Une famille parfaitement heureuse. . . En apparence seulement. . .

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La femme range la serpillère, puis fait rapidement le tour de l'appartement et esquisse un sourire satisfait : tout est enfin propre et ordonné. Elle se dirige d'un pas décidé vers la cuisine pour sortir du réfrigérateur quelques légumes, qu'elle commence à éplucher. Au même moment, les pleurs d'une enfant retentissent. Elle se retourne pour découvrir une petite fille sur le seuil de la porte, qui essuie ses larmes en sanglotant.

- Tu es réveillée, ma chérie ? Tu as bien dormi ?

Pour toute réponse, l'enfant aux couettes brun clair se dirige vers elle, bras tendus, pour réclamer :

- Porte-moi, maman !

- Je suis occupée. Je dois finir de préparer le déjeuner, puis. . .

- Maman ! continue de sangloter la petite. S'il te plaît. . .

La femme semble hésiter une seconde, regardant ses légumes, puis sa fille, mais elle finit par pousser un soupir résigné et prend l'enfant dans ses bras en la calmant :

- C'est bon, Mia. Maman est là.

Elle la berce en lui tapotant le dos. Les pleurs de la petite fille s'atténuent, jusqu'à cesser quelques secondes plus tard, laissant place à un sourire satisfait. En remarquant ce dernier, le visage de la maman s'attendrit et s'illumine à son tour d'un doux sourire.

- Je ne comprends pas ce que nous faisons ici, dis-je à Lucifer. Ces deux-là semblent parfaitement heureuses. Quel pacte pourrions-nous bien leur soutirer ?

- Un homme ou une femme d'affaire digne de ce nom se doit d'être patient, me répond-il simplement.

Je reporte donc mon attention sur la femme, qui continue de cuisiner tant bien que mal d'une main, tandis que l'autre tient toujours sa fille. Grâce au pouvoir de mon patron, nous pouvons les observer sans être vus.

Une demi-heure plus tard, le bruit d'une clé dans la serrure se fait entendre, suivi par le grincement de la porte qui s'ouvre. La femme aux cheveux brun clair place le couvercle sur la marmite, puis quitte la cuisine, sa fille toujours dans ses bras, pour rejoindre le hall d'entrée, où un homme, habillé d'un costume bleu foncé, retire ses chaussures.

- Bienvenue à la maison ! lui souhaite-t-elle d'une voix enjouée. Comment vas-tu ? Le travail s'est bien passé ?

- Ces choses-là ne te regardent pas, réplique-t-il froidement. Le repas est-il prêt ? Je meurs de faim !

- Il est encore en train de cuire.

- Comment ? ! Je passe de longues heures à travailler, pendant que tu restes tranquillement à la maison et tu n'es même pas fichue de servir le repas à temps ? !

- Je suis vraiment désolée, mon chéri. . . Mia m'a un peu ralentie. . .

- Je me fiche de tes excuses ! Je vais prendre une douche et, quand je reviendrai, je veux que la table soit prête !

Sur ces mots, il tourne les talons et se dirige vers la salle de bain, dans laquelle il s'enferme.

Son épouse baisse la tête, pendant que je commente :

- Quel homme odieux ! Comment peut-il gronder une femme qui se dévoue autant pour lui et leur enfant ?

- L'être humain est un éternel insatisfait, se contente de répondre Lucifer avec un petit sourire.

- Maman ? Pourquoi papa t'a crié dessus ? Tu n'as rien fait de mal. . .

- Ne t'en fais pas, ma puce. Allons vite dresser la table en attendant que le repas finisse de mijoter.

Quand, un quart d'heure plus tard, le mari apparaît sur le seuil de la salle à manger, sa fille l'accueille avec un large sourire en annonçant :

- Papa ! Le repas est prêt ! Regarde comme on a bien dressé la table avec maman ! Tu aimes ?

- Oui, c'est joli, lui assure-t-il avec un petit sourire.

- Viens manger avec nous, alors ! On t'attendait ! lui dit-elle en le tirant par le bras.

La petite famille s'installe à table et entame le repas, mais je constate en fronçant les sourcils que l'homme n'a pas un sourire ou un mot gentil pour sa femme, pas même un remerciement pour la nourriture qu'elle lui a préparée et servie.

Lucifer lit dans mes pensées, car il déclare sur un ton ironique :

- N'est-ce pas toi qui disait qu'elles semblaient parfaitement heureuses ? Comme tous tes semblables, tu juges trop rapidement, te contentant des apparences sans chercher à voir un peu plus loin que ça.

- Je ne suis pas comme mes "semblables", rétorqué-je en serrant les dents.

Quand il finit son assiette, l'homme quitte sa chaise et s'éloigne. Son épouse, qui aide leur fille à manger un yaourt sans se tâcher, lui demande :

- Où vas-tu ?

- Faire une sieste, répond-il sans même se retourner.

Elle se contente de cette réponse et continue de nourrir la petite, puis lui essuie la bouche et l'autorise à sortir de table pour aller jouer.

Elle entreprend ensuite de débarrasser, mais est interrompue au milieu de son travail par la vibration d'un téléphone : celui que son époux a laissé sur la table. D'où elle est, elle peut parfaitement voir les notifications qu'affiche l'appareil et ses yeux noisette s'écarquillent d'horreur lorsqu'elle lit :

"Merci pour cette superbe soirée, mon cœur ! Quand nous reverrons-nous ?"

Les couverts qu'elle tenait glissent de ses mains. Elle reste figée pendant plusieurs secondes, son regard choqué perdu dans le vide, puis se dirige lentement vers le miroir le plus proche.

Elle observe ses cheveux brun clair mal coiffés, les cernes marquant son visage, témoins du manque de sommeil et de la fatigue accumulés, ainsi que ses vêtements froissés et tâchés. Son menton commence à trembler lentement, puis elle éclate en sanglots.

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