Les Pumpqueen dans tous leurs états

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 Aux alentours de seize heures, Agatha et Lisa se présentèrent devant le Manoir Pumpqueen. Elles furent accueillies par Gipsy, la domestique. Celle-ci les pria de déposer leurs sacs dans le hall d’entrée puis les guida jusqu’au salon où une petite table avait été dressée pour quatre. Jacky et Béatrice s’y trouvaient déjà. Agatha installa Lisa avant de prendre place à son tour. Elles discutaient de banalités quand deux épouvantails entrèrent dans la pièce : les parents de Jacky.

 Florence, la maman, avait un butternut en guise de caboche. Cela lui donnait une tête particulièrement allongée. Son père, en revanche, avait opté pour un gros melon. Si son épouse était habillée de manière classique, lui portait des habits de jardinier un peu encrassés. Ils apportaient à la petite bande de copines une tarte à la citrouille qui sortait tout juste du four.

 — Merci, monsieur et madame Pumpqueen !

 Si la maman leur fit un grand sourire, Agatha remarqua que le papa se crispa légèrement. À bien y réfléchir, la sorcière ne connaissait ni son prénom, ni son nom de famille. Jacky leur avait toujours dit que son père avait dû renoncer à ce qu’elle porte son nom, car il était d’origine plus modeste. Une histoire d’adulte que les enfants n’étaient pas sûrs de bien comprendre mais qui devait être à l’origine de sa réaction.

 Quoi qu’il en soit, la dégustation de la tarte enchanta les enfants. Alors qu’elles partageaient le goûter, les rumeurs d’une conversation agitée atteignirent leurs oreilles. Deux autres épouvantails entrèrent. Le premier présentait un melon jaune. Il semblait moins agité que le second qui n‘était autre que Théodore Pumpqueen, reconnaissable à sa courge verte. Celui-ci se figea en remarquant que le salon était déjà occupé. Il changea aussitôt d’attitude, masquant ses préoccupations par un sourire.

 — Bonjour, les enfants. Ah, je connais déjà Béa, mais je ne pense pas avoir déjà rencontré ces deux demoiselles ?

 — Salut Oncle Scott, Tonton Théo ! Ici, c’est Lisa, et là, c’est Agatha.

 — Bonjour ! reprirent les concernées en cœur.

 — Mais je pense les avoir déjà vues quelque part ! vous étiez à la bibliothèque ce jeudi !

 — Vous êtes ici pour une soirée pyjama au clair de lune, c’est bien ça ? demanda l’oncle Scott en levant un index. Jacky, tu veux qu’on descende ton télescope pour observer la lune de sang ?

 — Ce serait super sympa, merci !

 Les deux oncles firent un sourire et sortirent avec précipitation du salon, en direction de l’étage. Aussitôt étaient-ils dehors qu’on entendait de nouveau Tonton Théo parler avec inquiétude, sans qu’on comprenne ce dont il était question.

 — J’ai appris hier soir que la police avait essayé de l’interroger, chuchota Jacky en veillant à ce que ses parents n’écoutent pas. Il arrête pas d’embêter Oncle Scott depuis.

 — Il est avocat, lui, c’est ça ?

 — Et l’un des meilleurs !

 Agatha sourit à son amie et porta un regard discret sur ce qui l’entourait. Si de l’extérieur la bâtisse paraissait abandonnée, une fois à l’intérieur, ce n’était plus le cas. Tout était propre, les vases remplis de plantes carnivores resplendissaient de mille feux. Une grande toile trônait au-dessus de la cheminée. Elle représentait un épouvantail à tête de citrouille richement vêtu, posant avec une épée devant des humains qui se prosternaient. Un beau tapis persan recouvrait le parquet. Dans de confortables fauteuils, les parents de Jacky lisaient journal et roman.

 — Ta Grand-Mamy n’est pas là ?

 — Non, on ne la voit quasiment qu’aux heures du repas. Elle reste beaucoup dans sa chambre, pour dormir ou inspecter les finances de la famille.

 Agatha acquiesça avant de prendre une pause pour réfléchir à tout ce qu’elle venait d’apprendre. Elle fut sortie de sa rêverie quand Gipsy vint débarrasser la table. Béatrice, qui connaissait déjà bien les lieux, se leva pour fouiller dans une petite armoire dont elle sortit plusieurs cartons de jeux de société. Elle déposa les boites sur la table et on proposa à Lisa de choisir leur occupation.

Après une longue partie de Monopoly, et quelques disputes au sujet de la rue de la paix, les filles décidèrent de changer de jeu. Seulement, parmi les boites, plusieurs leur étaient inconnues. Curieuses, elles ouvrirent le Stratégo. Les règles leur paraissant diablement compliquées, elles le refermèrent vite pour porter leur attention sur un carton sans nom.

 Elles s’étaient attendues à trouver un puzzle à l’intérieur. Mais au lieu de trouver tout un tas de pièces, elles découvrirent une multitude de vieilles photos de famille. Dessus, des épouvantails de tout âge posaient dans différentes circonstances. Des photos de classe, à la mer, en camp de vacances, habillés pour Halloween ou pour une fête d’anniversaire… Il y avait même un mariage.

 — Oh, mais vous avez déniché un vrai petit trésor ! s’exclama Florence Pumpqueen qui s’était approchée après avoir entendue toutes leurs exclamations.

 — Eh bah, ça ne nous rajeunit pas, ces images, plaisanta le papa.

 — Maman, maman, c’est toi dans cette robe de mariée ?

 — Ma chérie, je ne suis pas aussi vieille… Non, ce sont tes grands-parents.

 Tandis que les parents de Jacky se joignaient à elles pour observer toutes ces vieilles photos, le regard d’Agatha fut attiré par l’une d’elle en particulier. Sur celle-ci, un sphinx posait aux côtés de trois autres épouvantails. Ce n’était pas étonnant d'y retrouver la victime, puisqu’elle savait qu’il avait été le meilleur ami de Théodore. Ce qui l’était davantage, c’était qu’il faisait la bise à l’épouvantail à tête de butternut : La maman de Jacky.

 Agatha voulut attraper la photo, mais le papa fut plus rapide. L’air de rien, il attrapa la photo et la fit disparaitre dans sa poche. Il fuyait la petite sorcière du regard mais ses traits trahissaient de nouveau son irritation. Agatha resta interdite jusqu’à ce que Béatrice ne sorte une vieille cassette VHS de la boite.

 — C’est peut-être le film de votre mariage ?

 — Oh, non, je crois que je sais ce que c’est, rit Florence. Il faut savoir que, quand nous étions plus jeunes, Scott et moi avions lancé notre propre studio de dessins animés.

 — C’est vrai ? s’exclama Lisa en sortant de ses contemplations. Et ce drôle de bidule, c’est… ?

 — L’ancêtre des DVD.

 — Les quoi ?

 — La technologie va décidément trop vite… Disons qu’avec le bon appareil, on peut encore visionner nos vieux dessins animés de l’époque. On n'en a fait que quelques-uns, mais c’était une chouette expérience !

 — On peut peut-être retrouver un vieux camescope dans le grenier, proposa le papa en haussant les épaules.

 — On verra ça plus tard, je crois qu’il va être l’heure de passer à table ! Je me demande ce que Gipsy a préparé de bon !

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