Secrets et sorties interdites
Le ciel s’était couvert d’un gris pâle ce matin-là, et une bruine fine tombait sur les vitres du château. Dans la Grande Salle, l’excitation régnait : c’était la première sortie à Pré-au-Lard de l’année, et les élèves de troisième année s’agitaient, leurs écharpes enroulées autour du cou, les poches pleines de gallions, prêts à dévaliser Honeydukes et Zonko.
Louise, elle, restait assise à côté de Harry, une tartine à moitié entamée dans son assiette. Elle avait la mine boudeuse. Devant elle, son autorisation non signée traînait toujours, inutile.
— Tant pis. On reste coincés ici comme des prisonniers, grogna-t-elle.
— On aurait dû falsifier les signatures, murmura Harry.
— Et risquer l’expulsion ? Bof. Même pour une Bièraubeurre, c’est un peu risqué.
Au bout de la table, Fred et George discutaient à voix basse. Ils lançaient de temps à autre des regards discrets vers Louise. Puis, comme s’ils s’étaient décidés, ils quittèrent leur groupe d’amis et vinrent la voir.
— Louise, dit Fred d’un ton hésitant. Tu restes au château, hein ?
Elle haussa un sourcil.
— Oui. Et je sens que vous allez encore me proposer un plan débile.
George grimaça, puis fouilla dans sa robe pour en sortir un parchemin ancien, replié en huit, un peu froissé, aux coins usés.
— Pas débile. Pratique.
Louise le prit, intriguée.
— C’est quoi ça ?
— Un objet très... particulier, dit Fred en jetant un regard autour de lui. Mais tu dois jurer de ne jamais le montrer à Rusard, ni à Rogue. Jamais.
— Ni à Percy, ajouta George avec un frisson.
— Surtout pas à Percy, répéta Fred.
— Bon, allez, ouvrez-le, dit Louise, déjà fascinée.
George sortit sa baguette et tapota doucement le parchemin.
— Je jure solennellement que mes intentions sont mauvaises.
Les traits d’encre commencèrent à se dessiner sur le parchemin, révélant peu à peu un plan animé du château de Poudlard, avec ses escaliers, ses salles secrètes, et surtout… des petits points marqués par des noms d’élèves qui se déplaçaient en temps réel.
Louise écarquilla les yeux.
— C’est… c’est une carte magique ?!
— La carte du Maraudeur, dit Fred avec un sourire fier. On l’a piquée dans le bureau de Rusard en première année. Ça fait trois ans qu’on s’en sert pour échapper aux patrouilles.
— Et pour passer en douce à Pré-au-Lard sans autorisation, ajouta George.
Fred lui tendit un doigt.
— Il y a un passage secret derrière la statue de la Sorcière borgne. Tu appuies sur la verrue de son nez avec ta baguette. Ça t’emmène jusqu’à la cave de Honeydukes.
Louise ouvrit la bouche, bouche bée.
— Et vous me donnez ça… à moi ? Pourquoi ?
George sembla un instant embarrassé.
— T’es pas juste notre sœur de cœur, murmura-t-il.
Fred regarda ailleurs, les joues rougissantes.
— Et… on se dit que t’en auras plus besoin que nous maintenant. On connaît tous les passages par cœur, de toute façon.
Louise sentit son cœur se serrer légèrement. Elle savait que Fred et George ne disaient pas tout. Mais elle comprit ce qu’ils lui offraient : une part de liberté, un secret, un pouvoir.
— Merci, dit-elle simplement, émue.
— Ah, et pour l’effacer, ajouta Fred, tu dis : “Méfaits accomplis.”
Ils se levèrent en même temps.
— Profite bien. Et fais attention à Rogue.
— Surtout à Rusard. Il te reniflerait sous une cape d’invisibilité.
Ils s’éloignèrent en riant, rejoignant le groupe de Gryffondor qui s’apprêtait à descendre vers Pré-au-Lard.
Louise resta un instant immobile, la carte refermée dans ses mains, son regard fixé sur les lettres délavées : “Messieurs Lunard, Queudver, Patmol et Cornedrue sont fiers de vous présenter...”
Harry s’était rapproché, intrigué.
— C’est quoi ?
Louise lui lança un sourire complice.
— Un secret à partager. À deux seulement.
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