Le café du coin...

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Assise à un café, j'observais avec une curiosité, probablement dérangeante et possiblement discourtoise, un jeune homme.

Bien bâties malgré son jeune âge, ses larges épaules, compensées par sa haute taille, étaient mises en valeur par un sombre costume au mélange bleu foncé et gris. Ses mains étrangement agitées sortaient des deux plus petits orifices de cette veste distinguée. Je constatais, avec déception et désarroi, le tissu banal enveloppant ses jambes : un simple pantalon d'ouvrier, de travailleur de la grande ville, étant de très mauvais choix pour convenir à ses chaussures à petits talons que portent habituellement les hommes qui se disent d'importance.

Cet homme était sans l'ombre d'un doute un novice, qui tentait sa chance dans le monde intellectuel : quittant certainement sa classe ouvrière pour devenir un simple bourgeois, ce maladroit peinait à s'imposer dans ce nouvel entourage que sera le sien, et se trouvait dorénavant en pleine transition financière, d'où cet accoutrement assez exotique et osé.

Heureusement, ses parents lui avaient laissé un héritage des plus opportun : sa beauté. Sa beauté, à défaut de son futur "gagne-pain" au sein de la société, se chargera de lui créer une réputation honorable, un respect naturel, et un harem de choix...

Ses magnifiques yeux bleus s'attiraient le regard discret, mais charmé, des femmes ; et celui moins chaleureux, mais sans en être moins intéressé, des hommes. Toutefois, il ne fallait que peu de temps aux passants pour remarquer ses yeux bleus fatigués, cherchant hâtivement autour de sa personne des visages familiers peut-être, ou bien, quelques mots égarés qui puissent lui indiquer le chemin à prendre.

Malgré sa chanceuse génétique, impliquant son avenir radieux aux côtés des illustres de son époque, il me semblait en cet instant confus, fragile, certes enivré par cette nouvelle perspective d'une brillante carrière s'ouvrant à lui, mais encore incertain et angoissé. Ses mains nerveuses épongeaient inutilement un front en sueur, plissé par l'angoisse qui le ronge en attendant le moment de vérité. Ses allers-retours, pressés devant le Café, cachaient sans peine la trahison de son corps ayant cédé, déposé les armes face à cet ennemi redoutable qu'est l'attente.

Soudainement, une main grasse, bienveillante, symbole de confiance, apporta un remède à ce jeune homme vaincu et conquis par l'anxiété, un remède dont il avait terriblement besoin, un remède qui soigne tout homme atteint des pires maux concevables : l'espoir.

Le jeune homme, aux couleurs retrouvées, au regard à nouveau vivant et remerciant autant que le grand sourire qu'il affichait à son bienfaiteur, tendit à son tour sa main, agitée cette fois-ci par l'excitation prenant possession de son enveloppe charnelle.

Buvant une gorgée de mon café quelque peu refroidi, je vis partir, avec une certaine satisfaction, ce jeune homme bientôt connu de la grande ville et, ce vieux monsieur bientôt oublié par cette dernière.

FIN

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Commentaires & Discussions

L'homme du café (18e siècle)Chapitre4 messages | 1 an

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