Chapitre 15

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La prose des collègues n’était vraiment pas passionnante mais surtout pénible à lire. Même si Akos comprenait que les rapports devaient respecter une certaine structure et codification, certains arrivaient à rendre des copies tellement scolaires qu’il avait l’impression de lire un texte rédigé par un gamin de sept ans. Il était tout de même heureux qu’au-delà de cela, la précision et le détail étaient présents.

Cette relecture ne lui apprit rien qu’il ne savait déjà. Seul élément qu’il releva : à plusieurs reprises, l’employée de l’hôtel insistait sur le fait de n’avoir rien touché. Cela éveilla les soupçons d’Akos et lui fit supposer qu’elle n’avait pas dit toute la vérité. Cependant aucun élément concret ne lui permettait d’imaginer ce que cela cachait.

Akos nota dans son carnet de la convoquer pour une nouvelle audition. Pour son collègue et le patron, il verrait en fonction. Autre détail qui l’interpela, c’était que dans les témoignages, la police avait été appelée vers 7h. Il y avait moins de dix minutes en voiture entre le commissariat et l’établissement.

Akos fouilla dans les papiers pour retrouver la transcription de l’appel au poste. Conclusion : il y avait un bon quart d’heure entre le témoignage et la réalité. Dans ce genre de situation, c’était plutôt l’inverse qu’on constatait. Le temps passait moins vite pour les gens car l’intensité des actions était à leur maximum. Là, il semblait qu’ils avaient pris leur temps. Peut-être n’était-ce pas lié directement au meurtre, peut-être avaient-ils employé ces quelques minutes pour dissimuler autre chose. Cela ne serait pas étonnant dans ce genre d’hôtel.

D’ailleurs, chose qui n’était pas mentionnée : les deux clients des chambres mitoyennes s’étaient mystérieusement évaporés avant l’arrivée de la police. Plausible, parce que l’hôtel n’avait pas l’autorité pour les retenir, mais cela restait une zone d’ombre, d’autant que leurs identités ne figuraient nulle part non plus.

Akos nota ce dernier point et attrapa son manteau. Il était temps pour lui de rentrer. Hector ne lui avait toujours pas envoyé les conclusions de l’autopsie. Il était certain qu’il ne les aurait pas avant demain désormais.

*

Le lendemain, aux alentours de sept heures trente, Akos eut la surprise de découvrir une invitée assise dans son bureau.

« On m’a dit de vous attendre ici. » s’empressa-t-elle de dire pour répondre à la question qu’Akos n’avait pas posée.

Heureusement avait-il pris l’habitude de remettre ses dossiers dans le petit caisson fermé à clé, casé sous son bureau. Il accrocha son manteau à la patère et se retourna. Alors qu’il allait demander à qui il avait affaire, Ely entra dans le bureau en manquant l’éborgner. Elle n’y prêta pas attention et fixa la jeune femme qui s’était levée et s’approchait d’Akos, sûrement pour se présenter.

« Bonjour… » fit Ely d’un ton un peu interrogateur.

Son regard fit un aller-retour entre Akos qui avait fait un pas en arrière et l’intruse.

« Eliya Pechanaybour, une collègue d’Akos, et vous êtes ? »

« Freya Surtungeir, opérateur dans la section 23 de la Sécurité Intérieure. » répondit la jeune femme en hésitant entre un salut militaire et une poignée de main.

Ely la laissa s’emmêler dans ses gestes en répondant par un simple signe de la tête. Freya recula d’un pas et Akos en profita pour la contourner.

« Ako Daimonokton, fit-il en allant se positionner derrière son bureau. Désolé pour cet accueil mais personne ne m’a prévenu de votre arrivée. »

Freya pivota sur elle-même pour lui faire face et remettant une mèche derrière son oreille, répondit :

« J’en suis désolée. Moi-même, je n’ai su qu’il y a une heure que j’étais affectée temporairement à votre unité. »

De là où il était, Akos pouvait voir Ely en train de littéralement radiographier la nouvelle venue petit bout par petit bout. Il était heureux que la dite Freya n’ait pas eu des yeux dans le dos car le regard d’Ely était franchement malaisant.

« Vous pouvez mettre de côté votre verbiage militaire. Vous intégrez une équipe de civils et si vous ne voulez pas qu’on vous regarde de travers, essayez de parler normalement. »

Pendant qu’il disait cela, Ely qui avait fini son scanner intégral de Freya gesticula une pseudo langue des signes pour lui demander ce que celle-ci faisait là. La situation était tellement comique qu’Akos, tout en tâchant de garder une certaine contenance, pria Freya de sortir de son bureau, prétextant la nécessité d’une conversation privée avec Ely.

*

Sitôt la porte fermée et tout en essayant de ne pas trop élever la voix, Akos interpela Ely :

« Mais qu’est-ce que tu me fais-là ? On dirait… Je ne sais pas. Qu’est-ce que tu veux ?

— Bah… commença Ely comme si elle avait une requête précise. J’arrive ici et je te trouve avec cette Freya. Du coup, je fais quoi ?

— Tu fais quoi ? Quoi ? Quand t’es arrivée, je venais juste d’entrer dans mon bureau et de découvrir qu’elle y était. Je n’ai pas vraiment eu le temps de réfléchir. Et puis, pourquoi tu me demandes ce que tu dois faire ? »

Ely détourna les yeux et prit son air renfrogné. Elle regarda ses pieds et finit par lâcher :

« On fait quoi d’elle ? Je dois la considérer comment ? Qu’est-ce que je peux lui dire, qu’est-ce que je dois garder entre nous ? Toi et moi, pas toi, moi et elle, hein ?

— J’avais compris, fit Akos avec un sourire amusé.

— C’est pas franchement marrant, protesta Ely.

— Si un peu, j’insiste. »

Akos regarda Ely avec des yeux tellement rieurs qu’elle dut se forcer à sourire elle aussi.

« Franchement… On s’en fout, affirma-t-elle en reprenant un visage sérieux. Là, faut que tu me dises, c’est quoi la stratégie. Moi j’ai pas de diplôme en contre-espionnage, donc il faut que tu m’aides.

— Entendu. »

Akos réfléchit assez vite et finit par donner le principe suivant : tout ce qu’ils savaient déjà sur l’enquête, ils pouvaient le partager. En revanche, pour chaque nouvel élément, Akos voulait en avoir la primeur et décider si oui ou non, il était judicieux de mettre Freya au courant.

« Bon, je ne pense pas que ce soit utile de le préciser, mais tout ce qui concerne Lys et les sujets que je traite avec elle, c’est motus et bouche cousue.

— Oui, ça, je te confirme : il n’y avait pas besoin de le rappeler. » fit Ely en levant les yeux au ciel.

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