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Gaillac, mardi 18 février
Lorsque Marc Keller arriva à la brigade, ce mardi matin, Ducros l’y attendait, une feuille de papier à la main. L’adjudant lui fit signe qu’il allait se préparer un café, son adjoint le suivit dans la petite salle de repos.
« J’ai travaillé sur la liste que tu m’as demandée hier, dit-il en secouant le document qu’il avait toujours à la main.
— Tu y a passé la nuit ?
— Non, quand même pas, ça a même été assez rapide. Je n’ai peut-être pas toutes les adresses, mais il y en a une qui me parait intéressante.
— Je t’écoute, répondit Keller en remuant son breuvage.
— J’ai commencé par la plateforme qui gère l’appartement de la rue Montplaisir, comme tu l’avais suggéré. Ils ont un site en ligne et j’ai spécifié le secteur qui nous intéresse. J’ai trouvé deux adresses qui pourraient correspondre. L’une est située directement sur le quai de Tounis, l’autre est rue du Pont de Tounis à quelques pas de la première. L’appartement du quai ne me semble pas idéal pour une soirée, en fait c’est un studio, et le salon, sur les photos, parait trop petit, le second, par contre irait mieux, il y a trois chambres et un grand séjour. J’ai regardé sur Maps et StreetView, c’est un immeuble cossu.
— Intéressant, en effet.
— Attends, je n’ai pas encore tout dit ! J’ai creusé un peu, l’un des copropriétaires de l’immeuble n’est autre que notre avocat, Serge Duvigeon !
— Le propriétaire de la rue Montplaisir ?
— Lui-même ! Curieuse coïncidence, non ?
— Bon, d’un autre côté, s’il est propriétaire de plusieurs logements, c’est normal qu’il les ait confiés au même gérant ! C’est peut-être aussi la même société qui fait le ménage. Tu peux vérifier ? Les coordonnées sont dans le dossier. Si c’est le cas, allez faire un saut chez eux, c’est dans le quartier des Carmes, et allez faire un peu de porte à porte du côté du quai de Tounis. Je sais bien que ça date un peu, et que c’étaient les vacances, mais s’il y a régulièrement ce genre de soirées, les voisins doivent le savoir. »
Ducros sorti, Marc appela l’informaticien d’Albi. Le technicien s’excusa de ne pas avoir pris l’initiative de l’appel. L’ordinateur de Franck Delcasse avait donné du fil à retordre aux experts de la gendarmerie pour se révéler une machine entièrement dédiée aux activités professionnelles de l’ingénieur.
« Cette machine est aussi bien protégée que Fort Knox, commenta l’informaticien, et une bonne partie des dossiers se révèle cryptée, on ne pourra pas y accéder, mais je doute qu’on y trouve ce que tu cherches. Il y a tout un tas de dispositifs et de mouchards installés par le CNES, il n’aurait pas pris le risque de s’en servir pour visiter des sites libertins.
— Et du côté de la femme ? demanda Keller.
— Là, c’est une autre histoire, on dirait bien qu’elle aimait se faire plaisir cette dame !
— Explique-toi !
— Bon, il y a une partie de la machine qui est consacrée à ses activités professionnelles, on y trouve les outils classiques de création graphique et les archives de ses créations, un logiciel de gestion et de facturation et les adresses de ses clients. Rien d’anormal pour l’usage qu’elle en faisait, mais il y a aussi une deuxième partition sur le disque, plus intéressante pour toi. Une bonne quantité d’images, des photos surtout et des reproductions de tableaux. Toutes représentant des personnages, hommes, femmes ou groupes, dans des situations franchement érotiques. Les répertoires sont bien organisés, tout est classé et répertorié, ça ne ressemble pas à des images glanées à droite ou à gauche, tout est en haute qualité.
— Elle avait un atelier de peinture à son domicile, commenta Keller, elle devait aussi s’en servir comme studio photo.
— Oui, c’est bien possible, la plupart des images semblent construites, mises en scène. Du beau travail, pas du vulgaire porno. J’ai également cherché les archives de navigation sur le web. J’ai bien retrouvé des traces du site Réseau Rose. Elle s’y est connectée assez régulièrement, sur une période allant de mars à août de l’an dernier.
— Ils ont disparu le 17 août !
— Et bien ça colle, la dernière connexion est datée du 16.
— Tu peux me faire la même extraction que pour les Martinez ?
— Tu as regardé tes mails ce matin ? demanda le technicien.
— Non, pas encore, avoua Marc.
— Et bien ce que tu me demandes y est déjà !
— Tu te souviens du dernier message ?
— Bien sûr ! C’est curieusement à peu près le même que pour l’autre couple, du même auteur, Bridge 31. Soit dit en passant, je n’ai pas encore réussi à l’identifier, mais j’y travaille.
— Une adresse ?
— 1, rue du Pont de Tounis, à Toulouse.
— Bingo ! exulta l’adjudant. »
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