Chapitre 2

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À peine avait-il franchi le seuil de l’entrée du commissariat qu’Akos fut informé par son collègue en charge de l’accueil qu’il était convoqué dans le bureau de Mason, son chef de section.

« C’est sur vous qu’est tombée l’enquête sur le macchabée de l’hôtel Paradisio ?

— Les nouvelles vont vite à ce que je vois. Mais oui.

— Je ne suis pas chef de section pour rien. Je voulais vous voir pour vous prévenir d’une chose à propos de cette enquête. Il va falloir du résultat et rapidement. »

Akos arqua un sourcil. Il ne comprenait pas.

« C’est une VIP ? Je ne connais pas encore son identité, j’ai raté quelque chose ?

— Pas du tout.

— Alors quoi ?

— La Sécurité Intérieure m’a contacté, il y a quelques minutes. Ils veulent être informé de l’avancée de l’enquête aussi régulièrement que possible.

— Qu’est-ce qu’ils viennent foutre dans l’histoire ?

— Je n’en sais rien à part que votre gugusse les intéresse. Peut-être lui filaient-ils le train avant qu’il ne passe l’arme à gauche.

— Et ils veulent quoi au final ? Reprendre l’enquête ?

— Non, ils veulent juste qu’on les informe si on trouve quelque chose et le plus rapidement serait le mieux.

— Vous parlez d’une demande. C’est du n’importe quoi. Ils croient quoi ? Que nous avons envie de faire durer le plaisir ? Je sens que cela va m’amuser. » fit Akos en sortant du bureau.

La Sécurité Intérieure ? Rien que cela ? Qu’est-ce qu’elle venait faire dans l’histoire ? C’était probablement lié à la nature de la victime, un Druide mais dans ce cas, pourquoi leur laissait-elle l’enquête ? Un problème d’effectif ? Akos n’y croyait pas vraiment. Quoiqu’il en fut, cette demande de la SI était un élément de l’enquête à part entière. Connaître ce qui motivait la démarche pouvait sûrement donner une orientation dans les investigations même si, pour l’instant, elle donnait l’impression de vouloir se cantonner à un rôle d’observateur.

Akos fila à son bureau et commença à effectuer des recherches. La première d’entre elles fut naturellement de remettre au goût du jour ses connaissances au sujet des Druides.

Il n’y avait aucun lien avec le druidisme des temps reculés. Au mieux pouvait-on faire une association quelque peu folklorique entre les aptitudes de la caste et une sorte de magie innée, chose qu’on n’avait eu de cesse d’essayer de coller au druidisme originel bien qu’il n’en fut rien. En réalité, le praticien des temps reculés était tout au plus un botaniste éclairé et un médecin primitif.

Les Druides, ceux qui intéressaient Akos, étaient tout autre. Leur origine n’était pas bien identifiée. Il semblait qu’ils étaient apparus à la transition entre le second et le troisième millénaire. Deux hypothèses prévalaient : la thèse de la mutation génétique et celle du produit psychotrope de synthèse. Bien qu’elles soient les plus admises, aucune ne faisait l’objet d’un consensus scientifique.

La mutation génétique en premier lieu. Il était bien documenté dans les livres d’histoire que la fin du deuxième millénaire avait vu se développer une médecine qui manipulait le vivant sans aucun cadre éthique et moral. C’est l’existence de celle-ci qui servait d’assise à l’hypothèse. Il n’en restait pas moins que la création d’une espèce à part entière ne semblait pas être du niveau des connaissances du moment. Le savoir était assez primitif et celui-ci relevait sûrement à l’époque d’une sorte de magie.

La seconde supposition, la mise sur le marché d’un produit psychotrope aux effets secondaires non maîtrisés était beaucoup plus plausible. C’était avéré historiquement : l’humanité de cette époque découvrit beaucoup de principes physiques, chimiques mais n’en avait qu’une compréhension très parcellaire. Il était donc possible qu’ils aient pu créer sans le faire exprès l’agent qui allait donner naissance aux Druides.

Quoiqu’en fut la cause, la présence des Druides figurait dans des témoignages médicaux de plus en plus nombreux à partir de cette période. Ceux-ci faisaient état des transformations physiques d’abord, puis vinrent les descriptions des aptitudes psychiques. Ceci était logique étant donné qu’il fallait bien que la glande qui sécrète l’astripine apparaisse en premier.

Au début, considérées comme des personnes malades, les Druides devinrent des êtres à part jusqu’à ce que l’on en parle comme une espèce humanoïde distincte. Au fil du temps, ils obtinrent un statut un peu particulier dans les sociétés humaines durant la seconde moitié du troisième millénaire. Leur capacité à voir les trajectoires du temps concentra l’attention. Bien qu’on sût très tôt que leurs visions étaient très restreintes, certaines personnes s’attelèrent à bâtir une sorte de légende autour d’eux. De récits plus ou moins romancés en articles pseudo-scientifiques sensationnalistes, la présence des Druides contribua à l’établissement de cultes plus ou moins élaborés. Des rumeurs commencèrent à circuler faisant état de certains représentants capables de dépasser la limite de la minute jusqu’à atteindre l’année entière. La croyance s’invita dans l’évolution des mentalités. Ces capacités ouvraient tellement d’espoir dans une époque qui en manquait cruellement qu’une bonne moitié de la population mondiale l’adopta tandis que l’autre moitié la rejeta. Des affrontements télévisuels aux confrontations politiques puis militaires, quelques années suffirent pour générer un embrasement général. Le rôle des Druides en eux-mêmes ne fut plus que secondaire. En revanche, ils firent l’objet de la part du camp qui croyait en leurs pouvoirs d’une convoitise sans borne et même d’un marché d’échanges des plus sordides. De la part du camp adverse, ce fut ni plus ni moins qu’une chasse à l’homme et une extermination systématique.

Selon les diverses estimations, la population de Druides atteignit le million ou million et demi d’individus avant la guerre. À la fin du premier siècle du troisième millénaire, ils n’étaient plus qu’une centaine de milliers pour disparaître totalement durant le second. La croyance disparut dans le même temps.

« Du moins, c’est ce qu’on croyait. » fit Akos pour lui-même devant son écran.

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