Le sol vibrait sous ses pieds.
Alma avançait, seule dans l’obscurité. Mais cette obscurité n’était plus vide — elle respirait.
Des voix chuchotaient dans sa tête.
Des morceaux de souvenirs, des regrets, des cris étouffés.
Et au loin… une lumière.

Pas une lumière chaude.

Une lumière froide, blanche, parfaite.

Alma s’arrêta devant une porte. Une seule, massive, faite de verre et de noir.
Au-dessus, des mots gravés dans une langue oubliée.
Mais elle les comprit quand même.

“Ici dort le Reflet Originel.”

Son cœur battait si fort qu’elle en avait mal.

Elle poussa la porte.

À l’intérieur, une pièce circulaire. Des miroirs couvraient chaque centimètre de mur.
Et au centre… un trône.
Un immense trône de verre pur.

Dessus, une silhouette. Immobile.

Ni homme. Ni femme. Ni humain.
Un être sans visage. Un reflet pur.

Il n’avait pas de corps. Il était fait d’ombre et de lumière.
Et dans ses mains : un éclat de miroir, en forme de lame.

— Je suis celui qui voit tout, dit la voix.
— Tu es le miroir ?
— Je suis ce qu’il reflète. Le tout premier. Celui qu’on a enfermé ici pour que le monde oublie.

— Pourquoi moi ? Pourquoi maintenant ?

— Parce que tu n’étais pas censée revenir.
Mais ton double… l’a brisé. Et maintenant, je suis réveillé.

Le Reflet Originel descendit lentement de son trône.
Chaque pas faisait trembler les murs.

— Tu veux ta liberté ?
— Oui, répondit Alma.

— Alors donne-moi quelque chose en échange.

Elle serra les poings.

— Je n’ai rien à te donner.
— Tu as tout.
Tu as un nom…
Une mémoire…
Un visage…

Le Reflet la fixa.

— Choisis.
Tu sors…
Mais tu oublies qui tu es.
Tu redeviens un corps vide.
Tu oublies même ce que tu vis maintenant.

Ou alors…
Tu restes.
Et tu protèges ce monde à ma place.

Le silence explosa dans sa tête.

Deux choix.
Oublier. Ou s’enchaîner.

Pendant ce temps, dans le vrai monde, l’autre Alma s’approchait de la maison de la Gardienne.
Elle sentait que quelque chose échappait à son contrôle.
Le miroir tremblait.

Quelque chose allait casser.

Dans la salle du reflet originel, Alma ferma les yeux.

Et dit doucement :

— Je choisis… la vérité. Même si elle me détruit.

Le Reflet sourit. Pour la première fois.

Et il brisa la lame.

Alors… le miroir hurla.