- Je ne savais pas quoi faire alors je me suis juste enfuie en courant. . . finit-elle en sanglottant.

Célestin passe ses bras autour d'elle. Il semble au bord des larmes. Je me sens aussi trahie : j'avais toute confiance en Félicien. Je le considérais comme mon ami. . .

Je serre les poings.

- Ce n'est pas le moment de pleurer, les interrompé-je. Nous devons confronter ce traître, mais pour cela. . . J'aurai besoin de vous. Plus spécialement de toi, ajouté-je en plongeant mes yeux rouges dans ceux de la jeune fille. Félicien semble avoir une affection toute spéciale pour toi. . . Nous allons nous en servir.

- Je ne veux pas faire quoique que ce soit qui ressemble à se servir des sentiments des autres ! rétorque-t-elle.

- Tu crois que lui ne s'est pas servi de nos sentiments à tous ? Il a abusé de notre confiance. Nous allons juste utiliser la méthode du tueur tué.

- Tu veux dire. . . l'arroseur arrosé. . . rectifie son aîné.

- Peu importe. C'est la même chose. Tu vas aller le retrouver et faire la conversation avec lui pour le distraire. Enregistre-la, au cas où il se trahit avec ses mots. Cela nous fera une preuve à donner aux autorités locales.

- Tu comptes le livrer à la police ? me demande le jeune homme.

- Le harcèlement n'est-il pas puni par la loi ?

- Si, mais tu oublies une chose : ce que recherchent actuellement les policiers, ce n'est pas un harceleur, mais un tueur.

- Je sais, mais la mort de ces innocents est la conséquence de ses actes : s'il ne les avait pas poussés à harceler leurs camarades, je ne les aurais pas pris en cibles. Il a engendré une série de malheurs en un seul acte. Voilà pourquoi il faut toujours réfléchir avant d'agir. Sans compter que nous avons pu constater dans la maison de Léo qu'il est prêt à tuer pour atteindre son but. . .

- Je ne comprends pas. . . Quel est ton plan ? m'interroge Elsa.

- C'est simple : tu te charges de le distraire, puisque tu es celle qu'il semble le plus apprécier et donc celle dont il se méfie le moins. Pendant ce temps, Célestin et moi allons fouiller son appartement à la recherche de preuves. Une fois que nous les aurons, j'ajouterai à celles-ci les téléphones de mes victimes contenant les messages de menace de "Némésis". Nous appellerons ensuite la police et irons confronter Félicien en attendant qu'ils arrivent.

- Quand commençons-nous ? me demande Célestin.

- Ce soir-même.

Ils échangent un regard malaisé. Je leur explique donc :

- Voilà pourquoi nous devons le faire ce soir : s'il se rend compte que vous êtes subitement mal à l'aise avec lui, il se doutera de quelque chose et cachera encore une fois les preuves. Nous devons le prendre de court. C'est notre seule chance de l'avoir.

- Je ne vois qu'un seul défaut à ton plan. . . avoue l'adolescent. Elsa sera seule face à Félicien. Si jamais il se rend compte de quelque chose, il pourra lui faire du mal avant qu'on ait le temps d'intervenir. Je n'aime pas ça. . .

- Ne t'en fais pas. J'ai pensé à cette éventualité et je n'ai pas non plus l'intention de perdre aussi bêtement ma meilleure amie. Je vais demander à papa de te donner l'une de ses potions soporifiques. Il en a toujours quelques-une de prêtes car cela fait partie des préparations les plus demandées. Si jamais tu te sens menacée par lui, jette-la au sol et retiens ta respiration. Il s'endormira en quelques secondes.

Elle acquiesce lentement, puis nous confie :

- Je ne sais pas si je vais réussir à le distraire correctement. . . J'ai envie de pleurer rien qu'en pensant au fait qu'il est notre ennemi depuis le début, alors me retrouver face à lui en sachant ça. . .

Je pose une main sur la sienne :

- Je crois en toi. Je ne t'aurais jamais confié ce rôle autrement. Si vraiment tu ne peux pas t'empêcher de pleurer, fais-lui croire que c'est pour une autre raison. Cela le distraira encore plus et tes sanglots couvriront les bruits que nous pourrions faire.

- D'accord, accepte-t-elle en hochant la tête.

- Je vais aller chercher la potion. Je vous retrouve en bas. Lamain, ajouté-je en me tournant vers mon domestique préféré, cache-toi sur Elsa et reste avec elle. Je compte sur toi pour briser l'autre poignet de Félicien si jamais il ose s'en prendre à elle.

- L'objectif n'est pas de le blesser, mais de comprendre ses raisons d'agir et de rétablir la justice en le confiant aux autorités, me rappelle la jeune fille.

- Je n'ai pas l'intention de le blesser. . . la rassuré-je. Il t'a brisé le coeur, je vais transpercer le sien.

- Et la police ? s'étonne Célestin en levant un sourcil.

- Ils ne seront que des instruments dans cette opération chirurgicale sanglante. . .

- Je ne comprends pas bien. . . Tu as l'intention de le faire arrêter ou de le tuer ?

- Nous verrons bien laquelle de ces deux cartes les événements me feront poser. . .

Ils échangent un regard confus, puis haussent les épaules et se dirigent vers la sortie. C'est alors que je sens huit pattes grimper le long de mon bras. Je me tourne vers leur propriétaire et dis :

- Bien sûr que tu viens. Je ne vais pas te laisser manquer ce spectacle. . .