmura-t-il dans son esprit. Tu viens de loin. Une magie étrange. Légère en surface… mais puissante, ancienne. Tu te caches bien. Curieuse, intelligente, résiliente… Tu pourrais briller en Serdaigle. Être loyale comme une Poufsouffle. Mais ce n’est pas la vérité. Non… tu veux comprendre ce qu’on te cache. Tu veux protéger, oui, mais à ta façon. Tu es prête à défier les règles. À faire ce qui est nécessaire. Et surtout… tu refuses qu’on te contrôle.

Il se tut un instant, puis déclara :

— SERPENTARD !

Les applaudissements furent timides. Beaucoup de regards se croisèrent.

Sophie retira le Choixpeau lentement et rejoignit la table verte et argent. Harry lui fit un léger signe de tête. Elle le lui rendit, mais ses joues avaient un peu rosé. Cho Chang la regardait fixement depuis la table des Serdaigle, le regard noir.

—

— Fitz Vacker.

Fitz avança, le menton haut, la mâchoire serrée. Il portait cette élégance froide qu’on ne pouvait pas simuler.

Le Choixpeau s’enfonça sur sa tête.

— Un esprit discipliné… une noblesse sincère… mais une tempête sous le masque. Tu veux qu’on te voie comme fort, fiable, parfait… Mais tu as peur. Peur de décevoir. Peur de perdre. Tu as du cœur. Du feu. Du courage, oui.

— GRYFFONDOR !

Des exclamations enthousiastes fusèrent de la table rouge et or. Fitz s’y rendit sans un mot, mais s’installa en bout de table, à distance. Son regard fila malgré lui vers Sophie.

Il fronça les sourcils. Harry était assis trop près d’elle à son goût.

—

— Keefe Sencen.

Il monta les marches en sautillant, fit une petite révérence en direction des professeurs, et s’assit avec désinvolture.

— Ah, celui-là… soupira le Choixpeau. Quel théâtre ! Tu caches bien ton cœur, petit malin. Un cœur lourd, mais vaste. Tu refuses la douleur en la tournant en plaisanterie. Fidèle jusqu’au bout. Rebelle sans cause apparente… Et pourtant, tu serais un chef né. Tu veux changer les choses à ta manière. Et ta manière… est unique.

Il laissa passer un silence dramatique.

— POUFSOUFFLE !

Un silence de surprise. Puis des applaudissements joyeux.

— Voilà ! lança Keefe en se levant. Je suis officiellement l’abeille la plus charismatique de l’histoire de la ruche.

Il rejoignit sa nouvelle maison avec un clin d’œil à Sophie. Elle le vit. Et, pour la première fois depuis son arrivée, elle esquissa un sourire sincère.

Fitz, lui, détourna le regard.

—

— Biana Vacker.

La salle retint son souffle. Sa beauté éclatante, son maintien parfait… tout chez elle attirait les regards.

— Fascinante, murmura le Choixpeau. Tu sais manipuler les apparences, mais ton intelligence est redoutable. Tu veux être plus que ce qu’on attend de toi. Pas une ombre. Pas une figurante. Tu veux voir le jeu de l’intérieur… pour mieux le réécrire.

— SERDAIGLE !

À la table bleue et bronze, on l’accueillit comme une célébrité. Biana s’installa entre deux élèves de septième année, déjà captivés.

Ron Weasley n’avait toujours pas cligné des yeux.

Hermione, elle, ne disait plus rien. Mais son regard brûlait.

—

— Dex Dizznee.

Le dernier s’avança, visiblement mal à l’aise. Il trébucha presque sur la marche.

— Humilité, souffla le Choixpeau. Créativité. Courage discret. Une loyauté sans faille. Tu veux construire, réparer… mais tu es prêt à te battre pour ce que tu crois juste. Cela suffit, et de loin.

— GRYFFONDOR !

Dex fonça vers Fitz, qui lui tapa l’épaule sans cesser de surveiller la table des Serpentard.

—

Une fois tous installés, Dumbledore se leva.

— Ainsi, nos cinq visiteurs ont trouvé une maison. Peut-être pas un foyer encore… mais un début. Je vous encourage à les traiter comme des camarades. Pas comme des anomalies.

Il sourit.

— Et puis… à Poudlard, personne n’est vraiment ordinaire, après tout.

Mais les regards… racontaient autre chose.

À la table de Serpentard, Harry jeta un œil à Sophie.
Elle était droite, calme. Mais elle sentit ses yeux, et tourna lentement la tête.

Ils se regardèrent une seconde de trop.

À la table de Gryffondor, Fitz vit cette seconde. Il ne dit rien, mais laissa tomber sa fourchette. Le métal tinta contre la vaisselle.

Keefe, lui, regarda aussi la scène. Et souffla à mi-voix, pensif :

— T’as vu comment elle le regarde ?

Fitz répondit sans détour :

— C’est pas lui qu’elle regarde. C’est où elle se sent en sécurité.

Keefe eut un sourire plus triste qu’il ne voulait l’admettre.

— Peut-être. Mais ça fait un sacré mal au cœur, quand c’est pas toi