Chapitre 4

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Harald Schmidt accueillit les deux artistes sur le pas de la porte de la villa de son patron à Eze, près de Nice. Maria et Wilhelm furent impressionné par la vue sur la Méditerranée qui reflétait une jolie lumière bleutée. Le parolier leur fit le tour du propriétaire, et les invita à commencer dès maintenant à travailler sur la chanson sur la terrasse de la villa. Il les rassura en leur disant qu’il y avait une voiture à leur disposition s’ils avaient envie de se balader dans l’arrière-pays azuréen. Müller avait sorti un tableau où l’on pouvait écrire dessus avec un marqueur.

- Une chanson, pour un auditeur, elle doit être marquante, commença l’homme d’un ton énergique. Elle doit vous prendre aux tripes, elle doit vous toucher et le refrain doit être suffisamment entêtant pour que l’on se surprenne à la siffloter dans la rue ou au supermarché pour faire les courses. Jürgen m’a dit qu’il voulait que vous chantiez des chansons romantiques, et vous avez de la chance car ici, il y a matière à en écrire !

- Mais, si on doit parler d’amour, le décor idéal devrait être Paris, lâcha Wilhelm avec un petit rire.

- Et bien si des photos de Paris vous inspire plus, alors je vais vous ramener des bouquins dessus, accepta Harald.

Maria fit un regard noir à son ami. Wilhelm fut surpris lorsqu’il vit le parolier revenir avec des livres illustrés sur la Ville Lumière. Avec Maria, ils se mirent à feuilleter le livre qui montrait de jolies photos les monuments emblématiques, et cela leur donna à tous les deux envie d’y aller. Wilhelm trouvait les immeubles haussmanniens très élégants, et il trouvait Notre-Dame absolument fabuleuse avec son imposante flèche. Si ces photos leur donnait envie d’y séjourner, Maria se rendit compte que le mieux aurait été de s’imprégner de l’ambiance parisienne puis de noter sur un bout de papier tout ce qui leur passait par la tête pour écrire la plus belle des chansons. Tous les deux étaient d’accord pour écrire cette chanson avec le coeur.

Ce fut Maria qui prit le temps de griffonner sur le papier les paroles, puis elle commença à écrire le texte. L’histoire racontait celle d’un jeune homme, seul, qui cherchait l’amour dans les rues de Paris jusqu’à ce qu’il finisse par tomber amoureux d’une jeune femme au pied de la Tour Eiffel et avec qui ils passèrent la nuit ensemble. Müller lut cette première ébauche, et rigola avec bienveillance. Maria voulu recommencer, mais Müller s’empressa d’appeler Jürgen pour lui lire les paroles de la chanson. Lorsqu’il raccrocha, il demanda à Maria de réécrire la fin. Aux alentours de vingt heures, la deuxième version fut la bonne et Moser proposa qu’ils aillent faire un premier essai dans son studio d’enregistrement dans la semaine.

Au bout de deux jours, l’équipe de prise arriva et les fit entrer dans une pièce insonorisée. L’ingénieur du son leur fit signe, et le duo se mit à chanter. Müller les interrompit pour leur donner des conseils, et ils recommencèrent la prise. Toute la journée, ils recommencèrent jusqu’à avoir une bonne prise. Moser arriva le lendemain, heureux d’être dans sa villa. Moser voulut absolument faire un débriefing, et annonça après l’écoute du titre.

- Je sens que votre chanson fera un tabac en Allemagne, mais si vous voulez mon avis, il va falloir que vous changiez de nom de groupe. Willy & Maria, ça fait vraiment nom de duo de bar – ce que vous étiez – et ce que je veux, c’est un nom qui tape, qui soit plus classe. En fait, ce que je voudrais, c’est qu’éventuellement vous preniez des noms d’artistes. Ca mettra en plus une barrière entre vous, personnellement, et les personnages que vous allez être sur scène.

