Chapitre 8 – L’écho d’un geste

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Le matin, je me suis réveillé trop tôt.

Pas parce que j’avais mal dormi. Mais parce que son visage était encore là, sous mes paupières.

Je n’ai pas voulu bouger. Pas tout de suite.

Je voulais rester là, entre deux mondes.

Celui où il me touche. Celui où il me retient.

J’ai repensé à sa phrase.

« On est comme on est. Et c’est assez. »

Moi, je ne suis pas sûr d’être assez.

Mais lui, il ne pose jamais la question comme ça. Il n’attend pas une version parfaite. Il accepte.

Ou plutôt… il accueille.

J’ai enfilé un sweat, pris mon sac, marché longtemps. Juste pour le silence et le vent dans mes cheveux.

Et dans ce silence-là, il y avait encore sa voix.

Son regard.

Sa peau moite sous la lampe.

Et ce frôlement, sur mes doigts, comme un serment sans mots.

Je n’ai pas de souvenir net de la veille. Juste des détails.

L’odeur de l’encre. Le grain de sa peau.

La façon dont il m’a retenu à la porte, sans rien exiger, sans rien promettre.

Comme s’il savait que je reviendrais. Et que ça suffisait.

Plus tard, j’ai essayé de bosser. J’ai ouvert mes cours, mes notes.

Mais les mots me semblaient lointains.

Tout ce que je lisais n’avait pas le goût de ce que nous étions en train de vivre.

Ça ne parlait pas de lui.

Pas de nous.

Franck m’a écrit.

Un message court. Pas méchant.

« Tu fais ce que tu veux, mais ne viens pas dire que je ne t’avais pas prévenu. »

Je n’ai pas répondu.

Parce que je ne sais pas de quoi il parle.

Ou peut-être que si. Mais ce n’est pas à lui que j’ai envie de l’expliquer.

Nathan ne parle pas de demain.

Il vit les gestes. Il pose les regards. Il reste là.

Et moi, pour une fois, j’essaie de ne pas courir.

J’ai passé ma vie à fuir ce que je ressentais. À refermer chaque battement trop fort, chaque frisson inattendu.

Alors non, je ne les accueille pas tranquillement, mes émotions.

Elles arrivent comme un flot, un vertige, une fièvre douce.

Mais je reste là.

Je ne me lève pas. Je ne me cache pas. Je ne détourne pas les yeux.

Je les laisse venir.

Je les regarde.

Je les sens passer dans mon ventre, dans mes doigts, dans ma gorge serrée.

C’est nouveau. C’est fragile.

Peut-être qu’il ne saura jamais tout ce que je ressens.

Ou peut-être qu’il le sent déjà.

Parce qu’il a cette manière d’écouter, même quand je ne dis rien.

Ce soir, je n’irai pas chez lui.

Je vais rester là, avec ce manque étrange qui ne fait pas mal.

Un manque qui réchauffe, comme une lumière restée allumée dans une autre pièce.

Je n’ai pas besoin qu’il m’écrive.

Je sais qu’il pense à moi à sa manière.

Comme moi, je pense à lui.

Et c’est ça, maintenant :

Un écho.

Un geste qui reste.

Une présence qui ne s’efface pas, même quand la porte est fermée.

La Voix Qui Écrit

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