L'homme au masque

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Je me tiens face à la maison, qui est plongée dans l'obscurité. Je m'approche de la porte, tourne lentement la poignée, mais elle est fermée, comme je me l'imaginais. Je suis sur le point de contourner la demeure pour trouver une autre entrée lorsque je remarque trois points lumineux approcher. Je me retourne pour découvrir les trois humains avec qui j'ai déjeuné. Ils m'adressent de grands sourires.

- Que faîtes-vous là ? leur demandé-je.

- Je me doutais que tu viendrais fouiner par ici, m'avoue Félicien.

- Il nous a fait part de ses doutes et nous avons décidé de tous t'accompagner, ajoute Célestin.

- C'est ce que font les vrais amis, conclut Elsa.

- Qui dit que nous sommes amis ? rétorqué-je.

- Est-ce que tu nous fais confiance ? me demande le jeune homme aux yeux bleus.

Je soutiens son regard pendant quelques secondes, puis le pose sur les deux autres, à la suite de quoi je réponds :

- Je vous accorde une certaine confiance parce que je sais que vous êtes des personnes bienveillantes.

- Nous te faisons aussi confiance. Cela suffit à lier une amitié.

- Si vous le dîtes. . . Mais ne perdons pas plus de temps.

Je contourne la maison, mais ne trouve aucune fenêtre ouverte. Je me dirige donc vers la porte vitrée donnant sur le jardin et introduis doucement ma griffe à l'intérieur. Je me concentre ensuite, agitant mon doigt jusqu'à entendre le fameux "clic" indiquant le déverrouillage. J'ouvre la porte sous les yeux stupéfaits de mes compagnons.

- Comment as-tu fait ça ? ! s'exclame Félicien.

- Chut. . . lui intimé-je en posant un doigt sur ma bouche.

Nous entrons à l'intérieur, moi en tête. Les lieux sont obscurs et poussiéreux, comme si personne n'était venu depuis des mois. . . mais nous savons que ce n'est pas le cas.

- Qu'est-ce que nous cherchons ? me demande Elsa.

- N'importe quelle trace qu'aurait pu laisser l'intrus ici. N'importe quoi concernant la mort de Léo ou les harceleurs du lycée. Tout ce qui pourrait vous sembler important ou du moins intéressant.

Ils hochent la tête. Nous traversons la cuisine et nous retrouvons dans le salon. Je remarque un escalier menant à l'étage. Je me dirige vers ce dernier en déclarant :

- Je fouille en haut.

C'est à cet étage que j'ai aperçu une fenêtre éclairée, ce matin.

- Je t'accompagne ! m'informe la jeune blonde en m'emboîtant le pas.

- Je reste chercher ici, décide Félicien. Célestin, accompagne donc ces demoiselles. Elles ne doivent pas rester sans protection.

Ce dernier acquiesce avec un sourire et nous suit. Les marches en bois craquent sous nos pieds. Je marche directement vers ce que je pense être l'endroit où se trouvait l'inconnu. La porte est entrouverte. Je la pousse tout doucement et entre dans ce qui est une chambre. Une chose me frappe aussitôt :

- Cet endroit est propre contrairement au reste de la maison, comme s'il venait d'être nettoyé récemment. . .

- En effet, confirme Célestin en passant son doigt sur la table de chevet.

- C'est la chambre de Léo, lâche sa soeur d'une voix tremblante en éclairant un cadre accroché au mur.

Il contient une photographie représentant un adolescent aux cheveux clairs et aux yeux dorés, souriant de toutes ses dents.

Je suis sur le point de me diriger vers le fond de la chambre pour l'inspecter plus profondément lorsque nous entendons des bruits de lutte et un cri de douleur, puis la voix de Félicien nous hurler :

- Attention ! Il arrive vers vous ! Il est armé !

- Félicien ! s'exclament mes deux compagnons.

Je me tourne vers la fenêtre. Si j'étais seule, j'aurais pu m'échapper aisément en me changeant en chauve-souris, mais je ne peux pas partir en abandonnant ces deux-là.

- Je le retiens, dis-je à Célestin. Prends ta soeur et va-t-en vite.

- Et t'abandonner ici ? ! s'écrie-t-il. C'est hors de question !

- Il a raison, renchérit l'adolescente. Nous partons d'ici tous ensemble ou nous restons tous ensemble, mais personne n'a le droit d'abandonner personne ! Ce ne serait pas digne de véritables amis !

Je n'ai pas le temps de les raisonner : un homme habillé de noir, portant un masque de tragédie greco-romaine à l'expression menaçante, apparaît sur le seuil de la chambre. Célestin se place devant nous en lui criant :

- Qu'as-tu fait à Félicien ?

L'inconnu ignore sa question, poursuivant son avancée vers nous. Je remarque aussitôt le couteau qu'il tient à la main et prends la place de l'adolescent en tête de file. C'est le moment qu'il choisit pour bondir vers nous. Je me baisse un peu pour esquiver la lame et attrape ses bras pour l'empêcher d'atteindre mes protégés. Je me sers de ma force surhumaine pour le repousser dans le couloir. Il se cogne contre la balustrade et tombe sur le parquet. Je me précipite en dehors de la chambre en intimant aux deux autres :

- On descend !

