Scène de crime

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 Ils n’étaient pas les seuls à avoir repéré l’attroupement près de la gare. Piqués par la curiosité, d’autres camarades les suivaient. Agatha menait la marche tandis que Romulus poussait la brouette de Lisa avec appréhension. S’il ne croyait pas à un cas grave, son père risquait fort d’être présent malgré tout. Après tout, c’était le commissaire d’Halloween. Or, il n’aimait pas que son fils traine dans ses pattes lorsqu’il travaillait. Il ne voulait pas le mêler à ses affaires et lui interdisait parfois de fréquenter tout un secteur le temps qu’il règle une histoire. Il risquait bien de ne pas apprécier que son fils vienne jeter un coup d’œil. Avec la foule, Romulus espérait passer inaperçu.

 Arrivés à hauteur de la scène, impossible de voir ce qu’il se passait. Les monstres étaient nombreux et cachaient le spectacle de leurs ailes et tentacules. Le loup-garou et le portrait restèrent en retrait tandis qu’Agatha faisait de son mieux pour passer entre ogres, lutins et autres centaures. Mais elle eut beau jouer des coudes, on la repoussa sans même s’en apercevoir.

 Boudeuse, la petite sorcière abandonna la partie et retrouva ses deux comparses. Ils allaient lui proposer de partir quand une voix familière les héla.

 — Venez, les amis ! Par ici !

 C’était Juliette, la gorgone de la classe. Elle leur faisait signe depuis la branche dénudée d’un arbre. Toute excitée, Agatha la rejoignit en vitesse, suivie de près par Romulus et Lisa. Mais quand Juliette lui tendit sa main pour l’aider à grimper, la sorcière se figea. Au grand dam de sa maman, Agatha avait le vertige. Elle ne supportait pas de se trouver en hauteur. Elle hésita quelques secondes puis, rassemblant tout son courage, elle attrapa la poigne de son amie.

 Elle ne grimpa pas bien haut, mais s’agita un peu trop au goût de la gorgone. Finalement, elles partagèrent la place sur la branche. La petite sorcière prit une grande inspiration avant d’ouvrir les yeux et essaya de se concentrer sur ce qu’elle pouvait désormais voir. En bas, Romulus et Lisa avaient du mal à ne pas pouffer de rire. Voir leur amie si paniquée alors qu’elle était à moins d’un mètre du sol avait quelque chose d’hilarant.

 Loin de se soucier de leurs rires, Agatha plaça la paume de sa main au-dessus de ses yeux pour mieux voir sans être éblouie par le soleil. Les policiers avaient entouré une scène de rubalise jaune et blanche. Ce premier constat la fit rougir d’excitation. Mais il y avait plus.

 Lorsqu’un policier daigna se déplacer, il révéla un corps étalé au sol. L’individu avait des ailes toutes froissées qui lui sortaient de l’arrière des épaules. Un costume très chic cachait avec peine une toison de poils courts et dorés. Difficile de dire exactement de quel type de monstre il s’agissait car elle ne pouvait voir son visage. Au sol, on avait contourné à la craie la position de son corps. Ce dernier détail vint confirmer les doutes d’Agatha : quelqu’un était mort.

 La petite sorcière réprima un cri de joie. Bien sûr, elle ne pouvait pas se réjouir de la mort de quelqu’un. Mais c’était là l’occasion qu’elle attendait depuis tout ce temps ! Il fallait absolument qu’elle en apprenne plus sur cette sordide affaire ! Elle sautilla sur place, oubliant quelques secondes où elle se trouvait. Cependant, quand Juliette lui demanda de se calmer, le retour à la réalité fut trop brusque. Elle pivota et glissa en criant de la branche.

 Heureusement pour elle, quelqu’un la rattrapa de justesse avant qu’elle ne s’écrase un peu plus bas. La chute n’aurait pas été bien dangereuse à cette hauteur, mais elle appréciait le geste. Elle allait remercier son sauveur quand elle reconnut les traits amusés et poilus de M. Scotyard, le papa de Romulus.

 — Fais attention, Agatha, heureusement que j’étais là.

 — Monsieur le commissaire ! Quelle aubaine !

 — Je peux savoir ce que vous faites ici, tous les quatre ? demanda-t-il en la déposant sur le plancher des minotaures alors que Juliette descendait par ses propres moyens.

 — O-On avait une visite à la bibliothèque, papa…

 — Ah oui… Bien, je vais vous demander de vous éloigner, j’ai déjà assez de curieux ici et…

 — Qu’est-ce qui s’est passé ? l’interrompit Agatha. Vous avez appréhendé un suspect ? Vous avez des témoins, des indices, un mobile, l’arme du crime ? Oh, et est-ce que…

 — Holà, tout doux, Agatha ! C’est confidentiel, tout cela. Je ne peux rien vous dire.

 — S’il vous plait, monsieur le commissaire ! Dites-moi au moins qui est la victime ! Peut-être qu’on le connait ?

 — Cela m’étonnerait, les enfants. Le bougre ne vivait pas à Halloween, c’est un presqu’inconnu. Tout ce qu’on a, c’est son nom, Victor Minka.

 Agatha écarquilla les yeux. Elle se tourna vers ses amis. Juliette et Lisa n’avaient pas eu de réaction, mais Romulus, lui, avait lui aussi tilté. Ce nom, ils l’avaient déjà entendu, pas plus tard que cet après-midi. Le jeune loup-garou fit tomber son cartable à terre et en sortit fébrilement le livre qu’il avait choisi tout à l’heure pour vérifier qu’il ne se trompait pas. Pendant ce temps, le commissaire les regardait, perplexe.

 — Monsieur le commissaire, commença Agatha en tremblotant d’excitation. Je crois qu’on a des informations au sujet de la victime !

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