- Et quelle est votre idée, Herr Moser ? Demanda Maria

- Un nom à l’italienne ou à l’espagnol, qui rappelle l’amour, qui soit sensuel et qui claque ! Vous pensez quoi de Amore Segreto ? Toi, Wilhelm tu peux choisir comme nom d’artiste Vittorio et toi, Maria, tu peux choisir comme nom de scène Graziella ou Carolina.

- Sinon, on peut faire un rappel de nos origines bavaroise plutôt que de se donner des fausses origines italiennes ! Répliqua Wilhelm. Il faut que nous assurions aussi la réputation de notre région, et je vois pas pourquoi je devrais comme si j’avais honte d’être allemand.

- Il a raison, renchérit Maria. Je préférerais qu’on ait comme nom de duo quelque chose qui rappelle Munich, et ça donnera peut-être envie à nos fans de visiter notre ville.

- Vous êtes des banlieusard, leur rappela brutalement Moser, ça serait encore plus hypocrite de renier vos villes de naissance. Vous êtes attachés à Munich, tout comme moi je me sens attaché à Vienne alors que je ne suis pas autrichien. C’est votre ville de coeur, c’est tout.

- C’est pas plus hypocrite que de se prendre pour des italiens alors qu’on ne sait pas parler cette langue et que nous n’avons jamais été à Milan ou Rome.

- Oui, donc il n’y a aucun inconvénient à parler de Munich, fit Wilhelm.

- Comme vous voulez, se vexa le producteur, mais vous avez une idée de comment vous appeler par rapport à un lieu munichois ? Vous ne pouvez ni vous appeler BMW, ni Paulaner, lâcha-t-il d’un ton sarcastique.

- München Hauptbanhof me semble être un bon titre, fit Wilhelm qui sentait que Maria allait insulter Moser. Une gare, c’est un formidable lieu de rendez-vous où l’on retrouve sa famille ou sa copine, et on la serre dans les bras, on la fait tourner, fit-il d’un air romantique. Et ça, c’est un nom de groupe qui parlera à tout le monde.

- Je trouve ça sympa comme nom, approuva Moser. Mais, c’est trop long comme nom.

- Bavaria est mieux, suggéra Maria.

- Va pour ce nom, fit Moser.

La veille de leur retour en Allemagne, Wilhelm et Maria prirent la Citroën que Moser mettait à disposition des artistes qui venaient faire leur enregistrement ici et ce fut Maria qui conduisit jusqu’à Nice. Ils avaient envie d’avoir leur moment à deux, et profiter de faire un peu de tourisme dans une région qu’ils ne connaissaient pas mais qui était arrivée à les conquérir dès qu’ils étaient monté dans la villa à Eze. Ensemble, ils marchèrent le long de la Promenade des Anglais, et ne purent résister à manger dans un petit restaurant situé dans le Vieux-Nice. Wilhelm se rendit compte que cette nouvelle expérience les avaient plus rapprochés que la période d’avant la formation de leur duo. Ils étaient encore plus souvent ensemble, ils pouvaient discuter plus facilement et ils avaient cette chance de pouvoir voyager à deux. Mais Maria était en couple avec un certain Jochen, et ce gars intimidait Wilhelm. Ainsi, il avait accepté d’être ami avec une fille.

Quelques mois plus tard, au mois de juillet, ils avaient enfin reçu leurs résultats de fin d’années et ils eurent leur diplôme respectif. Moser les rappela tous les deux pour les inviter chez lui, à Francfort, à fêter ça. Moser avait invité un autre groupe issu de son label afin de les présenter et l’autre duo était un autre groupe du nom de Mund in Bremen. Cet autre duo jouait de la guitare et avait une chanteuse. Le guitariste était un belge se prénommant Léonard, la chanteuse était une suissesse du nom de Karin. Avant d’être approché par Moser, ils ne se connaissaient pas du tout, ils faisaient une carrière solo jusqu’au moment où ils avaient rencontrés le producteur allemand.