Ils me suivent en courant, mais l'homme masqué se redresse brusquement et attrape le bras d'Elsa. Elle pousse un hurlement, tandis que son aîné attrape son poignet pour la tirer vers lui. L'étranger lui envoie un coup de poing dans le visage, qui lui fait lâcher prise et tomber au sol !

- Célestin ! crie sa soeur.

Je glisse sur le sol pour le tâcler. La jeune fille profite de sa chute pour se libérer et courir s'agenouiller à côté du jeune homme, toujours au sol. Je tire profit de ce moment de confusion : j'ouvre mon sac et murmure à Lamain :

- C'est à toi de jouer.

Il s'empare du fil se trouvant dans mon sac et l'attache habilement à l'un des barreaux de la balustrade. Pendant ce temps, je saute par-dessus notre agresseur et attrape les mains des deux humains pour les entraîner dans l'escalier. L'homme au masque tente de nous rattraper, mais au moment il se remet debout, mon domestique préféré tend le fil devant lui, le faisant tomber à nouveau. Je me retourne un bref instant pour lui faire signe de nous suivre et descends les marches au pas de course. Arrivée en bas, j'appelle :

- Félicien !

J'attends quelques secondes, mais aucune réponse ne nous parvient. Je hurle donc à nouveau :

- Félicien ! Où es-tu ?

- Cette fois-ci, sa voix me répond :

- Je suis là !

Cela vient de l'extérieur. Nous courons dehors pour trouver le jeune homme adossé à l'un des murs de la maison, essoufflé. Il tient fermement sa main contre lui. Elle est ensanglantée.

Elsa étouffe un cri et Célestin, bien qu'encore quelque peu sonné par le coup qu'il vient de recevoir, parvient à s'agenouiller à côté de son ami pour s'enquiérir de son état.

- Il a la main percée !

- C'est cet homme masqué qui m'a attaqué. . . lâche-t-il en gémissant de douleur. J'ai tenté de le retenir, mais il m'a planté son couteau dans la main et est monté vous voir. Est-ce que ça va ?

- Hormis Célestin, personne n'a été blessé, le rassuré-je.

- Prends mon foulard, dit la jeune fille en détachant le tissu rose attaché dans ses cheveux blonds.

Elle se penche vers lui pour lui bander la main. Le jeune homme lui sourit :

- Merci, Elsa. Tu es vraiment une chic fille !

Elle rougit sous le compliment.

- Est-ce que nos deux blessés peuvent se relever ? leur demandé-je.

- Oui, ça va aller, dit Félicien en se remettant sur pieds.

Célestin tente de l'imiter, mais il titube encore un peu. Je viens placer un bras autour de lui pour le soutenir et déclare :

- Partons. Notre agresseur semble ne plus vouloir nous suivre. Je crois que son objectif était de nous faire sortir de cette maison, preuve qu'il a quelque chose à cacher ici, mais il va certainement effacer les preuves, maintenant.

- Éloignons-nous tout de même d'ici, soutient Elsa. Cet individu est dangereux. Les garçons ont déjà été blessés. Je ne veux pas rester à proximité.

J'acquiesce et m'éloigne, aidant toujours Célestin à avancer. Sa petite soeur propose :

- Je devrais accompagner Félicien à l'hôpital. Sa plaie est plutôt profonde.

- Et rentrer seule ? rétorque son aîné.

- Maman travaille là-bas en ce moment. Je rentrerai avec elle.

- Comment comptes-tu expliquer sa blessure ? lui demandé-je.

- Je leur dirai que je me suis blessé par mégarde lors de notre expédition nocturne. Ils vont penser à un autre jeune maladroit et inconscient parmi tant d'autres et ils ne creuseront pas.

- Ne serait-ce pas une meilleure idée de tout leur dire ? demande l'adolescente.

- Nous n'avons pas suffisamment de preuves à leur fournir. Ils ne croiront pas à nos théories sans cela et encore moins à l'histoire de notre homme masqué, lui explique Félicien.

J'ai bien une preuve : les conversations téléphoniques entre mes victimes et "Némésis", mais cela impliquerait de tout leur avouer sur ma véritable nature et je ne peux pas me permettre de mettre ma famille en danger.

C'est en pensant à cela que je sens Lamain grimper le long de mes jambes et de mon dos pour se glisser dans mon sac. Me voilà rassurée quant à lui.

- Fais comme Félicien a dit, ordonné-je à Elsa. Je raccompagne ton frère à la maison.

- Et toi ? rétorque-t-il. Tu comptes rentrer seule ?

- Tu as bien vu que je suis capable de me défendre, alors ne t'en fais pas pour moi.

La jeune fille hoche la tête et s'éloigne avec le blessé. Je prends avec Célestin le chemin de sa maison.

C'est alors que j'entends un liquide tomber par gouttes au sol. Il est rouge et épais. C'est du sang. . .

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