La société de consommation n'est pas le monde moderne - 3

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Une culture de l’illusion qui détrône le savoir

La Société de consommation n’étant pas le Monde moderne, rien d’étonnant à ce que le libre-penseur ne soit plus tout à fait libre. Non pas à cause d’un appareil politique de censure, comme on en trouve dans d’authentiques régimes de tyrans, mais parce qu’il n’appartient plus à un monde où sa pensée sera écoutée et ses revendications entendues.

Si l’idée d’une civilisation nouvelle a pu germer dans un contexte aussi défavorable que celui de La Renaissance européenne, c’est parce qu’elle a été impulsée par la seule force de l’esprit, devenue le vecteur d’une émulation intellectuelle et d’une persuasion collective, chose désormais impensable à notre époque. Actuellement, il est dans la conviction du citoyen lambda que nul ne peut parvenir à un quelconque réconfort matériel et moral sans un soutien politique, financier ou du moins hiérarchique. L’homme moderne s’est ainsi enfermé dans une servitude en s’inventant un modèle de société qui, sans être forcément patriarcal, le déresponsabilise, voire l’infantilise. Selon lui, il revient aux seuls dirigeants et élus politiques de résoudre tous les problèmes, y compris – semble-t-il – ceux qui concernent son bonheur personnel. Un proverbe italien ironise : « Quand il pleut, c’est la faute du gouvernement... »

Avec la société de consommation, le libre-penseur est devenu un « libre-dépenseur ». Par conséquent, la population a commencé à se méfier du savoir et surtout de ceux qui pouvaient le détenir et ainsi constituer une caste supérieure indéboulonnable. Mais la société de consommation s’est développée sur la base de deux mensonges : « le bonheur est dans la consommation » et « chacun est libre de réussir financièrement. »

L’homme de connaissance étant descendu de son piédestal, il a été remplacé par le propagandiste publicitaire, plus discret, pour œuvrer dans l’ombre. C’est une des conséquences inéluctables de courants que l’on peut qualifier d’anti-intellectuels. Il est encore un fait que si le savoir dit vrai, la propagande publicitaire a pour enjeu de mentir.

À la fin du XVIIIe siècle, soit avant que ne s’implantent les premiers piliers d’une société de consommation, la France s’était hissée au rang de première puissance mondiale et ce n’était pas en raison de ses colonies – encore peu nombreuses comparé à celles de l’Espagne ou de l’Angleterre – mais grâce à ses philosophes et à toute une effervescence intellectuelle et culturelle qui a permis au pays de donner naissance aux plus grandes inventions de son temps. Le fardier inventé par Cugnot en 1770, premier prototype d’une automobile ; le premier aérostat créé en 1782 par les frères Montgolfier, ainsi que l’invention du vaccin par Pasteur en 1885, le premier décollage d’un avion par Clément Adler en 1890, les débuts du cinéma dus aux frères Lumière en 1895 ou encore les découvertes par Pierre et Marie Curie, en 1898, du polonium et du radium, deux éléments chimiques radioactifs, pourraient passer pour des conséquences du développement de l’ère industrielle, mais ces innovations et découvertes sont, en réalité, un héritage direct des grands idéaux philosophiques du début de la modernité.

Sous l’effet répétitif du matraquage publicitaire, le citoyen actuel est persuadé d’appartenir à un système de civilisation abouti, garant de toutes les libertés, de tous les progrès… Pourtant, de plus en plus, le consommateur tend à fuir les réalités de son monde en se réfugiant dans le virtuel ; en s’étourdissant, de jeux vidéo, de musiques en écouteur, de lumières artificielles et de plaisirs synthétiques. Il se laisse tourbillonner dans des danses en solo, dans des manèges à sensations, dans les ivresses multiples de machines toujours plus performantes, quand il ne cherche pas à oublier sa solitude et son désespoir dans la drogue ou les excès de l’alcool… Difficile de croire, que ce sont là, les symptômes d’une joie de vivre.

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