Moser était ravi de voir qu’ils s’entendaient bien tous les quatre et pour l’occasion, il avait engagé un traiteur qui leur avait fourni des entrecôtes, des légumes, des frites et des boissons. Moser avait dans son appartement une platine, ainsi qu’une impressionnante collection de vinyle où il présenta chacun des artistes avant de le leur faire écouter.

- Tenez, je vous aient sorti cet album de Giorgio Moroder, expliqua-t-il. Il s’appelle Knight in White Satin, et c’est sans doute son meilleur album qu’il ait sorti. C’est très disco, très nostalgique aussi et puis dans quarante ans, on continuera encore d’écouter cet artiste, lâcha-t-il avant de se mettre à danser.

- On nous a dit que vous connaissez cet homme, dit Leonard. Il paraît que c’est un homme très accessible, très sympathique. J’aime bien l’alchimie qu’il y a entre lui et Donna Summer.

- Une femme absolument charmante ! Oui, je les connais bien tous les deux. Ils sont adorables.

- Dans un magazine, vous avez dit que si vous aviez su, vous auriez pu devenir le producteur de Queen, ajouta Karin en buvant une bière.

- Oui, en effet, confirma-t-il en s’allumant un cigare. Je bossais à Londres, et vu les tronches que c’étaient, je pensais qu’ils allaient arrêter à un moment donné. Je suis heureux pour eux de voir qu’ils sont arrivés à réussir dans leur vie, mais j’aurais aimé aujourd’hui être leur producteur.

Maria décida de rejoindre Moser qui était allé dans sa cuisine afin de sortir des bouteilles de vin. La jeune femme voulait le coincer et il lui fit un petit sourire, en la voyant entrer doucement dans la pièce, en robe et en escarpins. Poliment, il lui demanda si elle pouvait l’aider à déboucher la bouteille de vin, mais ce n’était pas pour ça qu’elle venait.

- M. Moser, commença-t-elle.

- Non, tu peux m’appeler Jürgen et tu peux me tutoyer, l’interrompit-il. Si je vous ai réunis ce soir, c’est parce que je souhaiterais monter un quatuor avec vous deux, Leonard et Karin. Vous avez l’air de bien vous entendre, et c’est important pour un groupe de musique.

- J’ai du mal à comprendre le but de cette soirée, lui fit-elle en ignorant sa remarque. Pourquoi est-ce que vous invitez un autre groupe ? Vous nous avez rien dit à ce propos ! Avec Wilhelm, on croyait qu’il n’y avait que nous qui vous intéressez.

- Mais c’est le cas, Maria. Vous êtes intéressants, tous les deux. J’apprécie énormément de travailler avec vous et c’est pareil pour Harald. Il était content de vous recevoir dans ma villa. Tiens, prend la bouteille et retournons nous joindre à eux.

Maria se trouva seule dans la pièce avec sa bouteille de vin dans les mains. Elle avait du mal à comprendre la présence de Mund in Bremen alors qu’à aucuns moments il en avait parlé. Jürgen voulait certainement leur faire une surprise, leur présenter d’autres jeunes de leur âge et pourquoi pas que leur duo deviennent, en effet, un quatuor à succès ! Moser voyait les chose en grand, comme à chaque fois. Seulement, elle avait du mal à savoir si elle devait les considérer comme de potentiels nouveaux amis ou s’ils seraient des rivaux. Karin n’avait pas l’air d’être une fille méchante, au contraire même ! Avec son acolyte, ils avaient l’air d’être sur un petit nuage, ce qui laissait supposer que le producteur devait les pourrir de cadeaux en tout genre. Ils semblaient absolument envoûtés par le charisme de Moser.

Après que Moser les aient servis un verre à chacun, il les invita à se lever puis annonça d’un ton solennel.

- Jeunes gens, je porte un toast à votre succès. Je le dédie en particulier à Wilhelm et Maria, ci-présents, qui feront une présentation de leur chanson à la télé !

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